La poudre blanche

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Passons maintenant aux cheveux ! », annonça fièrement Antoine au miroir. Ce matin-là, il est à peu près 8h, Antoine avait un rendez-vous d'affaire très important. A la fin de cette réunion commerciale, son projet, sur lequel il avait énormément travaillé, allait peut-être se réaliser. Il ne restait que quelques représentants à convaincre et Antoine ne comptait pas repartir bredouille.

Antoine se brossait le peu de cheveux que lui restait. Il arrivait à la soixantaine. Sa femme, Clothilde, se pomponnait dans la salle de bain supérieure, située au deuxième étage de leur grande et luxueuse demeure. Dans cette maison : Antoine, Clothilde, et Pantoufle, leur vieux cocker, et un silence funèbre. En effet, ils étaient situés en face d'un cimetière. Les voisins ne risquaient pas de les déranger !

Mais revenons à notre homme d'af-faire. Après avoir finit de brosser le dernier « poil » qui lui restait, il prit le parfum de sa femme (ne me demandez pas de vous expliquer pourquoi il prend le parfum de sa femme, je n'en ai aucune idée), et appuya généreusement sur la poire. Lorsque le nuage odorant se dissipa, il porta son regard vers la porte d'entrée de la salle de bain et soudain...

Une silhouette blanche défila sous ses yeux horrifiés. Est-ce le fantôme d'un habitant du cimetière ? Vient-il le hanter, lui exprimer ses peines ? Est-il venu seul, ou sont-ils plusieurs à l'observer ?

Antoine rampa discrètement vers le bureau de la pièce voisine et s'empara du téléphone. Ses doigts fins et tremblants appuyaient doucement sur le « 1 » puis sur le « 7 ». « Bienvenue sur nos services, que puis-je faire pour vous ? » lorsque la douce et féminine voix eut finit de prononcer ces mots avec une total aisance, Antoine dévia son regard du spectre et répondit à voix basse : « Oui mademoiselle...il y a un fantôme chez moi et...mais non je ne suis pas fou !...deux rue Rousseau à Lyon ! » puis il raccrocha. Il n'avait plus qu'à attendre que la police arrive. Ses mains tremblaient. Il suivait des yeux la silhouette blanche qui, fouillait chaque recoin du salon come si elle cherchait quelque chose.

Soudain, il y eu un violent claquement de porte venant du rez-de-chaussée. « Police, ne bouger pas ! » Antoine comprit que le secours qu'il avait demandé était arrivé. Les nombreux pas de la brigade retentissaient dans le vieil escalier en bois.

Lorsque la porte s'ouvrit, les yeux d'Antoine s'illuminèrent. Le chef de la brigade, qui était en réalité une femme, s'avança vers la silhouette. Cette femme était forte et en un coup elle aurait pu compresser un bus tout entier et sans efforts.

L'énorme femme prit de l'élan, tendît les bras, ce qui n'était pas du tout élégant puisque la graisse y pendait, et sauta sur le spectre et la plaqua, tel un rugbyman sur son ballon. Dans ce cours instant, Antoine reconnu le visage horrifié de Clothilde, noyée sous un mètre de poudre blanche de maquillage. « Arrêtez, ce n'est pas un fantôme, c'est ma femme que vous écrasez ! » Mais il était trop tard. Le chef se releva, et découvrit, avec effroi, le corps meurtri de Clothilde. Ses yeux suppliaient Antoine de l'aider. Il se précipita vers sa plate femme et la souleva soigneusement par le cou.

Ses paupières commençaient à retomber sur ses beaux yeux vert et Antoine comprit à ce moment-là que la femme qu'il avait aimé depuis 35 ans n'était plus de ce monde. Il demanda à la police de le laisser seul, elle l'écouta. Il installa une chaise, monta dessus avec la corde de son pyjama, fit un nœud coulant, et passa la boucle autour de son cou. Il prit la main, froide, de sa femme et poussa la chaise...

Humour NoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant