ᏴᎡᏫᏦ-ᎬN(Ꭰ) [TERMINÉ]

~Forty-two

-"Nissy ?"

Luna leva la tête de la salle à manger, observant calmement la jeune femme qui était descendue.

-"Où est-ce que tu vas ?" Demanda-t-elle.

Nissy la fixa.

-"J'ai besoin de ma baguette." Elle tendit son bras. "Donne-la moi."

Luna ne bougea pas, clignant plusieurs fois des yeux.

-"Ta baguette ? Pourquoi en as-tu besoin ?"

-"Pour partir ?" Rétorqua-t-elle. "Je dois me rendre quelque part."

Luna haussa les épaules, allant récupérer la baguette qu'elle avait vu trainer.

-"J'espère que ton voyage sera agréable." Luna la lui tendit. "Qu'il t'apportera toutes les réponses dont tu as besoin."

-"Je ne rejoins pas Harry et les autres." Affirma Nissy.

-"Je sais." Répondit calmement Luna. "C'est pour ça : j'espère que tu trouveras des réponses."

Oui, elle n'allait pas rejoindre ceux qui lui avaient ouverts les yeux, mais bel et bien ceux qui tentaient désespérément de les lui fermer.

Les humains étaient ainsi ; faibles, vides de sens et pourtant pleins de vie. Ils étaient arrogants, pensaient que le monde leur appartenait ou au contraire narcissiques, pensaient qu'ils étaient bien trop en dessous du monde pour pouvoir en être digne.

Ils se refusaient à tuer mais se taisaient face aux tueries, ils écrasaient un insecte mais se battaient pour les droits des elfes. Ils étaient tout et son contraire, ils étaient le vide et le plein uniquement quand ça les arrangeait.

Tantôt idiot, tantôt génie, tantôt pyromane ou mythomane, un jour pieux puis l'autre barbare, ils n'avaient que le paradoxal pour expliquer l'inexplicable.

Ils cherchaient des réponses mais les refusaient lorsqu'elles ne leur plaisaient pas, posaient des questions mais les changeaient lorsqu'elles ne correspondaient pas aux schémas.

Chercher un sens à la mort, ignorer le sens de la vie.

Le premier contact était celui de la mère, le dernier était celui de la terre, celle qui portait en son sein tous les méfaits de ses enfants les plus prospères.

Maman, que faire maman, que faire lorsque le monde me dit que tu n'es plus le paradis ?

C'était comme perdre ses repères, perdre son phare dans la nuit noire. Maman, que faire maman, que faire lorsque le monde se bat pour sauver ce que tu cherches si désespérément à m'enlever ?

Ma vie.

Voilà ce que tu veux m'arracher, maman.

Et son cœur criait, pleurait comme un enfant qui n'arrivait pas à exprimer, avec son peu de vocabulaire, ce qu'il aurait tant souhaité hurler.

L'humain était fort, l'humain était faible.

L'humain était humainement imparfait, et c'était sans doute ce qui le rendait si parfait.

-"Mère."

C'était le froid glacial de la Mort qui s'abattait.

Le regard vide de Navis se porta lentement jusqu'au visage de sa fille.

-"Qu'est-ce que tu fais ici ?" Souffla-t-elle entre ses dents tremblantes à force d'être tant serrées.

-"Mère, j'ai pris ma décision." Elle s'approcha, repoussant la table du logis dans lequel ses parents s'étaient cachés en attendant la mort. "Je vais aider Harry Potter à tuer Tom. Ensemble, nous trouverons les horcruxes et le tueront."

Le silence se fit plus lourd, tandis que le visage de sa mère lentement se défigurait.

-"Comme ça nous n'avons pas besoin de nous sacrifier." Murmura Nissy en un doux sourire.

Et surtout, elle n'avait pas besoin de sacrifier Harry.

Elle avait le choix. Elle avait le choix de vivre, de trouver une vie autre que celle qu'elle avait eu jusqu'alors.

-"Et moi qui pensais t'avoir tout inculqué."

Elle ne l'entendit que peu, cette phrase coincée dans la gorge de sa mère.
Nissy fronça les sourcils, s'apprêta à lui demander de répéter.

-"C'EST COMME ÇA QUE TU ME REMERCIES DE T'AVOIR MISE AU MONDE ?" Navis l'attrapa par le cou, la repoussant contre le mur, le visage marqué par la rage. "C'EST COMME ÇA QUE TU COMPTES TE VENGER ?"

-"Mais mère, pourquoi devoir mourir alors que nous pouvons le tuer tout en restant en vie ?" Souffla la jeune femme sans comprendre. "L'idée est bien meilleure !"

-"Parce que notre famille est maudite, Nissy."

Son père les fixait, les yeux emplies de déception.

-"Nous ne méritons pas de continuer une lignée au nom tâché." Finit-il calmement par dire.

Elle ne méritait pas.

Oh, elle ne méritait pas.

Comment avait-elle pu oublier ça ?

Elle ne méritait pas de naître, ne méritait pas de vivre, ne méritait même pas de mourir.

Les Jedusor n'auraient jamais dû être une famille de sorcier.

Ils auraient dû rester des moldus, de maudits moldus vivant auprès de maudits sorciers.

-"Retourne-y." Souffla Navis entre ses dents. "Retourne-y et tue-les, tue-les tous si ça te permet de le tuer lui." 

Retour à la case départ.

Elle abaissa la tête, se laissant aller aux aléas des mains de sa mère sur sa peau de porcelaine, ses mains qui marquaient son cou sec.

Le Cuivré des Marais, ce papillon qu'elle souhaitait tant voir avant de mourir se tenait finalement juste devant elle, et pourtant elle ne l'avait remarqué.

Elle laissa échapper un léger rire.

Le Cuivré des Marais, ce papillon presque éteint à cause de la destruction de son habitait.

Le Cuivré des Marais, une relique d'un autre temps.

Elle leva légèrement les yeux vers sa mère aux yeux d'antan.

Navis était prisonnière du passé, elle restait la survivante de la famille, l'enfant prodige qui se devait de venger sa mère, elle qui était mère à son tour ne savait pas quoi faire, quoi transmettre à part cette haine qu'elle avait, le seul carburant qui la faisait tenir, la seule chose à laquelle elle s'était désespérément raccroché toute sa vie. 

-"Harry a de mon sang dans l'organisme." La voix de Nissy se brisa sur le dernier mot, et elle se mordit la langue. "Si j'exécute le plan, il mourra lui aussi."

Navis la relâcha, levant un sourcil.

-"Et ce garçon, qui est-il pour toi ?" Demanda Aaron derrière.

Sa fille le regarda dans les yeux, ces derniers embués de larmes.

-"Quelqu'un d'important." Souffla-t-elle.

Navis se tut, la fixa.

-"Alors raison de plus de l'achever." Répliqua-t-elle.

Nissy tourna sa tête vers elle, observa son visage glacial, celui qu'elle avait tant observé et sur lequel elle n'avait jamais rien vu d'autres que ces yeux insondables.

Elle déglutit, serrant les poings.

-"Bien, mère." Elle abaissa la tête, essuyant ses yeux. "J'ai eu la réponse que j'attendais."