Partie 1 | Au jour du désespoir

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- Mme Sow, je suis désolé

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- Mme Sow, je suis désolé. Nous avons fait tout ce qui était en notre pouvoir... Votre enfant n'a pas survécu. Je suis réellement désolée.

Je regarde le médecin, qui se tient debout devant moi, je suis abasourdie, le regard vaseux, je ne réagis plus.
- Mme Sow ? Mme Sow répondez-moi, insiste le Dr Joubert.

Le choc est si grand, que je ne sens plus mon corps. Je suis incapable de parler et encore moins de réfléchir.

J'ai tellement rêvé de ce bébé !

Comment ai-je pu perdre mon bébé ? C'est irréel. D'ailleurs, je n'y crois pas. Sept ans après notre mariage, nous revenons à la case départ, pourtant cette fois-ci, nous avions presque réussi.

Presque !

Un torrent de larmes dévale mon visage, je tremble, je ne veux pas que tout cela soit vrai.

J'étais dans mon septième et j'ai perdu les eaux quelques heures plus tôt. Bien que ce soit prématuré, les médecins m'ont dit qu'il était viable, qu'ils savaient y faire. Il n'y avait aucun souci majeur si ce n'est que mon petit chou allait être pris en charge en néonat' pendant quelques temps, la routine assurément ! Malheureusement, mon petit ange est né avec une insuffisance cardiaque qui n'avait pas été détectée durant le suivi de grossesse.

J'ai quand même pu tenir ma fille dans les bras, quelques minutes seulement car elle était fragile. Il lui fallait des soins immédiatement. Et puis je l'ai remise aux infirmières le cœur serré. Entre temps Khalil qui a fait aussi vite que possible pour me rejoindre était arrivé et nous voilà trente minutes plus tard avec cette affreuse nouvelle ; son cœur n'a pas tenu, il a cessé de battre sans qu'ils ne puissent jamais le faire repartir.

Je ne sais pas comment je vais tenir. La douleur est impossible, mon corps tout entier hurle de douleur. J'ai mal, je pleure, je ne sais pas comment je vais pourvoir survivre à cette épreuve.

[ Trois semaines plus tard...]

Aujourd'hui, encore je ne sais pas ce qui me fait tenir, si ce n'est ma foi en Dieu. J'ai perdu énormément de poids, je n'ai plus d'appétit et je dors très peu. En réalité, c'est la grosse déprime !

J'ai la chance que mes parents soient là pour moi et j'ai encore plus de chance d'avoir des frères de cette qualité. Ils ne m'ont pas lâché d'une semelle et sans eux, je n'aurais plus jamais eu de courage.

Je n'ai même pas eu le temps de faire la layette, j'attendais le huitième pour pouvoir me préparer, j'avais déjà fait plusieurs fausse-couches avant et je ne voulais pas me précipiter. À croire que je savais déjà ce qui allait se passer.

La vie est injuste quand même !

Le seul bébé qui avait bien voulu rester assez longtemps dans mon utérus, n'a pas survécu. Je me sens nulle et coupable de n'être même pas capable de mettre au monde un enfant en bonne santé.

J'ai honte et je me sens mal vis-à-vis de mon mari et puis aussi de ma belle-famille. Eux qui sont à fond dans les traditions doivent se dire que je suis incapable de leur donner un héritier. C'est très dur pour moi !

Les Sow n'attendait que ça : l'enfant de Khalil ! Il n'avait que ces mots là à la bouche : "l'enfant de Khalil, l'enfant de Khalil ! ". Je ne sais pas bien pourquoi, mais ces gens-là ne m'appréciaient pas.

Mon beau-père, Mohamed Sow m'ignore la plupart du temps, parfois il me sourit et je crois que finalement ça me suffit largement. Quant à ma belle-mère, Alimata Sow, elle me déteste cordialement. Elle n'a jamais approuvé notre relation et elle n'a jamais manqué de me le faire savoir.

Cette femme est une véritable plaie !

Je pense surtout que Khalil est le petit dernier, le fils tant attendu et donc son chouchou. Elle a pourtant deux autres filles À Zeinab l'aînée, et Diéné la cadette qui sont tout à fait charmantes.

Alimata Sow vendrait père et mère pour son fils adoré. Je sais qu'elle aurait souhaité qu'il épouse une sénégalaise comme lui mais certaine pas une fille de rien du tout comme elle sait si bien le dire. Je suis pourtant Westaf comme elle mais il faut croire que mes origines ivoiro-guinéenne n'ont pas suffi à la combler.

Je n'ai visiblement pas le bon pédigrée !

Malheureusement pour elle, son fils a jeté son dévolu sur moi, elle n'a pas le choix. Ils se chamaillent souvent à mon sujet comme cette fois ou devant d'autres membres de la famille elle a insinué que je ne servais à rien. Mon mari avait encore pris ma défense :

- Maman laisse ma femme tranquille ! Sinon je ne mettrai plus un pied chez toi. C'est celle que j'aime et c'est la future mère de mes enfants alors un peu de respect s'il-te-plaît Maman !

- Ta femme tu dis ? Quelle mette au monde d'abord et après on verra si elle est une femme. Pour l'instant son ventre est un nid vide !

Voilà, ce que je subis à longueur de temps ! Cette femme n'a aucun tact, elle dit tout ce qui lui passe par la tête sans que personne ne puisse l'arrêter. Alimata Sow me sort littéralement par les yeux.

Je suis épuisée psychologiquement, je n'ai plus d'arguments pour justifier ma place d'épouse auprès de la famille de Khalil car je n'ai pas d'enfant.

Dieu sait comme les enfants sont importants dans nos cultures africaines !

Cette épreuve a lourdement impacté notre vie de couple et bien que mon mari fasse tout ce qui était en son pouvoir pour me soutenir, j'ai du mal à récupérer. Pour me changer les idées, il a organisé un petit voyage à New-York et cela m'a fait le plus grand bien.

Au retour des États-Unis, je veux même qu'on tente refaire un autre enfant. Le médecin moins enjoué et surtout plus prudent a freiné mes envies de maternité. Il m'a demandé de laisser le temps à mon corps de se reposer et régénérer.

C'est difficile pour moi car je refuse l'échec. Malgré tout, nous suivons les conseils du Docteur et nous attendons six longs mois mais une nouvelle fois, la vie n'en fait qu'à sa tête !
Comme si tout cela ne suffisait pas, les épreuves se s'enchainent.

Je me souviens toujours de ce soir où Khalil a demandé à me parler. Il s'est assis en face de moi en tenant fermement mes deux mains dans les siennes.

Je n'ai rien oublié de ce moment, ni les gestes, ni les mots, aucun détail car les larmes ont fixé ma mémoire à jamais.

C'est impressionnant comme le destin peut nous jouer des tours !

Jamais je n'aurais imaginé vivre toutes ces choses en à peine quelques mois. Mais encore une fois, je vais devoir être très forte, car ma petite vie tranquille va prendre un détour bouleversant !


***

MALIA: Le Prix du Bonheur      Où les histoires vivent. Découvrez maintenant