Partie I : Avant. 1

41 2 0
                                    

Quelques mois plus tôt...

-Cloé, tu peux m'expliquer ? Je veux savoir pourquoi il ne veut pas. Qu'est-ce que je lui ai fait ? dit Emma en jouant nerveusement avec son crayon.

Cloé secoua sa longue chevelure blonde et répondit à son amie.

-Récapitulons tout depuis le début, Emma. Cela fait trois ans cette année que vous êtes dans la même classe. En cinquième vous appreniez à vous connaître et le courant passait plutôt bien. En quatrième tu te concentrais sur Jules mais vers Noel, subitement, tu as commencé à préférer Marc. Bon, on peut te comprendre, il est assez mignon...

-Cloé ! s'offusqua son amie.

-Ok ok, je voulais savoir comment tu réagissais après tout ce temps, et on peut dire que tu n'as pas changé ! Donc, où en étais-je ? Ah oui, Marc te plaisait de plus en plus et tu lui a demandé de sortir avec toi, il a refusé et vous vous êtes éloignés.

Emma grogna en entendant ce passage.

-Début troisième, tes sentiments pour lui au lieu de s'effacer se sont intensifiés. Comme il ne semble pas t'en vouloir et que vous êtes redevenus proches, tu retentes ta chance. Et il t'envoie à nouveau balader. Après une période assez électrique, tu espères renouer des liens avec lui. Et vous voilà, début Mars, en train de reprendre doucement contact. C'est tout simple !

-Oui dans les grandes lignes... Mais au bout de trois ans il aurait dû craquer !

-Peut-être pas, tu sais. Ca se trouve il est gay.

-Quoi ?! N'importe quoi ! Tu délires.

-Non, c'est une possibilité comme une autre. Ou alors il a juste peur de sortir avec une fille. Tu as vu comme il est timide. Et en y réfléchissant bien on ne connaît presque rien de sa vie.

-Mouais, mais s'il savait ce qu'il voulait ça me simplifierai pas mal de choses quand même.

 A ce moment elles furent interrompues par leur professeur qui leur demanda un peu d'attention.

-S'il vous plaît les filles ! Suivez un peu !

-D'accord madame. Répondit la belle blonde, puis s'adressant à sa meilleure amie, c'est bon ! Ca fait quatre jours que nous sommes sur cette leçon, on a compris la pratique !

Emma ne pouvait cependant se permettre de ne pas écouter en cours et elle le savait. Elle retourna donc à ses cahiers et équations compliquées, sans oublier de couler  un regard vers Marc.

Voici donc à quoi se résumaient ses journées : Marc, maths, Marc, français, Marc, histoire, Marc, Marc et encore Marc ! Elle n'arrivait pas à se le sortir de la tête.

A la fin des cours elle prit le bus pour rentrer chez elle. Emma entendait les conversations des autres, certains racontant leur disputes avec leur mère, les accrochages avec les frères et sœurs, tout ce qui les attendait en rentrant chez eux. Ils se plaignaient. Mais la jeune fille se dit qu'il ne comprenaient pas. Ils ne savaient pas ce que c'était que de rentrer dans une maison vide le soir, de ne pas pouvoir discuter avec sa mère de tout et de rien, ni d'aller embêter son petit frère ou rire avec sa sœur. Non ils ne savaient pas ce que c'était d'avoir une mère morte, d'être élevée par un père qui n'avait jamais le temps. Ils ne comprenaient pas la chance qu'ils avaient.

Le trajet de l'arrêt de bus à sa maison était relativement court et elle vit tout de suite ce grand chalet en bois, décoré avec de magnifiques suspensions de géraniums. Son père les entretenaient plus que régulièrement et y tenait comme à la prunelle de ses yeux. Aussi loin que remontaient ses souvenirs, elle ne se rappelait pas d'un autre chez-soi (si on pouvait appeler ça un chez-soi). Ils y vivaient depuis longtemps, trop longtemps.

Elle était toujours la première à arriver. Son père Tobias n'était là qu'à partir de vingt heures. En effet, depuis la mort de sa femme, il ne supportait pas la vue de la maison où ils avaient vécu et vu aître leur fille. Mais il ne pouvait se décider à la vendre, en réalité, il gardait l'espoir fou que sa femme reviendrait et que tout redeviendrait comme avant. Et si c'était le cas le premier endroit où elle chercherait ce serait cette maison. Alors il se forçait à y revenir tous les soirs en espérant la voir accoudée au comptoir de la cuisine lui souriant. Un jour il s'était demandé pourquoi ne pas partir sans regarder en arrière ? Mais encore une fois il repensa à elle. S'il abandonnait sa fille, jamais elle ne lui pardonnerait. Comment avait-elle pu les laisser comme ça ! Au début, il n'osait regarder Emma de peur de fondre en larmes, elle ressemblait tellement à sa mère. Il la détestait. Pourquoi ce n'était pas elle qui était morte ! C'était en partie de sa faute en plus. Mais au fil des ans, en la voyant grandir, évoluer, son regard changea. Il comprit pourquoi elle lui avait laissé Emma, il avait besoin de quelqu'un à qui donner tout l'amour qu'il lui réservait. Elle lui avait laissé un souvenir. Ce n'était pas de la faute d'Emma. Au contraire, elle n'avait pas connu sa mère, et son père la haïssait. Il avait été ignoble avec elle. Un père affreux, et égoïste. A chaque fois qu'il y repensait, il avait honte. Depuis il essayait de se faire pardonner, mais au fond il savait que ce qu'il avait fait était irréparable.

Ainsi il essaya de trouver un compromis entre ses exigences et les besoins de sa fille. Un rituel s'installa. Dès qu'Emma rentrait du collège, après avoir fait ses devoirs, elle préparait le repas. Tobias, passait chez la pâtisserie qui se trouvait sur le chemin du retour et y achetait le dessert. Ils dinaient ensemble, sur la grande table en bois, se regardant dans les yeux. Aucun des deux n'aimait parler et le silence leur plaisait.

Emma prit son inspiration et rentra dans la grande maison. Sa chambre se trouvait au premier étage. Elle aimait pouvoir monter et descendre les escaliers. Elle ne tenait jamais en place. Elle détestait ce laps de temps avant que son père ne rentre et où elle se retrouvait seule dans cette maison où elle avait tant souffert. Elle ne s'était jamais vraiment sentie chez elle ici. Pour combler le temps, elle monta dans sa chambre pour travailler. Leur professeur de maths leur avait donné de longs exercices d'algèbre et s'était permis de placer une petite interrogation en matinée. Mphm ! Et on n'était que lundi...

Elle eut quand même le temps de finir ses devoirs et de préparer le repas avant que son père n'arrive. Emma sortait le gratin du four au moment où il franchissait la porte.

UnLoversWhere stories live. Discover now