Le temps de la réflexion, quelques jours plus tard

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Duncan est inquiet. Il n'a toujours pas eu de nouvelles d'Adena depuis leur entrevue sur la crique, quelques jours plus tôt. Contre toute attente, son inquiétude est grandissante à son égard. Son visage au moment de tomber l'a vraiment marqué, et pourtant en près d'un millénaire d'existence, il a eu plus d'une fois l'occasion de voir des guerres, du sang, des morts.

Avec en plus la prophétie du Lupus Daemonica qui reste encore et toujours un mystère, la nervosité de la meute ; tout cela fait beaucoup !

Il était dans ses appartements en train de réfléchir à la situation, quand il entend quelqu'un frapper à sa porte :

- Duncan ? Je peux entrer ?

- Oui, Ailis, entre.

D'un pas sûr mais léger, sa sœur entre dans la pièce, se plante en plein milieu, les poings sur les hanches.

- Que se passe-t'il, Ailis ?

- Mais c'est à toi de me le dire, Duncan ! Tu n'es vraiment pas toi-même depuis quelques temps... Serait-ce la douleur que tu as éprouvée l'autre fois qui te fait encore souffrir ?

- Ailis, je te l'ai déjà dit, cela ne te regarde pas !

Si la meute savait qu'il avait eu une discussion avec un vampire sans bain de sang, cela ne passerait certainement pas inaperçu !

- Mais si, ça me regarde, ça regarde toute la meute, surtout quand notre Alpha n'est pas comme d'habitude.

- Qu'est-ce qui te fait dire ça ?

- Un tas de petites choses, tu ne sembles plus aussi attentif qu'avant quand la meute parle, comme si tu étais ailleurs. La dernière fois, Faolan t'a taquiné à propos d'une fille, tu es sorti de tes gonds comme rarement. Comme si le sujet était sensible parce que proche de la vérité. Et hier, Aloys te racontait l'altercation qui s'était produite au Loup Déchaîné, et tu souriais ! Tu souriais, Duncan !

- Et alors, en quoi est-ce un mal de sourire ? Tu ne veux pas me voir heureux ?

- Si, si bien sûr, mais en tant qu'Alpha, tu as des responsabilités, pas faciles à assumer tous les jours, je le sais, mais tu le fais avec tellement de sérieux que tu nous as tous surpris. Crois-moi ton comportement n'a échappé à personne.

Duncan commençait à sentir la moutarde qui lui montait au nez : non mais, qu'est-ce que cet interrogatoire veut dire, en tant qu'Alpha ; il n'a de comptes à rendre à personne !

- Ailis, tu sais ce que je fais aux fouineurs ? Je leur fais passer l'envie de recommencer ! Alors s'il te plaît arrête avec toutes tes questions et laisse-moi tranquille !

Ailis se met à avoir les larmes aux yeux, estomaquée par l'insensibilité de son frère par rapport à ses sentiments, aux sentiments de la meute, décide d'insister malgré la rebuffade :

- Duncan... Je t'en conjure, parle-moi ! Je n'aime pas te savoir comme ça, alors que je sais que quelque chose ne va pas. C'est la prophétie qui te tracasse ? Le fait de ne pas avoir de piste ?

C'est insupportable ; se sentir piégé, même chez soi, cela ne peut plus durer se dit Duncan.

- Ailis, sors d'ici !

- Duncan...

- J'ai dit : DEHORS !!!!!!

Pour appuyer son propos, et au moment où Ailis finit par tourner les talons, il empoigne une des commodes se trouvant à proximité et la balance rageusement sur la porte de ses appartements !

Epuisé, Duncan finit par s'assoir sur son lit et réfléchit, pendant que son loup tourne en rond dans sa tête : il faut qu'il revoie Adena, sinon la prochaine fois, ce sera son armoire !

Quelque part en Egypte...

Adena était hébétée. On l'a sommée de venir ici, sous terre, là où tout a commencé... Que de souvenirs dans ce sinistre endroit. C'est ici qu'elle l'a rencontré. Son tourmenteur. Son pire cauchemar.

J'aurais vraiment dû en finir avant se dit-elle au comble du désespoir. Etre obligée de l'aider, c'est au-dessus de ses forces, et pourtant elle n'a pas le choix. Et le supplice continue : il lui a ordonné de rester pour le regarder. Elle aimerait fermer les yeux, mais c'est impossible. Séthi a toujours adoré se montrer en spectacle. En ce moment, il s'abreuve directement à la veine d'un humain plus mou qu'une poupée de chiffon.

- Alors, Adena, tu n'as pas envie de te joindre à moi pour ce splendide festin ?

- Non, merci Séthi, tu sais que je ne suis pas du genre à participer à tes beuveries.

- Décidément Adena, t'es vraiment coincée pour ton âge ! En 3000 ans, tu as vu bien pire, et fait bien pire que ça !

- Je te rappelle que c'est à cause de toi que je suis comme ça aujourd'hui !

Ayant fini de s'abreuver, Séthi lâche sans trop s'encombrer de l'humain, qui tombe mollement à terre.

- Ah, Adena, Adena, tu ne me pardonneras jamais, n'est-ce pas ?

- Oh, tu crois ? Tu m'as privé de mon existence en tant qu'humaine. J'avais une vie toute tracée, mais il a fallu que tu interviennes pour changer le cours de mon destin...

- Dois-je te rafraîchir la mémoire ? C'est toi qui m'as demandé de faire de toi ce que tu es !

- Tu m'as manipulée, tu as profité de la fascination que tu exerçais sur moi pour me transformer ! Mais ne t'en fais pas Séthi, je trouverai un moyen d'en finir une bonne fois pour toutes !

Séthi, dont le visage commence à devenir rouge de colère, se dirige à vitesse grand V vers Adena, enserre son cou avec ses mains :

- Jamais, Adena ! Jamais tu n'en auras fini avec moi ! En tant que ton créateur, tu dois m'obéir même si tu ne le veux pas ! Je t'interdis de te tuer, tu m'entends ! Je te l'interdis !

- Et donc qu'est-ce que tu vas faire ? M'enfermer ici ? Me surveiller ? Tu sais très bien que cela ne marche pas avec moi !

- Ah oui ? Et cet homme que tu as rencontré sur la plage ? Duncan, c'est ça ? Il en penserait quoi lui ?

- Comment...

- Mais voyons, ma chère, en tant que ton créateur, rien ne m'échappe ! Tu devrais savoir que je suis capable de lire dans tes pensées. Bien que tu me fâches beaucoup car tu ne me laisses pas entrer volontairement, je suis obligé de... forcer un peu le passage pour en savoir plus.

- Laisse Duncan en dehors de tout ça !

Séthi finit par sortir les griffes, et les enfoncer dans le cou d'Adena, qui se met à saigner :

- Tss, tss, ma jolie, tu sais que tu ne peux pas me donner d'ordre, mais moi si ! En tant que créateur, je t'ordonne de séduire Duncan de Chânais, et de me le ramener ici, pour que je puisse m'abreuver de son sang ! Après ça, tu ne pourras plus rien me refuser.

- C'est ce que l'on verra !

- Toujours aussi obstinée à ce que je vois, hein ? Ce n'est pas grave, tu te rendras compte que la bataille est perdue d'avance quand tu me ramèneras son corps. Mais en attendant, il va te falloir une bonne leçon...

Avec un sourire de dément, il fait signe à quelqu'un, un de ses esclaves sans doute, de venir. Dans ses mains se tient l'une des plus grandes faiblesses pour un vampire : une chaîne en argent. L'esclave s'empresse de poser tout autour du cou l'une des chaînes, puis lui enserre les poignets avec une autre. Adena finit par tomber à genoux, ployant sous le supplice. Sa peau se met à fumer, les chairs commencent à être à vif et la soif de sang se fait déjà sentir.

- Rira bien qui rira le dernier, Adena. Rira bien qui rira le dernier...

Les amants contrariésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant