28. Un Voyage Dangereux. Partie 1

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PDV Clarke

Avant, mon père me disait souvent que j'avais les yeux bleus de l'océan. J'ai souvent rêvé que nous y allions ensembles pour le vérifier. Non pas que je mette sa parole en doute.

C'est un brin nostalgique que j'avançais au même rythme que tous les autres. Je pense souvent à ce que j'aurai voulu qu'on fasse s'il était toujours vivant, comme par exemple voir l'océan. Mais la compagnie des 100 est toute aussi importante à mes yeux.

Mon père est toujours là, quelque part dans mon cœur. Il veille sur nous, je le sens. J'ai déjà envisagé d'essayer à nouveau les noix hallucinogènes pour le revoir, j'en ai finalement conclu que je ne devais pas prendre de risques.

C'était la pause, tout le monde se reposait un peu pendant que je remplissais ma gourde d'eau fraîche.

Les ondes traversent l'eau, des visages aussi. Ceux de Wells et moi, enfants, bras dessus bras dessous en chantant en coeur la chanson de l'unité. Insouciants, mais pas trop non plus. Nos parents autour de nous, unis, souriants, semblant fière de nous.

Ça me paraît être une autre époque. Elle me manque parfois, juste quelques instants. Je ne peux pas oublier qu'avant d'être une grande prison, l'arche était ma première maison.

"C'est bizarre, non ? Avant quand tout était silencieux, ce n'était jamais bon signe."

Je pinçais mes lèvres au son de la voix de Jasper, elle avait désormais perdue tout son ton enfantin.

"Je détestais le silence avant, maintenant c'est mon meilleur ami." Poursuit-il en s'adossant à l'arbre près de moi.

C'est la première fois depuis longtemps que ses propos n'étaient pas virulents envers moi.

"Il a été le mien pendant longtemps aussi. Mais à force, la solitude est pesante."

Il ne répondait plus rien. Finalement je préférais lorsqu'il m'ignorait, parce que je n'avais pas à voir cette ombre qu'il était devenu par ma faute.

"Jasper-"

"Non. Clarke." M'arrête-t-il alors que je m'apprêtais à m'excuser, encore et encore. J'ai l'impression de ne faire que ça, comme si ça allait changer quelque chose, comme si c'était suffisant.

"C'est toi qui avait raison l'autre soir. Tu avais tout compris là-bas, mais j'ai fait la sourde oreille, je t'ai tourné le dos. Et si je ne l'avais pas fait, tout aurait pu être différent. Mais nous avons tous fait nos choix, et ils ont tous eu leurs conséquences. On ne pourra rien y changer, c'est ce que je déteste le plus. Ne pas avoir une deuxième chance... pour faire les choses différemment."

"Moi aussi, j'aimerais pouvoir tout recommencer."

Une bourrasque de vent siffla dans mes cheveux. Je resserrais instinctivement les pans de ma veste.

"Mais c'est impossible. Je n'avais pas le droit de rejeter la faute sur toi, seulement j'avais tellement besoin de quelqu'un à haïr, de quelqu'un de coupable qui porte la culpabilité. Pour que je n'ai pas à le faire."

J'écarquillais les yeux, surprise. C'était ce que j'avais dit à Bellamy ce jour-là.

"J'ai pas été l'ami que j'aurai dû être. C'est moi qui suis désolé. Je suis vraiment vraiment désolé, Clarke..." Avoue-t-il avant d'éclater en sanglots.

C'était dans un instinct vieux comme le monde. Un instinct de protection qui m'a poussé à prendre Jasper dans mes bras, sans me soucier de s'il me rejèterait.

Il enfouit sa tête au creux de mon cou, comme un enfant ayant besoin de réconfort.

"Moi aussi, je suis tellement désolé..." soufflais-je à mon tour.

Pour la première fois depuis cette catastrophe. J'avais envie de pleurer, d'extérioriser. Pour tout ce que j'avais fait, pour ce que j'avais perdu. Pour l'avoir détruit aussi.

Ça faisait du bien de retrouver les bras de cet ami qui m'avait tant manqué.

"Je prendrai volontiers ta douleur et te l'épargner. Je sais qu'elle est profonde. Mais je sais qu'un jour... un jour tout ira mieux. Tu verras."

Nous ne sommes pas restés très longtemps dans cette position. Je savais qu'il avait encore besoin de temps, mais je savais qu'il verrait un jour la lumière au bout du tunnel sombre qu'il traversait.

"C'est bon de te retrouver." Chuchote-t-il en essayant d'adopter le ton taquin qu'il possédait autrefois.

"Tu ne m'as jamais perdu."

Je le sentais... un jour Jasper arriverait à se reconstruire.

-

Les étoiles scintillaient mais l'astre lunaire nous éclairait encore. Après avoir déplié mon sac de couchage, je m'adossais au tronc et restais debout une couverture autour de moi, pour admirer les constellations.

Dire qu'avant je vivais dedans, là-haut.

Les jeunes dormaient, épuisés par cette deuxième journée qui se finissait.

La fatigue commençait à s'introduire dans mon corps aussi vite qu'un poison se répandait. Je me sentais épuisée, cette journée avait été très forte émotionnellement.

Aussi doux qu'un souffle, des lèvres m'effleurèrent avec légèreté. Je ne les connaissais que trop bien maintenant.
J'aurai pu dessiner leurs contours les yeux fermés, reconnaître l'odeur de menthe citronné de sa bouche.

Sans ouvrir les yeux, je participais à l'échange en soupirant au fond de sa gorge. Je sentais son sourire s'étirer, il était toujours très fier d'être à l'origine de toutes ces réactions qu'il provoquait en moi, des bruits à la fois indécents et innocents.

Décidant d'être moins douce, je le tirais par la nuque et lui mordillais délicatement la lèvre. Ce fut à lui de lâcher un gémissement plaintif.

C'était dent pour dent.

Nous mettions fin à ce baiser en même temps, il m'entourait déjà la taille de ses deux bras, comme si il ne comptait jamais me lâcher. Ce que je voudrais qu'il ne fasse jamais.

Son sourire reflétait le mien. Il effleura mon nez avec le sien, puis dessinant un chemin jusqu'à ma joue en déposant un baiser dessus.

Il avait quelque chose ce soir, quelque chose de différent.

"Il y a un truc que je dois te dire."

J'opinais avec la tête car aucun mot ne voulait sortir de ma bouche. Il prit une grande inspiration comme si que qu'il allait me confesser déterminerait tout. Il encadra mes joues et ses yeux marrons s'accrochèrent aux miens, comme s'ils étaient fait pour se connecter. Comme la liaison covalente entre deux atomes. Nous étions reliés.

"Je vais faire on ne peut plus simple. Clarke, je..."

Nous n'étions plus debout, je n'entendais plus sa voix mais un vacarme assourdissant, l'odeur de menthe était remplacée par celle du sol terreux. Je ne voyais plus rien, je ne sentais plus rien.

Tout était noir. Comme l'enfer. Je crois que j'y étais. Je devais y avoir ma place.

The Princess And The Rebel Où les histoires vivent. Découvrez maintenant