Pour croire en ses rêves,
il faut d'abord croire en soi.Inconnu
Maintenant, 1 mois avant ...
La première chose que j'ai vu à mon réveil c'est le mur blanc. La première chose à laquelle j'ai pensé fut "je suis vivante". Et la première chose que j'ai faite fut de me débattre comme une folle, en tentant d'arracher mes perfusions. Tout ce que je voulais, c'est qu'on me renvoie dans le trou noir d'où je venais et qu'on m'embrouille l'esprit avec des médicaments. Je ne voulais pas affronter la réalité, je ne pouvais pas accepter d'être encore en vie. Je fus récompensée et renvoyée dans le néant. Le seul problème c'est que l'on ne peut pas rester dans cet état indéfiniment. Et, même si à chaque fois je piquais une crise en me réveillant, les infirmières ont fini par comprendre et à me laisser souffrir sans intervenir. Chaque seconde de chaque minute m'était devenu insupportable. Je n'avais toujours pas décrocher un mot et fixais continuellement le mur, comme s'il pouvait s'ouvrir en deux et m'amener à ma délivrance. Les effets du manque étaient terribles mais je ne bronchais pas. J'étais devenue tellement stoïque que les médecins ont commencé à s'inquiéter, et voyant que je refusais de manger, m'ont piquer de nouveau pour installer une énième perfusion visant à m'alimenter.
J'ai pu rester léthargique ainsi durant une semaine. Jusqu'à l'arriver de cet homme, indirectement responsable et pourtant tellement coupable. Mon père. A son arrivée, impossible de ne pas tiquer. Ma bouche s'est ouverte d'elle même et j'ai failli dire quelque chose, mais me suis retenue à temps. Tout cela paraissait tellement surréaliste qu'un instant je me suis crue entrain de rêver. Seulement il était bel et bien réel. J'ai refermé ma bouche et scellé mes lèvres en les pinçant très fort, l'une contre l'autre. Il s'est approché lentement de moi, une main tendue devant lui, comme on le ferait avec un animal pour l'amadouer. Mon corps était devenue aussi lourd que la pierre et aussi tendue qu'un arc, seuls mes yeux suivaient le moindre de ses faits et gestes. Il n'avait pas changé, seulement quelques rides étaient apparus sur son front et au dessus de sa lèvre inférieur. Il avait aussi coupé court ses cheveux, lorsqu'il était parti il les avait long et les portait en queue de cheval basse. Je retrouvais l'homme de mes souvenirs, comme avant. Ses câlins, ses attentions, ses histoires, sa voix me manquait. Il m'avait tellement manqué. Peut-être allait-il me sourire à nouveau et me faire une blague sur mon état, comme quand j'étais petite. Mais tout ceci n'était qu'un leurre. Je n'était plus la gamine de six ans qui attend son père tous les soirs, en espérant le voir apparaître. Non. Il m'avait abandonné, il avait lâché prise et pris la fuite. Mon père n'est plus le héros auquel je croyais enfant, désormais quand je le regarde je n'éprouve que du mépris à son égard et ne vois plus qu'un lâche, égoïste de surcroit.
Perdue dans mes souvenirs je n'avais pas vue qu'il était à présent debout face à moi. D'une main il s'accrochait au pied du lit et de l'autre il cachait sa bouche. Des larmes remplissaient ses yeux, il paraissait triste et en colère. Et c'est là, face à cet homme que je n'avais plus vue depuis presque quatre ans, que mes sentiments m'ont rattrapé et chamboulé. De quel droit se permettait-il de revenir après autant de temps et prétendre être triste ou bien même en colère ? La seule personne pouvant être en colère et pleurer, ici, c'était moi. Il dû lire mon expression car il se reprit, respira un grand coup et prit la parole :
- Léonie ... Ma petite fille, ma chérie ... Mais qu'as tu fait ?
Je le fixais sans réagir. Je m'attendais à cela. Par contre, ce àquoi je ne m'attendais pas, fut la suite.
- Mais qu'est ce qu'il t'est passé par la tête ? Pourquoi avoir voulu mettre fin à tes jours ? Est-ce parce que je suis partie ? Tu voulais me le faire payer ? Te venger ? Si c'est le cas je ne te comprend pas, tout ceci ne sont que des histoires entre adulte et ça ne te concerne pas ! Est-ce que tu as vu ton frère boire et essayer de se suicider ?! Non, il a compris qu'il n'était pas concerné. Mais toi, toi ... Égoïste jusqu'au bout ! Au moment d'avaler les médicaments as-tu seulement pensé à ta mère ou ton frère ? hurlait-il.
Je portais les mains à mes oreilles de façon à obstruer la moindre de ses paroles. Avant de fermer les yeux, j'eu le temps de le voir lever les yeux au ciel. Une colère immense s'empara de moi et, comme dans un film, je me sentis détacher de mon corps. Je pouvais voir la scène comme de l'extérieur. Je vis une fille brisée et complètement folle face à l'homme de ses cauchemars. Je sentis alors quelque chose gronder et monter en moi, telle une avalanche, ceci engloutit tout sur son passage et je ne voyais plus rien d'autre que ma douleur et ma colère. Mon torse se mit à trembler et un cri, d'abord étranglé puis plus vibrant, s'échappa de mes lèvres que j'avais pourtant cru bien scellées. C'est à cet instant que je fus comme réaspirer à l'intérieur de moi. Je sentais toute la force de ce cri, toute sa puissance et tout son ressenti. Comme si ma peine prenait une forme quelconque et qu'elle se libérait enfin. Je me sentais être une autre à l'intérieur. Comme si toute cette peine accumulée ne pouvait venir de moi.
J'ai fini par cesser de hurler. Brusquement, sans signe avant coureur. Comme ça, tout simplement. J'étais vidée. Il ne me restait rien, rien à quoi me raccrocher. Je fis alors la seule chose possible qu'il me restait à faire : pleurer. Sans aucune retenue, j'ai laissé s'échapper toute les larmes que mon corps contenait depuis plusieurs années. Je n'avais plus de conscience propre, j'étais une autre. Une autre près du gouffre, ayant déjà un pied dans les limbes. Mon corps entier tremblait de rage et de fatigue.
Lorsque tous mes états d'âmes furent passés, je me rendis compte que mon père avait quitté la pièce. À ce moment là, je rendis le dernier souffle de vie qu'il me restait à l'intérieur et je commençais à divaguer. Comme c'était bon d'être vide, presque morte. J'étais tellement fatiguée, je ne voulais qu'une seule chose désormais. Dormir. Je fis tout ce que je pus pour appeler une infirmière mais mes efforts restèrent sans réponses. Plusieurs minutes, qui me parurent être une éternité, passèrent avant qu'un infirmier de garde ne passe la tête dans ma chambre. Peut-être que ma douleur était visible sur mon visage, ou alors avait-il un pressentiment, toujours est-il qu'il se glissa discrètement jusqu'à ma perfusion et appuya sur un bouton. Je sentis une ivresse légère m'envelopper, j'avais l'impression qu'un nuage se développait autour de moi comme pour me protéger. Mes paupières étaient lourdes et je ne resista pas pour les fermer. Juste avant de sombrer dans l'inconscience, j'entendis l'infirmier me glisser quelques mots à l'oreille :
- Peu importe les souffrances que tu endureras dans la vie, jamais tu n'arriveras à te relever si à chaque fois tu restes assise là où tu es tombée...
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Les Mots de mon Silence
Teen Fiction« Parce que le silence est la seule arme capable d'affronter et de battre les mots » Je n'ai pas toujours été au fond du trou. Je n'ai pas toujours été une droguée, alcoolique de surcroît. Non, avant tout ça, j'étais une fille normale qui n'avait...