Un passé toujours un peu présent...

222 35 15
                                    


Sur ces mots elle descendit les sièges et lui dit qu'il pouvait enfin ouvrir les yeux. Il l'a regarda un instant avant de lui demander si il n'était pas temps d'y aller. Elle lui répondit d'y aller tout seul, mais têtu comme il est il l'a prit puis la porta jusqu'à la salle à manger.

Il n'y avait aucune assiette pour elle. 

Elle alla saluer les parents du garçon puis s'assit à table. Sa mère lui posa un couvert et la regarda avec, sur son visage, un sourire montrant qu'elle était fière de sa fille. Dès que les plats furent posés sur la table, elle regarda son père les larmes aux yeux. Elle recula sa chaise, et demanda aux invités de l'excuser. Puis elle parti dans sa chambre, s'enferma à clef et laissa ses larmes ruisseler le long de son visage. Elle se recroquevilla dans un coin de sa chambre et pleura. Elle pleura comme il lui arrivait de pleurer lorsqu'elle revenait de son école.

 Son père sortit de table puis se dirigea vers la cuisine. Il prit la clef qui était posé sur le rebord du réfrigérateur puis alla en direction de la chambre de sa fille. Il ouvrit la porte, puis la referma comme pour laisser la tristesse enfermée, comme pour la faire mourir de l'intérieur. Une fois cela fait il  prit sa fille dans ses bras, il ferma ses yeux et sentant la peine l'envahir laissa échapper une larme. De là il la serra encore plus fort contre lui, c'était en quelques sortes sa façon de lui exprimer son amour.

Une fois calmée il l'a regarda droit dans les yeux, aucun bruit ne se faisait entendre. Et pourtant un dialogue silencieux s'était créé. Un dialogue dans lequel un père et sa fille se disaient qu'ils s'aiment, que la souffrance était finie, et qu'il était temps de prêter attention uniquement aux personnes qui l'aiment. Ils se dirent une dernière fois qu'ils s'aimaient dans un regard rassurant puis son père lui proposa d'aller prendre un bain.Elle accepta volontiers. Il reprit la clef puis sortit de la chambre sans oublier de verrouiller celle -ci.

Elle monta les marches en bois, alluma la musique au maximum, ouvrit la porte de son placard, fit rouler la barre où était accroché ses vêtements puis ouvrit la porte qui se trouvait derrière. La lumière s'allumait, elle était douce comme la musique qu'elle écoutait. Elle alluma l'eau, les violons masquaient le bruit du bain qui se remplissait. Lorsqu'elle enlevait ses vêtements elle dansait telle une poupée de boite à musique. Une fois dénudée elle entra dans son bain, puis éteint l'eau. 

Elle n'eut pas de mal à rentrer malgré la chaleur de l'eau, comme si son mal intérieur prenait le dessus sur le mal physique. Sa peau ne mit pas beaucoup de temps à se friper. Elle regardait ses mains frêles, puis elle vit ses poignets. Une larme vint la réconforter, n'hésitant pas à s'évader dans la douceur de son cou. Elle avait envie d'hurler sa rage, il fallait qu'elle sorte sa peine. Elle plongea tout son corps dans cette eau qui avait eu le temps de se refroidir, devenant maintenant supportable. Et elle se mit à crier, elle criait de toutes ses forces, n'essayant plus de ménager sa voix. Elle avait fait un choix entre ses cordes vocales et sa tristesse. Une fois ses poumons vidés de leur air, et son corps vidé de sa haine elle décida de se laver à vitesse grand« V » puis sortit de son bain. 

Elle enfila un peignoir puis choisit une belle robe bleu marine. C'était la dernière robe qui lui allait un minimum. Elle vida son bain, éteignit la lumière puis descendit les marches avec un sourire plus vrai que jamais. Elle coupa la musique qui jouait « cosi fan tutte » de Mozart.

Elle ouvrit la porte et entra dans la salle, tout en s'excusant une seconde fois d'avoir quitté la table. Ils la regardaient tous avec un minable sourire forcé sur le visage. Lorsqu'elle les vit elle leurs dit qu'il n'était plus temps de parler du passé, et que malgré que ses parents avaient dit à des inconnus qu'elle avait été harcelée, intimidée et frappée il fallait passer à autre chose. Elle se servit une infime part du rôtit qu'avait préparé sa mère, ce qui était déjà un grand pas. Elle essayait, le bout de viande dans son assiette la dégoûtait à un point que l'on ne pouvait pas imaginer mais elle se forçait à manger. Elle en découpa un petit bout, le piqua avec sa fourchette puis l'apporta à sa bouche, mais même si elle avait une force incroyable elle ne pouvait pas. Elle déposa alors le bout dans son assiette puis fit un grand sourire.

Elle sortit de table pour aller avaler ses médicaments, puis revint quelques minutes après, armé du même sourire. 

Ils finirent le repas tous les six, ils riaient sincèrement. Vers les onze heures les invités rentrèrent chez eux, et elle partit se coucher.  


Apprends moi à vivre. Apprends moi à voler.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant