Chapitre 4

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J'étouffais.

Était-ce mon subconscient qui ressentait les événements où était-je arrivée à terme de ce test ? Suis-je dans ma tombe ? Où sont les anges de la mort ? Les questions hantaient mon esprit plus vivement que mes blessures. A vrai dire, j'avais oublié mon corps, quoi ? Des hématomes ? Des ecchymoses ? Peu importait, j'étais impatiente de rencontrer Dieu et tout lui raconter.

Mais je n'étais pas morte. Mon cœur battait toujours, mais irrégulièrement. Je portais avec difficulté ma main à ma bouche et je sentis mon souffle chaud et faible. J'étais faible, c'est le mot. Parfois même les plus forts abandonnent, même les plus justes jettent leur sabre à terre, même les fiers posent leur tête sur le sol et invoquent Allah. Et j'étais dans cette situation d'effroi. J'étais faible, et j'avais terriblement honte, honte de mon témoignage, d'avoir menti sur mes capacités et de ne pas savoir encaisser. J'ignorais l'heure qu'il était. Peut-être l'appel à la prière de l'Aube avait retentit, peut-être nous étions un autre jour, les questions turlupinent mon esprit fébrile.

Une force ahurissante me projeta au sol, j'ai senti tous mes os se briser un par un. Anéantie, je tente tant bien que mal de trouver une sortie d'air mais une autre secousse monumentale me sortie hors d'un sac noir et mon crâne émit un bruit sourd, que seule moi entendait. Mes yeux n'arrivaient pas à s'ouvrir, un halo aveuglant m'éblouissait et je sentis comme des croûtes qui les empêchaient de s'ouvrir.

-Debout vermine ! Lève-toi sale carcasse !

Cette voix m'était familière puisque je venais de me rendre compte que j'avais oublier mon bourreau. Je n'avais pas force de me lever alors je me suis tenue au mur, assise. Mon coccyx était douloureux, je ne me tenais même pas droite.

-Tu faisais quoi dehors ? Hein? T'as une arme c'est ça ? Où se cache ta pu**** de famille hein ?

Les questions fusaient à tout va, mon esprit entremêlé avait du mal à remettre l'ordre des actions en place, j'ai soupiré, j'avais mal.

- Réponds sale traînée ! Je n'ai pas de temps à accorder aux arabes ! Bande de sales arabes ! Putain de muslims qu'on va exterminer tous un par un au nom de David !

Il embrassa l'étoile de David qu'il portait autour du coup. J'ai grimacé, j'étais dégoûtée. Était-ce sa religion là, qui prônait cette paix ? Était-ce cette terreur qu'il imposait qui rendait fier son ancêtre ? David était-il comme ça ?

Son sourire narquois me narguait et alimenta ma haine davantage. Je sentais la force revenir, la haine, mon moteur de courage et de représailles allait nourrir ma vengeance.

- Je suis allée apporter un plat chaud chez la voisine de ma tante. Si j'apprends que vous avez fait du mal à ma famille, vous m'entendrez. Vous entendrez le bureau juridictionnel de Gaza.

J'ai senti la rage briller dans ses yeux, les airelles de son nez étaient devenues rouges. Il frappa un coup sur son bureau et aboya :

- Ferme ta gueule ! Sale chienne ! Tu n'es qu'une chienne, petite pu**** !

Il saisit la première chose qu'il avait sous la main - une lampe- qu'il balança de toutes ses forces à mon encontre. J'étais sonnée.

La salle était plongée dans un étrange mutisme, le soldat était adossé contre un fauteuil au coin de la pièce et j'étais allongée au coin du mur, me réchauffant avec mon tchador. Il avait un parfum doux et boisé à la fois, il a l'odeur des plats de mansaf que me préparait ma mère, et les larmes me montèrent aux yeux.

FLASH BACK

-Maman maman, regarde ce que j'ai récolté, regarde !

-Qu'est-ce que c'est Qamara, tu peux me dire ?

-De l'aneth, des blettes et du sumac, maman !

-Et qu'est-ce qu'on prépare avec de l'aneth, des blettes et du sumac, Qamara ?

- Du sumaghiyyeh maman ! Ai-je juste ?

-Oui tu as raison ma fille. Rejoins-moi dans la cuisine nous allons préparer ça pour ton père, il doit être très fatigué en rentrant de la montagne".

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Ma mère me manquait, mon père me manquait, ma famille me manquait inlassablement et j'étais très inquiète et Dieu Seul sait ce qui peut leur arriver, à quel endroit peut-elle être.

Mon ventre gargouillait, j'étais tellement affamée. Mes boyaux hurlaient la famine ce qui réveilla le bourreau de son sommeil.

Trêve de paix.


Qamara from RamallahOù les histoires vivent. Découvrez maintenant