Décadence

Chapitre trois

Sa respiration se bloqua violement. Elle eu la pensée un peu futile que tout était brusque ou violent depuis son réveil. Elle avait l'impression que la sentence venait de tomber et qu'elle était une criminelle. Ce terme ramena Luce à la vie. Elle n'était pas une criminelle. Et puis ce n'était que le début de l'enfer.

« - Deux autres personnes sont décédées depuis le commencement ! Congratulations ! Vous n'êtes plus que cent dix sept ! Le premier défi est plutôt simple : trouvez et rentrez dans la chambre de la comtesse, et le tour est joué ! »

Ce premier défi n'avait vraiment rien de simple contrairement à ce qu'affirmait la voix. Luce et Holda avaient déjà réussi à se perdre et pourtant elles s'étaient cantonnées au premier étage.

« - Le nombre de places est limitées au nombre de personnes pouvant entrer dans la chambre, alors atención ! Rendez-vous au cœur du château ! »

Les deux femmes restèrent en suspension, le pied entre deux marches, en attendant de nouvelles directives mais la voix semblait en avoir terminé.

« - Ça y est, tonna durement la voix d'Holda pour couvrir les cris horrifiés des enfants plus bas. On commence.

- Mmmh. Allons-y. »

Luce était vidée moralement, complètement hors-service, mais l'inquiétude la poussait à avancer. Le sort réservé aux personnes ne pouvant pas entrer dans la chambre de la comtesse n'avait pas été précisé mais Luce n'était pas dupe : le garçon décédé sur ce même escalier servirait d'exemple pour tous les autres. Elles devaient se dépêcher.

Elles marchèrent une bonne heure en silence avant que la plus vieille ne commence à se plaindre de ses pieds pleins d'ampoules. Luce l'ignorait royalement tout en gardant discrètement un œil sur elle. Si elle devait se retrouver seule, le désespoir finirait assurément par avoir raison de sa volonté à survivre et s'il y avait bien une chose qu'elle devait conserver, c'était bien cette volonté. De plus, elle l'aimait bien cette vieille femme grincheuse et sénile.

La voix avait parlé du cœur du château, mais l'indication était vraiment vague. Sans plan du château, rien n'était réalisable. Pour trouver le milieu de quelque chose, il fallait bien connaitre la forme générale pour se guider, non ? Et puis ce château était énorme !

« - Katherine ? Appela Holda. Katherine ?

Luce n'était pas encore habitué à ce qu'on l'appelle ainsi, elle devrait travailler ça se promit-elle.

- On est déjà passé par là.

- Vous êtes sur ? Je n'ai rien remarqué pourtant.

- Tu m'étonnes, gamine. Tu penses tellement fort que tu ne vois plus rien. Cette lampe ne te dit rien là-bas ?

Luce la regarda attentivement mais resta perplexe sur l'affirmation de la grand-mère.

- Rien du tout.

- Alors arrête de réfléchir et observe. Quelque chose ne va pas. On a croisé qu'une dizaine de personne depuis que nous cherchons et nous sommes cent dix sept en tout, n'est-ce pas ? On aurait du croiser beaucoup plus de monde.

La plus jeune était impressionnée par les déductions de son aînée. Ce n'était pas du génie, juste de l'observation et Luce réalisa qu'elle devait être plus calme et méthodique.

- Continuons, proposa Luce. On trouvera peut-être d'autres anomalies. »

Les murs du château étaient vraiment fais étrangement. Où du moins les goûts de la personne qui l'avait décoré à l'époque n'étaient plus d'actualité. La tapisserie rouge carmin était franchement de mauvais augure et accrochait la poussière comme un tube à colle, les mouches. Les chandeliers de verres au plafond étaient eux aussi inquiétant. Ils bougeaient dans un rythme lent et acrobatique causé par on ne savait quelle secousse, menaçant de s'écraser n'importe quand sur n'importe quelle tête. Le pire aux yeux de Luce était l'odeur infecte de moisi qui lui irritait les narines et l'œsophage. Elle s'insinuait dans sa tête et lui donnait des vertiges et la nausée. Le plafond était plus bas à quelques endroits et renforçait son malaise. Quand y aurait-il enfin une fenêtre ?