Chap. 1 - Berlin, mon amour...

64 3 0
                                    



1939. L'Allemagne subit une pression de plus en plus importe de la part du NSDAP, le Parti National-socialiste des Travailleurs Allemands, plus connu sous le nom de parti Nazi. Adolf Hitler a pris le pouvoir depuis 9 ans maintenant, et les persécutions de Juifs n'ont de cesse d'augmenter.

Je m'appelle Raphaëlle Görring, j'ai 21 ans, de naissance allemande mais de religion juive. Je réside dans un quartier bien connu de la ville, non loin de la Postdamer Platz, dans l'Albrecht Straße. Ma famille y tient une petite épicerie de quartier, qui pour le moment échappe aux destructions allemandes. Sûrement parce qu'elle est l'une des rares épiceries à rester ouverte une journée entière, à toujours satisfaire ses clients, et à offrir un aimable accueil. Mais Dieu sait combien de temps cette paix durera...

Je travaille dans un café, au coin de la Postdamer Platz. Un restaurant simple mais très reconnu sur la ville, Le Postdam', avec sa cuisine de pays et son décor authentique. Mon patron, Robert Van Drischt, est un homme de poigne, mais surtout un homme de cœur. Aucun client ne sait que je suis juive. Ils me considèrent tous comme l'une des leurs, une pure souche. Rien dans mon physique ne peut éveiller les soupçons, ni même mes vêtements. Ceci, je le dois à ma très chère Gretta Friedrisch. Gretta est la seule et unique amie que j'ai toujours eue. Une jeune femme charmante, du même âge que moi, à la seule différence près qu'elle est purement allemande. Sa mère gère un grand hôtel de la Postdamer Platz, et son père est l'un des conseillers d'Adolf Hitler. Et moi, je suis la meilleure amie de leur fille, moi, la juive, cachée sous ses airs de jolie fille et ses vêtements chics. Ne m'en déplaise, je préfère être une juive cachée que détestée. Ma vie me convient parfaitement, bien que j'aurais aimé que ma famille en fasse de même. Je suis condamnée à jouir d'une vie fabuleuse le jour, et d'une vie de voleuse la nuit. Mais je respecte le choix de mes parents. Ils sont ce qu'ils sont et ne se cachent de rien. Moi, j'essaye juste de fuir ce que je suis pour me faire une place parmi les grands.

Aujourd'hui, le restaurant est calme. Les grosses poutres de bois qui maintiennent et décorent la bâtisse brillent sous la lumière du soir, et une légère fumée embrume la salle. Je suis debout, là, au comptoir, à essuyer des verres. La fin de journée approche, et les derniers clients savourent le calme de cette soirée d'hiver. Nous sommes en Novembre, il fait frais, mais le soleil n'a cessé de briller toute la journée. Un léger givre s'était installé au matin, et n'a quitté les pavés de la rue que pour quelques instants. Des flocons sont apparus, de-ci, de-là. La journée avait été tout ce qu'il y a de plus calme : peu de clients, des habitués, qui avaient passé leur temps assis, à fumer, lire et discuter. Un léger courant d'air envahit la salle, et la clochette de la porte retentit dans un cliquetis cristallin. Je lève la tête vers l'entrée, pour voir qui vient de franchir le pas de la porte. Une jeune femme blonde aux cheveux bouclés s'avance dans la pièce d'un pas assuré. Elle porte une veste bleu ciel, dont le col est couvert d'une fourrure crème. Ses gants beiges s'assortissent parfaitement à la couleur de sa robe, dont le jupon tombe jusqu'à mi-mollet. De petits escarpins cirés claquent sur le carrelage du restaurant, rythmant les pas de la demoiselle. Elle s'avance jusqu'au bar en bois derrière lequel je me tiens, et me fait un sourire radieux. Sur le comptoir, elle pose un journal, la une contre le bois, je suppose celui du jour.

- Je suis sûre que tu n'en croiras pas tes oreilles !

La jeune fille, c'est Gretta, ma meilleure amie. Elle est toujours rayonnante de bonheur, et encore plus lorsqu'elle a une nouvelle à annoncer. Elle a pour habitude d'avoir tout ce qu'elle veut, et m'embarque toujours dans ses histoires. C'est loin d'être déplaisant, au contraire. J'ai l'impression de prendre de l'importance à ses côtés.

Je la regarde sans trop comprendre ce qu'elle vient faire ici. Elle ôte gants et veste avant de prendre un siège et de me regarder fixement.

- Allez, dis-moi ce que tu as à dire, de toute façon, tu ne tiendras plus longtemps !

A l'ombre de ses plumesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant