Chap. 5 - Bal blanc et teintes de rouge.

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Je sens du mouvement à côté de moi. Un bruit de porte, suivi de pas. Une porte s'ouvre, le parquet grince. Je plisse les yeux. Je ne veux pas me réveiller, je suis si bien, là, à ne penser à rien. J'imagine juste la neige tomber sans fin, et effacer Berlin, effaçant le monde. Une main froide m'agrippe le bras et me secoue, et on fait de même non loin de moi, je sens le lit bouger. Un mouvement à ma droite, quelqu'un se lève. J'ouvre les yeux, regarde le plafond, entends juste un « Il est déjà 18 h passé, et vous n'êtes pas du tout prêtes ! ». Je me lève en sursaut, me retrouve assise nez à nez avec Gretta. Machinalement, ou instinctivement, nous nous étions regardés mutuellement. Elle avait une tête de six pieds de long, ses cheveux blonds virevoltaient partout au-dessus de sa tête, et ses yeux étaient rouges de fatigue. Je devais probablement avoir cette même tête... Mais mon amie eu plus vite fait de réagir. Elle se lève dans un élan de stress et de surprise, et range à toute vitesse les robes inutiles, ne laissant que sa jolie robe crème et la belle rouge. Dans sa panique, elle descend les marches quatre à quatre, et disparaît dans l'appartement.

Je suis toujours là, assise. J'ai du mal à émerger. Je tourne la tête vers la fenêtre. La neige a cessé. La nuit a commencé à recouvrir doucement la ville d'un voile sombre. Un bruit me sort de ma rêverie : Gretta vient de m'appeler, ou plutôt de hurler mon nom dans la cage d'escalier. Je me lève, tant bien que mal, et entreprends de descendre à mon tour. Conrad est assis sur le canapé, fumant un cigare en lisant le journal. Astrid était descendue avec moi, et partit s'installer à côté de son mari. Je les regarde avant de me rendre compte que j'étais à deux doigts de me prendre le mur. Retrouvant mes esprits, je me dirige vers la salle de bain, où Gretta était déjà coiffée et maquillée. Je n'ai même pas le temps de me rendre compte que quoique ce soit qu'elle m'avait déjà installé dans la pièce, et se mettait au travail. Ensommeillée, je n'ai aucune réaction. Aucune. Jusqu'à ce que j'ouvre les yeux.

— Ouah !

J'étais complètement béate, car une fois encore, Gretta m'épatait. J'étais transformée. Elle avait coiffé mes longs cheveux bruns en une tresse-épis longue et délicate. Mais c'était surtout le maquillage qui me surprenait. À la fois léger et glamour, il faisait ressortir une facette de ma personnalité que je ne connaissais pas. J'avais l'air d'une femme. Simplement.

— Ça te plait ?

— Plus que ça... Je ne me reconnais même pas !

Gretta avait un sourire jusqu'aux oreilles. C'est à cet instant que je la vis. Jusqu'à présent, je n'avais rien regardé à part le plan de travail et moi-même. Gretta était ravissante. Pendant un temps, je fus même déçue du travail qu'elle avait fait sur moi. Jalouse ? Peut-être. Mais il fallait l'admettre, Gretta était splendide. Elle avait rassemblait ses cheveux blonds en un chignon parfait, duquel ne sortaient aucune mèche de cheveux. Elle l'avait joliment décoré de fleurs bleues et blanches. Outre le fond de teint et le blush discret de son visage, elle avait déposé sur ses lèvres un rouge très prononcé, et rehaussé son regard d'un fard à paupières bleuté et d'un trait de crayon. Elle était plus que ravissante, et avait su parfaitement mettre en avant son côté femme. Elle rayonnait.

Astrid me tire de mon analyse. Elle entre dans la salle de bain et prend des nouvelles. Elle s'approche de sa fille et dépose un baiser sur son front. Elle nous invite à finir de nous préparer, l'heure avançait plus vite que prévu. Gretta et moi filons dans la chambre pour revêtir nos robes respectives, et redescendons l'escalier quatre à quatre. Dans le hall, un soldat nous attendait pour nous accompagner jusqu'à la salle. Je trouve ça assez ridicule, la réception se trouvant juste au rez-de-chaussée, dans la salle de cérémonie. Mais il semble qu'il fallait respecter les règles. Alors, respectons-les. Je prends ma veste, au porte manteau, au cas où nous aurions besoin de sortir. Gretta fait exactement la même chose, et notre garde du corps nous conduit jusqu'au hall d'entrée de l'hôtel. Il s'arrête là, tendant les bras pour prendre nos vestes. D'un léger sourire, il nous fait signe d'entrer.

A l'ombre de ses plumesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant