les mots que je n'ai jamais su te dire➳narry

hiver 0.1

25 décembre. Les flocons de l'hiver s'abattaient tranquillement sur Dublin, drapant la ville d'un épais manteau blanc. Cadeaux sous le bras, de nombreuses personnes rejoignaient leur famille afin de fêter Noël. Le trafic était fluide, contrairement à d'habitude, les rues se trouvaient pratiquement désertes et les commerçants fermaient boutique.

Niall marchait d'un pas souple et déterminé, ses yeux bleus fixant son ombre qui se mêlait à celles des lampadaires qui éclairaient sa route. Ses chaussures s'enfonçaient dans la neige, laissant derrière elles des traces de pas blanches. Le vent souffla un peu et il se sentit frissonner. Il aimait frissonner. Il aimait toutes ces choses qui le faisaient se sentir vivant. Depuis qu'Harry hibernait, les moindres détails semblaient importants à Niall. Le souffle du vent, le bruit de ses pas s'enfonçant dans la neige, le froid qui lui tenaillait les mains et le nez. Toutes ces petites choses qui nous faisaient sentir vivant.

La chaleur du hall de l'hôpital faisait partie de ces petites choses qui étaient tellement habituelles qu'elles en devenaient insignifiantes.

Le cœur battant, Niall pénétra dans la chambre d'Harry.

Il pénétra dans ce qu'il appelait « leur bulle ». « Bulle » était bien plus poétique que « chambre d'hôpital » à ses yeux. C'était une bulle de passion, de confidences. Une bulle qui brillait, qui resplendissait. Une bulle fragile qui menaçait d'exploser à tout moment.

« Yo la Belle au bois dormant ! le salua-t-il »

Il se débarrassa de son écharpe et de son manteau. Il s'approcha du lit mais ne s'installa pas sur l'inconfortable chaise en bois. C'était Noël. Il pouvait bien faire une exception. Il retira ses chaussures humides et s'allongea aux côtés d'Harry. Heureusement que le lit était assez large et que l'occupant n'était pas gros. En ricanant, Niall se tourna pour admirer le profil de son ami. Les yeux clos et la bouche entrouverte, il semblait réellement dormir. Si ce fichu tuyau ne se trouvait pas planté dans son cou pour lui rappeler cette tragédie, Niall se sentirait apaisé. En poussant un soupir, il posa la tête sur le torse de Harry, comme pour y rechercher du réconfort.

Rassuré par les battements du cœur d'Harry contre son oreille, Niall ferma les yeux.

« C'est Noël aujourd'hui, dit-il. Il neige sur Mullingar. J'aime la neige. Tu te souviens, l'année précédant ton accident ? Nous avions été à la patinoire avec Liam, Louis, Zayn et Sophia. Liam ne savait pas patiner et passait son temps à tomber et à se relever. Tout le monde se moquait de lui mais il s'en fichait. Il a même soupçonné Sophia d'avoir trafiqué ses patins. Sophia, en revanche, était gracieuse et se déplaçait sur la glace avec une élégance incomparable, ses cheveux bruns flottant au vent. Zayn apprenait à Louis comment patiner. C'était comique de voir notre ami, habituellement si classe, dans une situation aussi stupide. Il ressemblait à Bambi lorsqu'il fait ses premiers pas, tu sais, le dessin animé. Toi... toi, que tu tombes ou que tu voles sur la glace, tu étais toujours beau. Tu rayonnais tellement que tu aurais pu faire fondre la glace qui se trouvait sous tes pieds. Tu rayonnes toujours à mes yeux. Même au fond de ce lit blanc, même au milieu de cette chambre froide et noire, même vêtu de cette hideuse chemise de nuit, même avec un tuyau dans le cou... même là, tu rayonnes, Harry »

Il se tut. Il entendit le « bip » régulier de la machine reliée au tuyau. Il y avait bien trop de choses cruelles dans cette pièce pour lui permettre de rêver du passé. Leur « bulle » devenait vulnérable au fil du temps.

Finirait-elle par éclater, écrasée par le poids de cette réalité impitoyable ?

« Je suis tombé, reprit-il. Non, pire, je me suis étalé de tout mon long sur le sol dur et froid. Et toi, tu t'es marré. Tu as ris aux éclats, tes bras serrant ton ventre. J'ai relevé la tête et j'ai eu comme une absence. Je ne voyais et n'entendais que toi. Tu riais à en pleurer. Cet éclat de rire que tu as poussé a marqué ma vie. Je me suis dit à cet instant que je ferais tout pour t'entendre rire de cette manière et que tu n'aies plus jamais à pleurer »