Chapitre 10

1.8K 138 2
                                    

— Mademoiselle Clément !

Cette voix, j'en ai des frissons dans le dos. Cela fait trois jours que j'espère l'entendre.

Et ici, à Louxor...

Je me retourne.

Un regard émeraude me fixe, intensément. Je ne sais comment réagir, mais j'arrive quand même à glisser un « bonjour monsieur » d'une petite voix. Cela semble le surprendre, des étincelles s'allument dans ses yeux, mais je vois aussi apparaître sur son visage, de manière fugitive, comme un voile de tristesse.

— Vous êtes donc à Louxor ? s'enquiert Kassem, d'une voix inhabituelle, où le masque d'assurance se craquèle un peu.

J'essaye d'avoir une voix plus forte lorsque je lui réponds.

— Oui, comme c'était prévu.

Son regard quitte le mien pour observer les alentours.

— Vos amis ne sont pas avec vous ? me questionne-t-il.

— Si, ils ne devraient pas tarder à me rejoindre. Ils font quelques emplettes dans la boutique.

— Ah, je vois. Je me permets de vous présenter mon cousin Djalil Ben Hamansin.

L'homme brun qui se trouve à côté de lui, s'incline devant moi. Je trouve qu'il a un air moqueur. Est-il au courant pour moi et Kassem ? Enfin, de notre rencontre, de ce qui aurait pu être. Car pour le reste...

As-salam alaykom, je suis enchanté, mademoiselle.

Son accent est plus déclaré que celui de Kassem, mais son français est tout autant correct. Il y a aussi en lui une certaine hauteur qui me laisse perplexe, pourtant il est plein d'amabilité lorsqu'il me demande :

— J'espère que vous vous plaisez ici ?

— Oui, merci.

Il jette un regard à son cousin, et semble lui demander quelque chose dans un échange muet, auquel Kassem ne répond pas. Alors il me dit simplement :

— Au plaisir de vous revoir !

De la gentillesse perce dans ses derniers propos, et je n'arrive qu'à faire un sourire pour répondre. Kassem me jette un étrange regard où il me semble lire du regret, puis il passe à côté de moi, et je suis des yeux les deux hommes en costumes, blanc pour Djalil et bleu marine pour Kassem, lorsqu'ils se dirigent vers une limousine garée sur le côté.

Lorsque je le vois monter dans la voiture, je ressens un manque. Pourquoi ai-je cette réaction ? Je pensais être arrivé à oublier, mais le revoir devant moi, aussi beau, aussi imposant, et rencontrer ce regard vert si intense, cela a remué trop de souvenirs. Cette rencontre n'est pas encore assez lointaine, et je pense que tant que je resterai en Egypte, cela ne s'effacera pas.

Que peut-il penser de moi dorénavant ?

Lorsque les garçons me rejoignent, ils ne peuvent que voir la tristesse de mon visage, et face à la question pleine d'inquiétude d'Éric, je leur explique rapidement pourquoi je suis ainsi. Sans attendre, nous retournons à l'hôtel et ils me demandent de rester un moment avec eux, m'obligeant à m'assoir sur le lit. Stéphane, avec diligence, me prépare un thé qu'il sucre :

— Tiens, cela te réconforteras, dit-il en me tendant le gobelet.

Je le prends, la chaleur est si bienfaisante.

— Merci, mais ça va.

— Ma puce, nous ne savons pas ce qu'il s'est passé la dernière fois que tu l'as vu, mais depuis tu es mal. Il y a comme une cassure en toi. Ce type, ce que tu éprouves pour lui, c'est fort, intense. Ce n'est pas seulement une aventure. Tu es amoureuse, c'est cela ? me demande Éric en s'agenouillant devant moi, et tapotant mon genou.

Rencontre dans le désert.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant