Chapitre 2

8 3 0
                                    

Lorsque je me réveillais, il n'y avait plus personne et nous étions en plein milieu de la nuit. L'heure était donc venue de descendre de ma cachette où aucun humain aurait pu me trouver.
Une fois arriver en bas, je vérifiais que j'étais bel et bien seule dans la forêt des Rocky Mountains. Je me comportais exactement comme un mignon petit écureuil. Je fis le tour de mon arbre et des environs.
Rien.
Même pas une biche.
Rien que des arbres et mon petit étang. Ma nourriture se trouvait dans cet étang. Des délicieux petits poissons m'attendaient. À la seule condition que j'arrive à en attraper au moins un.
Je me changeais en humaine et m'étirais. Ça faisait du bien d'être tranquille une fois la nuit tombée. Si j'avais encore une maison, j'aurais été prendre une douche. Mais ici, je ne pouvais que me baigner dans l'étang pour me laver. Et j'en profiterais aussi pour choper un poisson. Sachant que je suis nulle en matière de pèche !
Depuis que je vivais dans les montagnes, et surtout depuis que je m'étais réveillée seule dans la forêt, j'étais complètement nue, ça ne posait donc aucun problème d'aller me baigner, je n'avais pas à me préoccupé de mes habits.
Je marchais jusqu'au petit lac et plongeai la tête la première dedans. Certes, ce n'était pas bien chaud mais ça faisait du bien. Et généralement les félins n'aiment pas l'eau, sauf moi. Je suis une exception , étant donné que je suis humaine à la base et que je ne savais toujours pas le comment du pourquoi je pouvais me transformer en animal. En tous les animaux, même si j'avais des préférences.
Pendant que je m'amusais à faire la planche dans l'eau, un bruit m'interpella.
Des pas.
Une démarche d'homme.
Un homme plutôt jeune et en bonne santé.
Je m'enfouissais sous l'eau en prenant ma respiration, ne faisant dépasser que mes yeux. Je nageais vers le rebord le plus près dans le plus grand silence. Seulement, l'eau peut être traitre.
J'inspirai à fond et mis la tête sous l'eau, me transformant en poisson du coin. Au moins, de cette manière, je pouvais voir et respirer sous l'eau. Et je pourrais potentiellement voir qui venait me déranger. Je me rapprochais du bord, de là où j'avais sauté puisque je l'avais entendu venir de ce côté.
De ce que je pouvais voir, il était grand, bien plus grand que moi sous ma forme humaine. Et lui aussi était armé d'un fusil. Il venait aussi pour me tuer. Mais il n'est pas né celui qui réussira à avoir ma peau !
Je fis demi-tour quand il s'approcha de l'eau. Je ne devais pas me faire remarquer et être près du bord était le meilleur moyen pour faire le contraire de ce que je voulais.
J'attendais dans l'eau. Longtemps. Il s'était assis au bord de l'eau. Et la regardais briller sous la lumière de la Lune. Mais moi et ma forme de poisson, on avait quelque peu de mal à s'entendre. C'était une forme capricieuse et je commençais à avoir de plus en plus de mal à respirer et à voir sous l'eau. Il fallait absolument que j'en sorte.
Je me changeais alors en grenouille moche et visqueuse pour sortir inaperçue et ça marchait. Il ne m'avait pas vu rejoindre la rive et n'avait pas remarquer que j'avais changé de forme.
Prochaine étape : chercher un endroit où dormir.
Je ne pouvais jamais resté plus de 2 jours au même endroit : bien trop risqué. Gardner connaissait presque aussi bien que moi la forêt et les montagnes. Pour y être venu tous les jours depuis qu'il est gosse, il n'a pas vraiment le choix. Comment je le sais ? C'est lui qui me l'a dis un jour où il me traquait et où je m'étais planquée dans une famille de renard qui m'avait accueillit les pattes ouvettes.
Une grenouille, c'est moche. C'est pourquoi je me changeais à nouveau en écureuil. Ni vu ni connu, je me faufilais jusqu'à un arbre et y montais jusqu'en haut. De là, je pouvais tout voir. Et même entendre l'inconnu qui avait débarquer dans les Rocheuses, apparemment.
_Elle n'existe pas. C'est des conneries tout ça. Gardner ne sait plus quoi inventer depuis 9 ans. Il y a un tas d'animaux qui vivent ici... Il a tout simplement confondu un trigre avec un puma. Il commence à se faire vieux et à perdre la tête, le pauvre.
Il parle de moi ou je rêve ? pensais-je.
Il balança un caillou dans le petit lac. S'il avait pu attraper mon dîner, ça m'aurait arranger mais bon. Mais non. Le caillou fit "plouf"... et c'était tout. Il se releva comme s'il avait mal partout, comme s'il était triste. Et moi qui, d'habitude, n'épprouvais aucune compassion pour les hommes, cette fois, j'en avais pour lui.
Il reparti par le même chemin qu'il était venu en trainant son fusil derrière lui. Avec un peu de chance, j'allais peut-être enfin pouvoir me remplir l'estomac !
Puis je me rendis compte que je n'avais pas besoin de descendre de l'arbre car il avait assez de nourriture pour un régiment d'écureuil, donc pour moi. Depuis 9 ans, je mangeais tout ce que les animaux du coin mangeaient. Et ça me suffisait. Même si de temps à autre, j'aurais voulu pouvoir manger des patates et des carottes commes celle que ma mère faisait et dont je n'en mangerais plus jamais. Ma vie était quand même bien triste par moment !
Une fois manger, je retrouvais forme humaine. Je me démêlais les cheveux comme je pouvais. Ils étaient bien trop long : ils m'arrivaient aux fesses. Déjà quand j'étais petite, ils étaient tout temps emmêlés alors qu'ils n'étaient pas spécialement longs... Je ne vous explique pas le temps que je passe à les démêlés tous les soirs après avoir couru dans tous les sens toute la journée.
Je m'allongeais sur une branche bien solide et regardai le ciel parsemé d'étoiles. Je ne me souviens plus très bien si j'avais la même à la fenêtre de ma chambre. Mais je savais que cette vue-là valait chère. Très chère. Certaines fois, je m'étais approchée de la grande ville la plus proche : Salt Lake City, et le ciel noir - quand il n'y avait pas de Lune - était orangé à cause des lampadaires et des lumières de maisons. Oui, j'aimerais retrouver une maison, l'affection d'une famille, la chaleur s'émanant d'un feu de cheminée, un lit confortable, de la nourriture humaine, des bonbons, et même aller à l'école ! Tout cela me manquait par moment. Mais retourner à la ville signifiait abandonner ce ciel magnifique de tous les soirs.
Je me souvenais aussi qu'avec ma mère on regardait souvent les étoiles le soir. Elle m'avait appris plusieurs constellations : c'était sa passion. Mais moi, je n'avais retenue que la Grande Ours. Je devais avoir 7 ans à l'époque, et maintenant j'en ai 19. La vie passe quand même bien vite et on ne sait jamais à quel moment elle peut s'arrêter...

La Femme AnimalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant