Un petit immeuble se tenait devant nos quatre figures tendues.
Tremblant à cause d'une brise sinistre et irréelle qui donnait la chair de poule, je regardais à droite, à gauche, me dévissais le cou en levant la tête afin de mieux dévisager le paysage dévasté qui s'étendait sous mes yeux fatigués. Les lèvres serrées, tellement serrées qu'elles ne formaient plus qu'une mince ligne blanche, je frissonnais et claquais des dents, la peur mêlée à une inquiétude subite et affreuse me nouant malicieusement le ventre.
C'était la première fois que je mettais les pieds dans un ghetto.
De tous côtés on ne voyait que des petits immeubles blancs, souvent couverts par des graffitis ou légèrement calcinés sur les bords, des petits arbres et des minuscules fleurs automnales mourants, à croire que même l'air, dont l'odeur était un savant mélange à de la drogue et de cigarette, de ce quartier était mauvais. Des voitures garées avaient des vitres cassées, des chats et des chiens maigrichons éraient dans les rues désertes. Dans l'ombre d'un immeuble on pouvait apercevoir les regards perçants d'un groupe de jeunes perdus dans toute cette malveillance, pesant sur nous, nous scrutant, tels des prédateurs affamés et surtout désespérés.
Je croisais une paire d'yeux brillants et me mis à trembler encore plus.
Au loin, un hurlement déchira l'atmosphère et me fit sursauter. Des coups de feu suivirent, ainsi que les stridentes alarmes des voitures policières.
Une main se posa sur mon épaule.
Levant les yeux, je croisais le regard vert de Natsu. Calme. Confiant.
-Maintenant tu comprends pourquoi j'ai insisté à t'accompagner ici.
Hochant la tête à contre cœur, je déglutis.
-Allons-y, souffla ma voix.
Nous nous mîmes en marche sans se faire prier, dans ce décor triste et désolé, dans ce quartier que le monde entier avait l'air d'avoir oublié en s'étant simplement préoccupé de le mettre de côté, ainsi, bien à l'abri des regards de toutes les autres personnes qui avaient eu tout simplement plus de chance, plus de chance en naissant dans des familles aisées, dans une ville confortable, pour mieux le dissimuler et le cacher dans un gentil petit coin d'ombre. Comme si cela allait suffire pour les faire disparaître, ce quartier et toutes les âmes damnées qu'il contenait.
Qu'est-ce que Levy faisait avec un homme venant d'ici ?
Avait-elle été menacée ? Enfermée ? Abusée ? Achetée ? Violée ?
Et si elle était tombée enceinte suite à une autre de ses nombreuses aventures sans lendemain ?
Tant de questions se bousculaient dans ma tête en demandant une réponse rapide et bien faite, une réponse que je ne pouvais donner dans l'immédiat, une réponse qui me terrifiait affreusement, alors que je montais d'un pas lourd et pesant un escalier de secours tout rouillé qui tremblait et grinçait dangereusement, menaçant de s'écrouler sous le poids de nos quatre corps.
L'ascenseur, qui ne semblait pas être un bon choix lors de notre arrivée dans l'immeuble, me faisait drôlement envie, alors que mes poumons ainsi que tous les moindres muscles de mon corps se déchiraient sous l'effort.
-Il habite à quel étage ?, lançais-je entre deux souffles saccadés
Nous étions présentement à l'étage cinq.
-Sept.
Gray me répondit rapidement, un mince et tout petit sourire dessiné sur ses lèvres. Il lança un coup d'œil à Natsu, qui montait la volée de marches courageusement, sans témoigner d'une once de fatigue, toujours aussi souriant et aussi confiant. Regardant devant lui, ignorant le regard insistant que son ami lui envoyait et acceptant de prendre le risque d'être brûlé par l'intensité de ses yeux, on aurait presque pu s'attendre à le voir siffloter, tant il semblait détendu. Heureux. Bien dans sa peau. Tellement bien dans sa peau qu'il m'énervait, me donnait l'impression d'être une parfaite imbécile à avoir peur de tout et de rien, une insignifiante princesse jamais sortie de son minable petit château qui venait de découvrir que le monde n'est pas tout rose, pas tout bon.
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À La Croisée Des Chemins
أدب الهواةC'est étrange, cette façon que le hasard a de mettre des personnes sur notre route. Les rencontres qu'on fait en étant au bon endroit, au bon moment. Étrange à quel point nos chemins se croisent et se recroisent, et que les amitiés affluent, le coeu...