Liberté

52 4 3
                                    

"Les Hommes sont tous morts sous la poussière du mensonge

Je les avais tant aimé,

Mais j'ai aimé Sarah plus que tout,

Elle restera la plus belle chose que j'ai créé."

Manuscrit de l'AubeMorale

-------------------

50 Lunes plus tard ; Anno Domini 3023

« Encore un ! » hurla Myr en abattant son gobelet vide sur le comptoir.

L'assemblée moite et lourde qui l'observait s'égosilla alors d'une seule voix éclatante.

La jeune fille lança alors un regard qui se voulait défiant à son opposant. Une brume éthylique voilait les traits de son visage et la nausée l'empêchait de se focaliser sur quoi que se soit. Quelque chose hurlait dans son crâne et elle ne savait pas distinguer si c'était les clients de l'auberge ou sa propre conscience. Son estomac se retourna a la réception de l'hydromel et elle eut un haut de cœur violent. Il fallait que son adversaire se rende avant le prochain verre sinon elle risquait...

« Ah ah pas mal Myr ! Mais je doute que tu puisses... » commença le jeune homme en face d'elle.

Il eut un hoquet retentissant et deux femmes dans le public pouffèrent tandis que les hommes encourageaient à grand renforts d'insultes et de cris les deux participants. Il y eut un bruit de verre brisé ainsi que le début d'une bagarre dans le coin de la pièce.

Myr sentait le sang affluer à ses tempes et l'excitation multipliée par l'alcool. Ses cheveux courts et sombres collaient à sa nuque sous la chaleur, et elle se cramponna au comptoir pour rétablir son équilibre. La jeune fille fixa son adversaire vider son verre, de manière peu assurée, mais jusqu'à la dernière goutte. Ce dernier plissa les yeux et reposa son verre avant de lâcher un rot puissant. Un homme sec et noueux vint le frapper dans le dos avec un rire de hyène et l'aubergiste se rua dans le fond vers la bagarre pour aller séparer les deux hommes ivre morts.

« Avoue-le, Sage » ricana la jeune fille, « T'es plus bourré que la moitié des gens dans cette pièce. Je parie que si tu croisais un âne dans la rue tu le confondrais avec ta propre mère ! »

Une armoire à glace dans le groupe des spectateurs s'esclaffa si bruyamment que certains de ses voisins en renversèrent leur chopines de bière. L'endroit était un capharnaüm total.

Sage, son opposant, tituba vers elle en la pointant de son doigt métallique. La prothèse grossière faisait étrangement peur à la lueur des lanternes de la pièce et brillait comme un couteau bien aiguisé.

Le jeune homme lui prit le bras et amena Myr de force pour lui souffler au visage.

« Je ne dois pas être tout à fait saoul puisque je te trouve encore bien trop laide à mon goût. On ne t'as jamais dit que tu ressemblais à une gargouille malade ? »

La jeune fille éclata de rire puis perdit l'équilibre et se laissa tomber au sol, toujours hilare. Le monde tournait autour d'elle et elle se sentit perdre le contrôle de son corps, comme si plus rien de voulait répondre. Les sons lui parvenaient en écho, au loin et elle n'arrivait pas à différencier quoi que ce soit. Quelqu'un cria et elle se demanda si ce n'était pas elle.

Sage se tourna vers le petit public agité et fanfaronna : « Pour ceux qui doutaient encore, c'est un fait avéré : toutes les femmes tombent à mes pieds ! »

Le spectacle était terminé.

Il y eut quelques rires, des murmures, des poignées de mains, des pièces qui s'échangeaient et le brouhaha se dissocia pour s'éparpiller à d'autres tables où des parties de cartes battaient leur plein.

Nouvelle BabyloneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant