5. L'Ange tombé du ciel

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La femme était attachée au radiateur, et encore dans les vapes. Elle avait un mauvais hématome sur le front.
Le Bleu grogna un juron.

Il avait déballé le contenu du sac de sa captive sur la table. À part des babioles, un cran d'arrêt et quelques réserves de nourriture, il n'avait rien trouvé d'intéressant... si ce n'était un appareil photo polaroid, qui suscitait son intérêt depuis plusieurs minutes.

Il l'examinait et le tournait dans tout les sens. Il n'en avait jamais vu auparavant.
Où avait-elle trouvé ça ? Il lui jeta un regard teinté de curiosité.

La fille était plus âgée que lui - au plus, la trentaine - et d'après l'état de ses vêtements, elle semblait avoir passé un certain temps sur la route. Il ne voulait pas lui faire de mal mais il connaissait le code des Voltigeurs: ceux qui ne portaient pas la veste n'étaient pas - a priori - considérés comme des alliés, mais comme des dangers potentiels.
Il n'avait jamais vraiment apprécié cette doctrine un peu trop paranoïaque à son goût, mais les règles de survie du nouveau monde imposaient de ne pas laisser place au moindre risque.

De la même manière, intégrer un tel groupe signifiait obéir au doigt et à l'œil à chacune de ses règles.

Sorti de ses pensées, il se leva et se dirigea vers Skig. Blessé, il était toujours allongé sur la banquette, un bandage de fortune rougissant à l'arrière de son crâne.
Le Bleu se baissa vers lui. Il respirait encore.

Il se prit la tête dans ses mains et eut une profonde inspiration de soulagement.
La fille se redressa soudain en sursaut, en se cognant contre le radiateur. En insultant violemment ce dernier sous le coup de la douleur, elle constata avec stupéfaction qu'elle était ligotée. Rageusement, elle essaya de se défaire de ses liens en bougeant nerveusement ses mains derrière son dos.

« Bouge plus ! cria le Bleu, son revolver braqué sur elle.

Elle s'arrêta, esquissa une grimace de dégoût puis cracha par terre.

- T'es dingue ou quoi ? Retire-moi ces putains de cordes ! lança la jeune femme.

- Ta gueule ! rétorqua le Bleu.  Il fit jouer le barillet du revolver. T'es attachée, j'ai une arme, tu m'écoutes, dit-il avec une voix tremblante.

La captive avait perçu le manque de confiance de son ravisseur et se détendit. Elle esquissa un sourire mauvais.
- Qu'est-ce que je peut faire pour toi ? finit-elle par dire.

- Comment t'es arrivée ici ?

- Le hasard.

- Ça, c'est des conneries ! Pourquoi tu nous as suivis ?

- Je savais pas que vous étiez là ! Je sais même pas qui vous êtes, merde !

- T'es qui ?

- Hein ? Mais je suis personne, putain !

- Ton nom !

- ...Lily.

- Ok, Lily. Tu vas me dire comment tu es arrivée ici, ce que tu as vu, entendu, tout. J'ai un blessé avec moi et je veux pas qu'il me claque entre les doigts.

- C'est toi qui a abattu le clodo dehors ?

- Hein ?

- Le barbu avec un trou dans le ventre, dans le couloir. Il se battait avec ton pote et tu l'as tué, non ?

- Comment tu sais ça ?

- Je sais pas, je demande.

- Ouais, c'est moi.

Chroniques du monde poussiéreuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant