Chapitre 10

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Ma gorge se serre, je m'étrangle.

Bouboule me sort par les yeux, l'envie inimaginable de faire demi-tour et de la tuer de mes propres mains me démange. Mais j'ai déjà assez perdu mon temps.

Pourquoi James la laisse-t-il encore respirer ?

Me faire déguster par les vampires me provoquerait moins de mal en comparaison à ce que je ressens, j'aimerais pouvoir l'oublier d'un claquement de doigts, me réveiller et me dire que c'était un simple cauchemar. Qu'ils n'existent pas. Ni lui, ni le club, ni Bouboule. Ces deux-là ont piétiné mon amour-propre.

– Tu l'aimes n'est-ce pas ? reprend-elle me voyant pensive.

Je hausse les épaules.

– Non.

Je tente encore de me convaincre que je ne suis pas tombée amoureuse d'un salopard qui m'a achetée, m'a exploitée en me considérant comme de la nourriture et qui a essayé de me tuer. Même si ça devait être sous la contrainte.

– Tu sais... Je ne l'apprécie pas forcément, mais j'ai vu à quel point tu es importante à ses yeux.

J'ai des bleus à l'âme avec l'impression d'être écorchée vive, ce besoin de prendre un peu le large, de faire le point sur tous les événements qui se sont enchaînés, je n'arrive plus à suivre, il me faut de l'espace.

– Je lui en veux... Je lui en veux tellement.

La main de Céliane se serre dans la mienne sans réussir à me réconforter. Je me demande ce que fait James en ce moment. Il doit être au club avec sa majesté lui faisant des courbettes à tout bout de champ en se moquant discrètement de ne plus m'avoir dans les pattes.

– Où partons-nous en si bon chemin ? dis-je en changeant de discussion.

– Si ton petit ami ne nous intercepte pas avant, nous serons dans deux jours à Portland.

Je fais un bond.

– Deux jours ? !

Elle me fait un sourire jusqu'aux oreilles.

– Regarde un peu derrière toi on tracte une caravane, dis-toi que dans deux jours tout sera oublié devant un bon mojito.

J'ai l'impression que plus rien ne peut me remonter le moral. Je me sens vide, inutile, mon regard reste éteint et cette boule dans la gorge n'arrive pas à se dissiper.

– Comment fais-tu pour être toujours de bonne humeur ?

J'admire ce sourire qui ne quitte pas ses lèvres.

– Je ne sais pas si je serai là demain, répond-elle d'une voix fragile, je profite de chaque instant que la vie peut encore m'offrir.

J'ai honte de me plaindre encore quand je l'entends une nouvelle fois m'annoncer la venue proche de sa mort avec impassibilité. Il y a encore un mois, je n'aurais jamais cru être une Guérilla, éprouver de douloureux sentiments pour un vampire, et me tenir à côté d'une sorcière en fuite avec qui je partagerais la fin de sa vie. Je suis impuissante... et ça me met le cafard de la regarder s'éteindre sans pouvoir rien faire.

– Comment tes parents ont pu concevoir une telle chose ? Sacrifier leur propre enfant ? Ils avaient tout les deux des problèmes psychologiques non ?

– Non, dit-elle en souriant, quand j'ai tué la chef, ma mère a repris le flambeau. Elle compte coûte que coûte achever ce rituel et pourtant, c'est bien elle qui m'a portée pendant 9 mois.

– Et ton père dans tout ça ? dis-je en surenchérissant.

Elle fait un mouvement d'épaule qui traduit l'indifférence.

Jamais sang-mêléOù les histoires vivent. Découvrez maintenant