APRÈS

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- PEARL -

          Dans les vestiaires, Taylor se lamente de ne pas avoir pris ses baskets mais ses chaussures de pointes. Pourtant, il fallait prendre les deux. En vain, je fouille dans mon sac espérant pouvoir la dépanner. Le temps de, elle rassemble ses cheveux dans un chignon tressé laissant ressortir ses quelques mèches châtains. Finalement, je ne remercierai jamais assez mon père d'être si prévoyant; il avait glissé une autre paire de chaussure avec les miennes, avec un mot: POUR TE FAIRE UNE AMIE. Ce qu'il ignore, c'est que j'ai le sentiments que moi et Taylor sommes déjà amies. Je sors la paire de chaussure et la lui tends.

- Oh, mon dieu ! Tu sais que je t'aime déjà toi ? Dit-elle en se jetant à mon cou.

          Je ne peux m'empêcher de rire avec elle. Même si les pimbêches nous fixent d'un mauvais œil, alors que les filles plus discrètes nous envient du regard. L'une des choses que je déteste dans les établissements: les étiquettes que chacun donne à l'autre. Pourquoi les étudiants s'obstinent à stéréotyper quelqu'un ?

          Tandis que je fais les lacets de mes baskets, Taylor en profite pour emprisonner mes cheveux dans une queue de cheval relativement haute. Malgré quelques mèches rebelles et mes cheveux épais, elle y parvient sans trop de difficulté. Madame Montez se déplace jusqu'aux vestiaires pour me presser.

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          Épuisée, ma partenaire de danse s'appuie contre mon casier et se laisse glisser le long de ce dernier. Il est vrai que Madame Montez a abusé de notre enthousiasme aujourd'hui, mais ce n'est pas un drame non plus. De plus, elle doit se ressaisir puisque dans cinq minutes, il y a la montée en cours: Musique. C'est vraiment le cours que j'attends le plus; je vais enfin pouvoir chanter et corriger mes fausses notes. Le seul problème, c'est qu'il va falloir que j'apprenne à jouer d'un instrument mais je ne sais pas lequel choisir. Guitare, piano, violon; tous ses instruments me plaisent mais je préfère de loin de chant.

          Il nous reste encore quelques minutes de repos - deux ou trois - alors je m'assois par terre et contre les casiers avec Taylor.

- Pourquoi es-tu venue ici ? Me demande-t-elle.

          Elle attend ma réponse, le regard porté sur les universitaires qui traversent le couloir.

- Ce n'est que le rêve d'une petite fille naïve, je ne me fais pas de faux espoirs, je sais que je ne percerai pas dans la Musique mais je veux apprendre le chant et m'épanouir rien qu'une année dans ce milieu. Et toi ?

          Je sens qu'elle n'est pas à l'aise, et qu'elle est un peu triste de se remémorer les raisons de sa venue.

- Malheureusement, ce n'est pas mon rêve à moi. Je ne dis pas que je n'aime pas le chant ou la danse mais j'aurais aimé faire de la photographie ou travailler dans l'audiovisuel. Je fais tout ça pour mes parents, ils veulent que je fasse comme Alec.

         Alec, son cousin ? Mais pourquoi ?

- Ils sont fière de lui et veulent l'être aussi de moi, fait-elle comme si elle lisait dans mes pensées. Ils pensent que la photographie n'est pas une source de fierté, que tout le monde pour prendre une photo. Mais je ne vois pas les choses pareils, je ne prends pas simplement une photo, je capture l'instant, la joie, la colère, la confusion, la gêne, tout ce qui fait de nous des êtres-vivants: je capture la vie.

          Elle pense chacun de ses mots, et n'hésite pas, ne cherche pas ses mots: ils sont tous trouvés. Je ne comprends les parents qui empêchent leur enfants de faire ce qu'ils aiment. Bien sûr, certains ne peuvent payer les études de leurs enfants mais il existe des aides et, quoi qu'il arrive, si on aime la chose, on y parvient. Après il y a les gens comme moi, qui n'ont pas confiance en eux. Je pense que c'est aussi le problème de Taylor.

          Ce n'est pas une sonnerie qui retentit mais le vieux son d'une cloche, un son clair et rauque à la fois, c'est vraiment magnifique. Taylor se redresse et m'aide à me lever. A présent, nous sommes obligées de courir jusqu'à notre salle de cours.

          Dans l'élan de mon amie, je heurte de plein fouet Alec. Il m'aide à ne pas tomber à la reverse avec lui en me retenant par les épaules. Taylor ricane en se planquant derrière Lukas qui s'amuse de la situation ... lui aussi, ils ne sont pas incroyables. Je suis presque sûre qu'elle m'a poussé ... si elle le fait exprès, je ne comprends pas pourquoi. Il replace une mèche derrière mon oreille, et je frisonne; une décharge électrique traverse mon corps, peut-être sur le coup de la surprise. Il doit me prendre pour une empotée incapable de tenir debout. Il me sourit et ce n'est qu'à ce moment là, je reprends mes distances. Il sourit d'autant plus. Son visage m'est quelque peu familier, je suis sûre de l'avoir croisée. Faut que quelqu'un m'explique, je ne comprends pas ! Heureusement, Taylor se fait "pardonner" en m'attrapant le bras et m'emboitant la pas pour s'engouffrer dans la pièce.

- Eh, dragues pas mon cousin sous mes yeux, s'il te plaît.

- Mais ...


Les Lumières Des CieuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant