Prologue

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La pièce était en train de remuer lentement, de façon presque voluptueuse, alors que je portais mes lèvres sèches à mon verre. Toutes les personnes présentent étaient légères, ils donnaient l'impression de voler ; les étoffes délicates oscillaient lentement sous la lumière des néons. J'étudiais un couple, face à moi ; ils dansaient, leurs cheveux flottant dans la fumée qui avait étouffé le lieu.

Je me trouvais là, dans un coin sombre, en train de boire. Je ne savais plus pourquoi j'étais arrivé dans cet endroit, ni comment. Je n'avais pas envie de m'en souvenir : tous ces individus étaient tellement merveilleux, dansant dans la clarté des luminaires artificiels, sans se soucier de ce qui les entourait.

Je les trouvais incroyables. Mes yeux brillaient, autant pour eux que pour les lumières factices. Au moment même, un résidu de douleur et de peur frappait contre ma poitrine, au même rythme que mon cœur, l'enveniment lentement, me désolant ; mais j'arrivais à ne pas m'en soucier. Je le repoussais loin de moi, loin de ma personne, effaçant une part de mon esprit, alors que mon regard circulait entre les êtres.

Nous étions des centaines, des milliers, un amas d'ombres lumineuses à se remuer dans ce bâtiment. Des tas de personnes insignifiantes, qui, réunies et brillants sous les lumières, étaient formidables. Mon poing se resserrait sur le gobelet dans mes mains lorsqu'une impression de chaleur emplit mon corps. Je me sentais considérable, lorsque je remarquais que quelques personnes m'étudiaient ; elles passaient leurs yeux vides et luisants sur mon corps obscur, avant de les détourner, dirigeant leurs fenêtres sans vie vers un autre coin sinistre.

Inopinément, mon regard englobait une personne particulière. Il se trouvait assit à une des tables, baignées d'une lumière rougeâtre, et, comme moi, il déshabillait la pièce. Nos regards se croisèrent ; il avait l'air heureux. Il me lançait un sourire joyeux, ivre ; je lui rendis la contorsion singulière et funeste de mon visage, définissant ma gaîté.

Il semblait appréciable, presque charmant, alors qu'il redonnait de l'ordre à ses boucles brunes d'un geste agile. Il me portait toujours la même attention, ses yeux dirigés vers moi, scrutant mon corps imparfait. De là où je me trouvais, ses pupilles semblaient noires, ne reflétant pas la lumière ambiante. Son visage était appréciable.

Après ce qui ressemblait à un moment d'hésitation, il se levait, puis, avançait à grands pas décidés vers moi––ses yeux étaient verts.

Black Baccara - Larry StylinsonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant