Chapitre 7

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Le trajet se fit en silence. C'était la première fois qu'elle prenait le magicobus, mais elle ne fit ni attention à l'accueil joviale qu'elles reçurent, ni à l'étrangeté du mobilier –des lits dans un bus ?? Ce ne devrait-il pas être des banquettes ?-, ni des personnes qui les entouraient. Non, la seule chose à laquelle elle prit la peine de faire attention était le comportement inhabituel d'Amy. Elle avait l'air à la fois fâchée et déçue, mais malgré tout elle ne disait rien. Et pour Lily, c'était encore pire que si elle la sermonnait pendant trois quart d'heure. Elle avait l'impression d'être ignorée, presque rejetée. Aucun mot. Aucun reproche. Aucun soupir. Rien. A l'exception de ses yeux, si rieurs durant les vacances, à présent tristes et ombrageux. Elle s'en voulait et avait honte d'être à l'origine de la déception de la mère de Remus. Elle baissa la tête, ne pouvant plus regarder la femme. Une larme aussi silencieuse qu'elle coula sur sa joue toujours mouillée de sa sortie de Poudlard. Elle devait vraiment être une bonne à rien pour se mettre à dos toutes les personnes qui osaient lui tendre la main. Sa soeur Pétunia. Sa famille. Ses parents. Dumbledore. Et maintenant Amy. C'était quoi son problème ? Quelle était la solution ? Pourquoi, alors qu'elle pensait que ça ne pourrait jamais être pire, venait-on lui prouvait que tout été possible ? Pourquoi s'acharnait-on sur elle ? Qu'avait-elle fait ? Que lui reprochait-on ? Que devait-elle faire pour que ce cauchemar se termine enfin ? Qu'attendait-on d'elle ? Elle ne savait pas et c'est bien ça qui la rendait triste et déprimée. Comment pouvait-elle sortir de son puits sans fond si elle ne savait ni jusqu'à où elle pouvait encore tomber, ni le chemin de la sortie, et qu'elle n'avait corde à laquelle se retenir ? Lorsqu'elles rentrèrent dans la maison, Lily courut en haut. Elle ne pouvait plus supporter cette tension. Si elle était ici, après tout, ce n'était pas sa faute. Ce n'était pas de sa faute si elle avait été renvoyée de Poudlard. N'est-ce pas ? Non, rien n'était de sa faute. Pas de sa faute. Non. Elle n'était pas monstrueuse. Elle n'avait pas tué sa mère. C'était simplement qu'un accident. Elle ne pouvait pas savoir. Pas de sa faute. Ses camardes de chambre étaient simplement jalouses. Oui jalouses, mais de quoi ? De son placement chez les Lupin ? Ce n'est pas possible ! C'est débile d'envier une telle chose ! Mais alors de quoi ? Elle avait cru comprendre que c'était sa complicité avec les maraudeurs. Mais cette complicité n'était due qu'au fait qu'elle ait séjournée dans la famille de Remus. Elle aurait préféré ne jamais mettre les pieds dans cette étrange maison. Rester chez elle. Même avec Pétunia et son mari. Oui, elle aurait préféré ne jamais connaître cette sympathique famille. Etre dans la sienne. Avec sa cousine, son père et...sa mère. Elle aurait tant préféré ! Mais malgré tout, elle essayait de se convaincre désespérément qu'elle n'était en cause pour rien de tout ça. Cette nuit-là, elle ne ferma pas l'oeil, trop occupée à écrire aux maraudeurs et à pleurer l'injustice du monde et répéter inlassablement une litanie de 'C'est pas ma faute'. Les jours lui semblaient être diaboliquement longs. Elle se contentait de descendre pour les repas, faisant au minimum face aux parents de Moony. Elle ne voulait plus voir leur déception dans le fond de leur regard, ainsi que des milliers de questions aux quelles elle ne se sentait pas capable de répondre. Durant le reste de la journée, elle demeurait dans la chambre de Sirius. Ses posters, ses photos et ses objets plus ou moins insolites l'apaisaient. Ça lui rappelait son ami. Elle avait l'impression d'être un peu moins seule. C'était pathétique, mais elle avait un peu impression qu'il était avec elle. Et de toute manière sa propre chambre lui rappelait de trop mauvais souvenirs pour y passer plus de dix minutes sans s'écrouler sous son propre poids, prise de tremblements. Ainsi, elle ne put pas dormir un seul des soirs de la semaine dans son lit. Contre toute attente, elle se rendait chaque nuit dans celui de...James. Il était le seul à la consoler une fois le soleil couché. A croire que James Potter était une réincarnation d'Odette du lac des cygnes. Durant la journée, Potter n'était qu'un simple maraudeur. Blagueur, stupide, imbu de lui-même. Mais alors que le soleil laissait place à la lune, James devenait un confident. Sincère, gentil, attentionné. En un mot : humain, tout comme Odette. Le vendredi après-midi, l'adolescente, assise sur le lit de sa petite momo, lui écrivait une lettre.
'Coucou toi, Je suis sûre que tu es étonné de recevoir une lettre de moi. Après tout, ce n'est que la vingtième cette semaine. Mais que veux-tu, je n'ai réellement que ça à faire. Tu ne peux pas t'imaginer comme je m'ennuie ici. C'est un vrai calvaire ! J'ai l'impression que plus ça va et pire c'est ! J'aimerai tant que ça s'arrête. Que ce cauchemar prenne fin. Vous ne pouvez pas savoir à quel point vous me manquez. Maman aussi me manque. C'est dur sans vous ! Avant, je pouvais vous parler n'importe quand. Je pouvais avoir du réconfort auprès de vous. Maintenant, il ne me reste que vos chambres, vos photos...vos souvenirs. En parlant de chambre, ne le dis pas à James, mais...comment dire ? Tu sais que depuis quelque temps, je ne dors pas très bien. Et à ces moments là, ça a toujours été lui qui venait me voir. Mais maintenant, tu comprends, il n'est plus là. Je n'ai plus rien sauf...sa chambre. Comme tu le sais, ma chambre m'est devenu insupportable, alors j'ai dormit dans sa chambre, et plus précisément dans son lit. Je ne me voyais pas dormir sur la moquette ! Et je n'ai pas le droit de faire de magie, donc.... Parce que j'ai bien essayé de dormir dans le tien ou celui de Rem', mais je n'ai réussit qu'à tourner dans vos draps. Mais dans le sien c'est comme s'il était là. Tu comprends ? Mais c'est vraiment bizarre, il n'y a que lorsque je sens son odeur que j'arrive à trouver le sommeil. Et depuis la mo...une semaine, il n'y a que ça qui réussit à me faire dormir. Comme une drogue. C'est grave docteur ? Si non, j'essaye de vous écrire des histoires, mais je ne trouve pas ça très concluant. Enfin, tu le verras par toi-même. Par contre, la votre je l'ai a-do-rée –pas autant que la petite molaire mordeuse- mais elle était très drôle. Avec ses trois mètres recto verso de parchemin et mes rires, il m'a fallu plus d'une heure pour la lire. Je crains que vous par contre, vous n'ayez besoin que de cinq minutes pour en faire le tour. Et aussi avec Amy, je ne sais pas ce que Dumbledore lui a dit. Mais depuis dimanche elle est bizarre. Elle ne m'adresse la parole que pour me dire 'bonjour', 'bonsoir', 'tu veux des pommes de terre'. Je ne comprends pas. Qu'ai-je fait de si grave pour qu'elle agisse comme ça ? Je sais que je n'aurais pas dû dormir dans votre dortoir, mais tout de même. Je t'avouerai que je n'aurai pas pu dormir si vous n'étiez pas arrivés. J'aurai peut être pu m'en sortir, mais c'est certain que je n'aurais pas réussi à dormir. Alors même si tout ça est le prix à payer pour n'avoir que dormi, pour que vous soyez venu m'aider cette nuit-là, franchement ce n'est pas grave tout compte fait. Moi, je vous en serai toujours reconnaissante. Parce que vous êtes venu et vous ne m'avez pas laissé. Au faite, comment avez-vous fait pour venir au bon moment ? C'est tout de même étrange ! Tu ne trouves pas ?
Bon, je vais te laisser faire tes devoirs, draguer les filles ou faire des blagues douteuses. Amusez-vous bien ! Lilou. PS : encore deux jours, et je reviens ! J'espère que cela passera plus vite que les précédents. Bisous !'
Elle lui envoya la lettre avec l'aide de Myosotis, puis se mit à ses leçons. Le lendemain, elle sortit du lit de son camarade, et, comme elle en avait l'habitude, descendit à toute vitesse prendre son petit déjeuner mais surtout aller chercher son courrier. Tous les matins depuis le début de la semaine, un des hiboux de ces amis attendaient qu'elle vienne chercher la lettre qu'ils lui avaient écrite la veille. Mais aujourd'hui, aucun oiseau ne volait dans le séjour, aucun parchemin n'était à porter de vue, aucune enveloppe ne trainait sur la table. Déçue, elle mangea mollement ce qu'elle trouva avant de tout ranger et de remonter dans la chambre de Sirius. Elle attendit la lettre pendant deux jours avant de comprendre qu'elle ne viendrait pas. Deux jours avant de se faire à l'idée qu'ils ne lui répondraient pas. Deux jours durant les quels elle ne ferma pas l'oeil de la nuit. Deux jours où elle attendit d'apercevoir un hibou traverser les nuages de fumée que produisait l'usine à savon. Le dimanche soir, quand Amy monta pour la prévenir qu'elles allaient bientôt retourner à Poudlard, elle la trouva assise sur le bord de la fenêtre, la tête levée vers le ciel, les yeux dans le vague.
- Lily ! l'appela-t-elle au pas de la porte de chambre de Sirius.
Lily se contenta d'acquiescer, ne détournant pas les yeux de l'extérieur, n'ouvrant pas la bouche. Elle resta contre la vitre, la tête tournée vers l'horizon. A vrai dire, elle n'avait pas dit un seul mot depuis qu'elle avait quitté l'école, depuis qu'elle avait été séparée de Sirius. Amy avait bien remarqué qu'elle passait toutes ses journées dans la chambre de ce dernier et le directeur lui avait d'ailleurs écrit quelques lignes sur la relation particulière entre les deux adolescents. Bien qu'Amy ait été très septique lorsqu'on lui avait annoncé qu'ils avaient des sentiments là où elle ne voyait qu'une très forte amitié, comme elle l'avait déjà vu avec certains enfants dont elle avait eu la garde, elle en était contente. Car si Lily ouvrait son coeur à un garçon, elle acceptait une nouvelle personne dans sa vie, et donc elle ne se renfermait pas sur elle-même.
- Lily, qu'est-ce qu'il y a ? demanda-t-elle, légèrement inquiète.
Mrs Lupin s'approcha et s'installa à côté d'elle sur une chaise.
- Ça fait une semaine que tu es ici et tu n'as pas parlé depuis que tu as quitté Poudlard. Au début, j'ai pensé que tu voulais être seule, je ne voulais pas te brusquer. Mais là, je suis vraiment inquiète. Tu ne parles plus, tu ne manges plus, tu n'écris plus. Tu restes devant cette fenêtre ! Si tu veux aller dehors, tu peux y aller, dit-elle doucement, ne sachant plus comment lui parler. Tu le sais ?
L'adolescente tourna mollement la tête vers elle quelques secondes avant de retourner à sa contemplation.
- Tu sais que je ne vous ai jamais interdit de sortir ? reprit Amy. Si tu veux, tu as encore un quart d'heure avant que l'on parte. Amy, sentant qu'elle ne lui dirait rien, sortit de la chambre non sans soupirer.
Pendant les dernières quinze minutes, Lily regarda par la fenêtre, n'espérant plus, mais regarda tout de même. Lorsque l'heure fut venu de s'en aller, elle se leva, prit sa valise et descendit prendre le bus.

Un livre trop convoitéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant