Chapitre 9. D'une beauté

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« Dernier appel pour tous les passagers voyageant à destination d'Istanbul, Turquie. Veuillez vous présenter à la porte 18B, immédiatement. »

Elle me fixe, je sais qu'elle attend que je la retienne et elle sait que j'en meurs d'envie. On est parti sur Paris ensemble, c'est comme ça qu'on a tenu jusque maintenant. Loin de nos familles, de nos amis, de nos repères. Lui demander de rester c'est égoïste de ma part, elle va mal et ça n'ira qu'en s'empirant j'en suis sûre. Il compte pas la lâcher, malgré qu'il la trompe, je reste persuadée qu'il l'aime.. Bien-sûr c'est paradoxal, à côté de ça, il n'hésite pas à voir une autre femme et lui promettre la lune sûrement. Yamina lui a tout donné. Mais vraiment tout. Son amitié, sa confiance, son amour, sa première fois et son avenir. Elle comptait se marier avec, ce n'était qu'une question de temps. Il devait partir en Turquie ensemble en octobre, histoire de rencontrer toute sa famille.

Peut-être est-ce mieux ainsi? Elle comme moi croyons au destin.

Je la serre fort dans mes bras, je profite de ces quelques instants avec elle mais je ne pleure pas, elle serait encore plus malheureuse.

- Tu m'appelles quand tu atterris ok?



- Promis



-Tu fais attention à toi, pleins de bisous à tes parents et à tes soeurs



- Je manquerai pas.. Lina, je suis désolée, je veux pas t'abandonner mais tu..



- Arrête, tu m'abandonnes pas, t'en as besoin et je comprends. De toute façon, on s'écrit, on s'appelle et on se voit très vite



Elle fait une grimace, je souris, je la connais tellement.



- C'est bon, je viendrai moi en Turquie pas de problème



Elle me serre fort et me remercie. Un dernier bisous et je regarde ma meilleure amie s'en aller.

 J'ai juste le temps de rentrer me doucher, elle a pris le premier vol, celui de 6h30.

J'enfile un pantalon kaki, un haut blanc, une veste blazer blanche, mes talons kaki, je me maquille, attache mes cheveux en queue de cheval haute, je contrôle mon sac à main et je prends la route direction le bureau.

 Au fond, je suis morte de fatigue, mais j'ai trop d'émotions en moi et du coup je n'ai aucune envie de dormir.

 Je travaille sans vraiment travailler. Je me rends compte que ma vie va changer et en tout point et je sais pas si je suis vraiment préparée à cela. Comme si depuis que j'avais mis les pieds dans cette entreprise, tout partait en vrille dans ma tête et dans ma routine.

Je m'en cache pas, je ne contrôle plus rien ou presque et j'ai horreur de ça.

 Yamina m'envoie un SMS me disant que tout va bien et qu'elle est enfin chez ces parents. Je suis soulagée, je sais que là-bas tout ira mieux. 

Ma journée se passe tranquillement, on me dirige dans mon travail, j'apprends de nouvelles choses et j'en suis ravie, je me butte au travail, au moins je ne pense à rien d'autre.






Rien ne change, je passe mes journées à l'entreprise et je prends même du travail au loft. Yamina m'écrit de temps en temps, mais de moins en moins. Je la comprends, elle a besoin de couper avec tout ça et finalement je réalise que j'aurai fait pareil alors je ne force pas.

 Toni a essayé de me joindre à plusieurs reprises, il est même passé en furie la cherchant dans toutes les pièces. Je l'ai laissé faire, à quoi bon l'en empêcher? Quand il a vu que sa chambre était vide, qu'il manquait ces vêtements, qu'il ne restait que les photos d'eux deux, il m'a fixé cherchant des réponses à toutes ces questions. De mon côté, je le regardais depuis l'encadrement de la porte.


« Qu'est-ce que tu veux que je te dise Toni? Elle est partie, elle a pas supporté. Tu savais, tu savais qu'elle s'en remettrait pas. Elle a préféré fuir, oublier, recommencer et elle reviendra jamais. N'essaie pas d'imaginer une solution, aucune ne la fera revenir. Tu savais qu'elle t'avait tout donné, qu'elle aurait donné sa vie pour toi. Elle aurait tourné le dos à sa famille pour toi, tu le sais, tu le savais.. Elle te pardonnera pas, tu la connais assez pour le savoir. Retourne chez toi, continue ta vie, ne me demande pas où elle est, je te le dirai pas. »




Les larmes coulaient sur ces joues mais ça ne m'affectait pas. Il est passé devant moi tête baissée et depuis je n'ai plus de nouvelle.



Vendredi, j'ai croisé Issam, lors de ma pause déjeuner, il était avec Selma, sa copine. Je n'ai même pas répondu à son « salut », je sais pas, pas l'envie, pas d'intérêt.

 Je n'ai même pas cherché à voir sa réaction, je m'en fichais vraiment.



Samedi matin, je me réveille vers 10h, j'enfile mon peignoir et je descends récupérer le journal. En ouvrant la porte, je trouve un gros carton par terre. Je me souviens alors des paroles de Kader Brahimi et je monte en pression. N'ayant eu aucune nouvelle, je pensais sincèrement qu'il avait laissé tomber cette idée stupide. Je tremble en prenant le paquet et je me décide à l'ouvrir.



J'y retrouve une robe longue de couleur rouge.. Rouge comme la robe que je portais en boîte de nuit la première fois où on s'est vu.. Elle est en dentelle au niveau des bras, du dos et du décolleté. Elle serre vers les hanches et s'ouvre en bas, forme sirène.

Elle est magnifique, y a pas de mot. Des talons Louboutin noir accompagne le colis et une lettre aussi. Je la regarde sceptique.



« Bonjour,



Voici la robe que vous porterez ce soir. Soyez prête à 20h en bas de chez vous.

 Ceci n'est pas une question ni une proposition, mais un ordre.



K.B. »




Deux lignes de texte.. Je crois rêver, il me traite comme un objet sans aucune raison. Je bouillonne mais je sais que mon avenir est entre ces mains. Si je suis renvoyée en plein milieu de mon stage, aucun patron ne voudra me donner ma chance.

 Je n'ai même plus cette envie d'apprendre à le connaitre, il est tellement étrange et ça me fait presque peur. Il ne m'apportera rien de bon.



Je passe la journée à la maison. Je prends soin de moi, après tout, il n'y aura que des hommes d'affaire, c'est peut-être une opportunité de me faire des contacts.

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J'enfile la robe, les talons, je n'ai besoin que des mes boucles d'oreilles en diamant. Un coup de parfum « La vie est belle ». Mes cheveux sont attachés en chignon. Je suis maquillée simple mais mes lèvres sont d'un beau rouge matte.



20h : je descends la boule au ventre.



Je suis debout sur le trottoir, les quelques passants me regardent avec de grands yeux admiratifs, je me sens rassurée, je me dis que je ne ferai peut-être pas tâche là-bas.



Sortie de mes pensées, une AUDI R8 s'arrête devant moi, la portière s'ouvre version papillon. Je me baisse et je vois Kader Brahimi au volant. Il me transperce, il me dévore du regard, je m'installe à ces côtés et je ne peux m'empêcher de faire de même.. Il est magnifique.



Il démarre, je l'analyse sans gêne, je peux pas m'en empêcher, mes yeux, mon corps sont attirés par lui..



Il porte un costume noir, une chemise blanche et un noeud papillon noir. Sa barbe est parfaitement taillé, ces cheveux sont coupés plus court sur le bas et plus long sur le haut, un diamant à l'oreille, une grosse montre Cartier, et c'est le regard dur qu'il fixe la route.


Je me décide à en faire de même et ce n'est qu'à ce moment là que je devine qu'il s'est décidé à me regarder, vraiment.

Une danse avec le diableOù les histoires vivent. Découvrez maintenant