Chapitre 43. Trois mois

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T R O I S M O I S P L U S T A R D



Le temps passe et mon corps guéri. Mon coeur lui saigne encore mais ma tête s'interdit d'y penser.

Je vis toujours avec Mourad mais aussi avec Mehdi, Khalil, Yvan et Moussa. Ces fameux amis qui étaient en bas de l'immeuble le jour de mon arrivée. Et bien, vu mes talents de cuisinière, ils sont tous là tout les soirs pour mon plus grand bonheur.

On a appris à vivre ensemble, enfin dans le sens de se construire une petite routine, un petit groupe d'amis. Je me sens bien avec eux et d'autant plus qu'ils ne m'ont jamais posé de question.

Malgré cela, Mourad est d'autant plus protecteur. Lui seul sait que j'ai fui quelqu'un alors il est très attentif et toujours sur ses gardes. Bien-sûr il ne m'a jamais demandé de détails et heureusement, je n'aurai pas pu déballer ma vie, encore une fois.

Je le remercie comme je peux, et j'ai l'impression que c'est jamais assez.



Sara m'a donné de ses nouvelles deux fois :

La première fois, elle me disait qu'il devenait fou et qu'il avait lancé les recherches. Je suis donc restée enfermer les trois premières semaines de mon arrivée à Nice.

La deuxième fois, elle m'a avoué que Meriem, sa femme, était enceinte et donc, il se focalisait là-dessus.. Pour l'instant.

A mes yeux cela signifiait que j'étais libre, complètement libre. Ca voulait aussi dire qu'il m'avait menti jusqu'au bout et même si je n'y croyais pas, une infime partie de moi espérait que tout s'arrange lorsqu'il me disait qu'il règlerait tout ce bordel.

J'ai tout gardé pour moi et la présence des garçons m'aidaient sans qu'ils ne le sachent. Je leur devais tant.

J'ai tenu la promesse que je m'étais faite : garder Jibril loin de moi. Ca a pas été facile mais je lui veux aucun mal, bien au contraire alors c'est mieux ainsi.



J'ai aussi trouvé un travail dans une clinique privée pour enfants atteints du cancer, au département juridique. J'en profite pour passer du temps avec eux, pour leur redonner un petit sourire et pour leur apporter l'attention qu'ils méritent.

Tout se passe bien, je gagne ma vie, je roule en Mercedes 250 AMG classe A et je ne me prive de rien. Et pourtant, une douleur au fond de moi ne cesse d'exister et même loin de lui je réalise que je ne m'y retrouve pas.



Un soir j'en suis même venue à me demander si ça n'aurait pas été mieux d'accepter. D'accepter le rôle de « l'autre femme ». Je souffre alors autant souffrir à ces côtés non?

Voilà, à force de cogiter, j'en venais à me dire ça et au réveil je chassais ces pensées, les trouvant idiotes et malsaines.




Ce matin-là, je me réveille et on est dimanche. Qui dit dimanche, dis aussi mon dernier réveil ici, j'ai trouvé un appartement à deux minutes de la clinique dans une résidence privée. Mourad m'en veut mais je sais que ça lui passera, puis sa petite amie ne voit pas d'un très bon oeil qu'on vive ensemble et je peux le comprendre. Lui non, il dit qu'elle n'a pas son mot à dire mais je sais qu'elle en souffre puis même moi je ne l'ai jamais vraiment rassuré.. Mise à part « salam » on ne se calcule pas du tout.

Les gars eux sont ravis, en plus de l'appartement de Mourad, dont ils ont les clés bien-sûr, il y a mon appartement maintenant et ils ont tous déjà une clé chacun. Je ne sais même pas comment j'ai pu accepté mais j'en souris et j'en suis plutôt contente. Mourad a fait faire un double de chez moi, évidement, comme les autres.



Donc aujourd'hui, dernier petit-déjeuner entre colocataires. Je me dépêche de préparer un petit festin : crêpes, gaufres, croissants, pains au chocolat, tartines, cakes, jus, café, lait.. Enfin bref, la total.


Une fois prêt, je toque et entre dans sa chambre. Pour la première fois, je me rapproche autant de lui, le jour de mon départ. Je m'assieds sur son lit et je lui caresse les cheveux. Il sourit les yeux fermés et quand je retire ma main il me demande de continuer avec une petite voix de bébé.

J'en rigole et continue puis je lui dépose un bisou sur la joue et lui dit de venir manger, que tout est prêt. Je sors de la chambre et il prononce ces quelques mots qui me font m'arrêter net.


Je reste figée sur place, non Mourad, me dit pas ça.

Une danse avec le diableOù les histoires vivent. Découvrez maintenant