CHAPITRE 3
Quatrième jour.
Du blé à perte de vue. Un soleil étouffant. Pas un soupçon de vent, pas même un bruit hormis le son affolé de mes propres battements de cœur. Je cours en traçant des sillons à travers les épis qui me fouettent le visage. Le danger rôde, je peux le sentir, presque le voir. Ma sœur est là quelque part mais elle ne répond pas. Je tourne sur moi-même, tombe, repars de plus belle. Un mouvement sur la droite, je fonce tête baissée. Une douleur fulgurante me traverse de la tête aux pieds ; je sens ces derniers quitter le sol et le temps se suspend alors que je chute. Alors je le vois. Malgré ma vue gênée par l'afflux de sang qui enfle mes paupières, j'en suis certain : c'est lui. L'épouvantail. Il se penche sur moi et me murmure des mots d'excuse. Il me touche de ses doigts de paille puis il s'éloigne. Force toi ! Regarde ! Tournant la tête je vois cet être immonde emporter ma sœur loin de moi. Je tends vainement la main. Un cri guttural voilà tout ce qui sort. Mais cette fois je ne m'évanouis pas. A force de volonté, je me relève et poursuis l'épouvantail. Les épis de blé laissent place à un terrain vague et... personne. Juste un cabanon abîmé par le temps. Hors d'haleine, épuisé, j'avance et pousse la porte entre ouverte. Elle est là. Soulagé, j'approche. C'est là que je remarque le maquillage qui lui donne un aspect étrange ; il y a cette robe en velours aussi... Je tends la main pour la toucher, elle est froide et dure comme la pierre. Alors elle ouvre ses yeux vides de toute existence et j'hurle.
J'ouvre les yeux d'un coup. Je ne saurais dire si j'ai réellement crié ou pas mais il me faut plusieurs secondes pour reprendre pied. Un retour à la réalité difficile. J'observe la chambre comme si je m'apprêtais à voir quelque chose surgir. Pour un peu, je regarderais sous le lit. Mais rien, bien entendu. Mon téléphone continue à jouer de la musique, #1 Crush emplissant la pièce et n'aidant pas à rendre l'atmosphère plus sereine. J'éteins. Mon souffle reprend un rythme normal et je parviens à me lever pour m'habiller. Je n'ai pas envie de rester ici une minute de plus, l'impression de suffoquer me pend encore au nez.
En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, j'ai plié bagage et je me retrouve dehors, clope au bec. Café ! Je me dirige vers le snack-bar d'un pas rapide. Pas de jolies serveuses cette fois-ci mais une vieille à moitié édentée. Je remarque l'horloge au-dessus de la caisse alors que je prends place au comptoir : 6h27.
— La nuit a été difficile on dirait, mon p'ti. Elle me glissa une part de pecan pie. Cadeau de la maison, ça t'fera pas de mal.
Je la remercie, pas certain que mon estomac me permettra d'avaler quoique ce soit de solide. Je m'enfile un premier café et tout compte fait, la tarte me fait envie. Je la dévore avec un second café avant de partir en demandant le meilleur itinéraire pour Chicago. Je n'irais pas jusque-là bas mais la ville où on avait retrouvé la deuxième gamine était sur la même route.
17 heures le même jour, je sors de chez le légiste dans la banlieue de Napperville. Je n'ai obtenu que des confirmations : violée pendant sa période d'enlèvement donc par le tueur, mais aussi violée bien avant. Il en est certain car certaines cicatrices anales sont plus anciennes ; la police enquête à ce propos, tant mieux. Elle a été tuée avec des barbituriques – ce qui laisse supposer que Jennifer aussi. Aucune empreinte ou trace ADN : il a tout nettoyé consciencieusement, puis il l'a habillée et maquillée comme une poupée avant d'abandonner le corps. Les animaux y ont à peine touché, certainement à cause des saloperies encore présentes dans son organisme. Vu qu'elle n'a pas été traitée comme la précédente, j'ai voulu savoir si le légiste avait pu retrouver quelque chose dans son estomac mais impossible. Dommage. Une fois j'avais résolu une affaire grâce à ce que la victime avait diné. Là, ce ne serait pas si simple. Sur ma faim, j'ai décidé d'aller voir l'endroit où on l'avait retrouvée. Après tout, le tueur n'a pas dû choisir ce lieu au hasard. Il n'avait pas l'air de faire quoique ce soit sans fichue raison.
VOUS LISEZ
The scar
Mystère / ThrillerLorsqu'il avait 10 ans, Jeremiah a coupé à travers champs pour rejoindre sa soeur qui rentrait de la danse. Seulement elle n'était pas seule. Il n'a pas eu le temps de voir l'homme avec elle, celui-ci l'a assommé avant d'enlever Delia. On ne l'a jam...