The scar - chapitre 6 (suite)

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— Je dois partir.

— Dommage.

Elle relève la tête vers moi et je ressens encore cette connexion. Ça m'électrise.

— Je ne veux pas qu'on se reperde de vue. Je suis à Desmoines aussi, alors...

— Je suis dans l'annuaire.

Elle sourit. Pas besoin d'en dire plus. Elle se lève et se penche vers moi pour m'embrasser sur la joue, sur ma cicatrice précisément.

— A bientôt, Jeremiah.

Je ne réponds pas, sous le choc de ce geste presque intime. Je la suis du regard tandis qu'elle quitte le Duncan's. Pour la première fois depuis des lustres, je sens son palpitant s'agiter comme un fou...

*

* *

Sur le retour, pour la première fois depuis une décennie, je ne pense pas seulement à ma sœur. Mes pensées vont et viennent entre elle, l'enquête, et Mandy. Je me sens bien crétin de m'intéresser à une femme en ce moment. Surtout à celle-ci. En imaginant qu'il se passe un truc entre nous, ça donnerait quoi, franchement ? Rien de bon. J'en suis certain. Je suis le genre de mec prisonnier d'un passé révolu alors me taper la meilleure amie de ma sœur disparue serait une belle connerie. Pourquoi pas pour un coup d'un soir ? Parce que je ne pense pas que ce soit le genre. Non, en fait je n'en sais rien mais c'est moi, je me vois pas juste la sauter. Ah mais pourquoi je me prends la tête comme une gonzesse !?

Quand j'arrive enfin chez moi, je me prends une pizza à emporter au coin de la rue et je me replonge dans mon dossier. Je vais le connaître par cœur à force mais je suis persuadé qu'il me reste encore à découvrir sur ce type.

Sur un best of des Doors, je mange un peu, je me descends quelques verres, et mon esprit brumeux fait le reste. Je chasse le peu de pensées positives que j'ai, je chasse le sourire de Mandy, je me focalise sur les gamines, sur leurs corps sans vie, leur tenue post-mortem, les actes nécrophiles... Je ne suis pas profiler, je ne pourrais pas vous dire si ce salop a un problème avec sa mère ou s'il a torturé des animaux quand il était gamin, mais je suis persuadé que ce ne sont pas ses premiers crimes. Non, on ne peut pas passer du fantasme à sa réalisation avec autant de savoir-faire et de maîtrise en une seule fois.

— Ok. Tu ne laisses pas d'empreintes. Tu sais qu'elles vont nous mener à toi. Et si t'y fais autant gaffe, c'est que tu t'es déjà fait serrer. Exhibitionnisme ? Non, tu ne veux pas qu'on te mate, ce qui te fait bander c'est que toi, tu puisses mater et jouer. Harcèlement, voyeurisme, agressions sexuelles, ça c'est plus ton truc. Sur mineur avant les enfants ? Possible. Pourquoi que de cette tranche d'âge ?

Je reprends les photos, j'essaie de penser comme un pervers, voir ce qui en ressort. Qu'est-ce qui me ferait bander chez ses gosses ?

— Faciles à amadouer et à maitriser. Mais pas que. Elles sont entre l'enfance et l'adolescence. Pas trop gamines donc mais encore loin d'être femme. Toujours innocentes, pures... Putain, c'est ça !

Je parcours une nouvelle fois mes notes. Carla, il ne l'a pas gardée car elle n'était plus vierge. Jennifer avait 12 ans, il l'a gardée trois ou cinq mois vivante. Pourquoi ? Elle faisait moins que son âge mais elle était déjà une pré ado. Je me creuse la tête. Que faisait ma sœur à cet âge ? Et ses copines ? Je ne suis pas un expert en fille... Mais un souvenir me revient. Une fille au collège, Kimberley ou un nom dans le genre, qui était fière d'être réglée avant ses copines, comme si ça faisait d'elle une femme. Elle se la jouait auprès des autres qui la regardaient comme si c'était une déesse. Et si ça m'a autant marqué c'est parce qu'on avait cours de biologie juste après et que c'était venu aux oreilles de la prof qui nous avait expliqué qu'une fois réglée, une femme pouvait tomber enceinte. J'avais grimacé car pour moi la Kim était toujours une bouffonne.

— Tu n'as plus voulu de la gosse car ce n'en était plus une. Tu n'aimes pas les femmes. Ta sœur ?

Je ne sais pas si je m'égare mais pour aimer les poupées et les filles de cet âge, quelque chose me dit qu'il s'est passé quelque chose avec sa sœur. Abusive ou morte à cet âge, ça pourrait venir de plein de choses. Je note quand même.

— Malika a onze ans. Il lui reste certainement du temps...

J'en frissonne. Je ne peux pas imaginer cette pauvre gamine seule avec ce pervers, terrifiée, meurtrie.

— C'est ça que t'as fait à ma sœur, enfoiré !?

De rage je jette mon verre qui part s'éclater contre le mur. J'ai un trop plein d'horribles visions, j'ai la soudaine impression d'étouffer. Je me rue vers la fenêtre pour l'ouvrir. Le souffle de l'air chaud calme mes frissons. Je prends quelques minutes à essayer de me vider la tête pour finalement choper mes clés, mon portefeuille et sortir. Je ne sais pas encore où je vais mais je ne peux pas rester seul entre ces murs.

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⏰ Dernière mise à jour : Jan 27, 2017 ⏰

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