5.

221 13 4
                                    

Mes fiches à la main, je présente mon émission, la dernière avant les vacances, on a prévu une énorme surprise que j'ai même pas teasé du tout pour que personne ne le sache avant qu'elle n'arrive, seuls les chroniqueurs la connaissent bien sûr mais je leur fais confiance pour rien dire. Je lance la pub et l'un de mes chroniqueurs s'approche de moi et soupire avant de me dire, d'une voix lasse :

- Quelqu'un a cafté la surprise...
- Mais j'en ai même pas parlé !
- Bah alors doit y avoir un problème quelque part à TF1 parce que regarde.

Il me montre son téléphone et j'enrage, c'est la huitième info qu'on nous vole depuis trois semaines. Je vais buter Morandini. Je dis à mon chroniqueur de retourner à sa place pendant que moi je déchire mes fiches des trucs passés pour me défouler un peu, j'en peux plus qu'on me tue autant tout ce que je fais. Mais surtout qui lui donne ça, parce que c'est obligé qu'il y a une taupe dans mes équipes là, parce que c'est pas possible que ça soit juste des suppositions. Je vais les exploser demain pendant la réunion. Je commence à réfléchir plus précisément sur qui ça peut être, mais personne me vient à l'esprit, surtout qui serait assez un enfoiré pour avoir accepté d'être une taupe comme ça ?



Toutes les équipes sont devant moi, je cherche comment dire ça, on a fini tout ce qu'on devait bosser avant et je sais pas quoi faire. Le producteur se lève et vient à côté de moi avant de dire ce à quoi je pensais depuis un moment maintenant :

- Bon, il y a une taupe parmi vous.

Un brouhaha pas possible commence, je les fais tous taire d'un coup avant de dire finalement :

- Et comme vous le savez tous, je suis très nul dans les décisions, alors je vais tous vous demander votre avis sur qui c'est selon vous. La personne que vous choisirez ne sera pas renvoyé du tout, elle finira juste dans mon bureau.

Je vois toutes les équipes regarder les personnes qui l'entourent avec un regard méfiant. Putain, si il y a pas de taupe ici je vais installer une belle ambiance de merde dans mes équipes. Je soupire avant de faire signe à quelqu'un d'apporter l'urne et je dis finalement :

- Vous pouvez écrire un seul nom sur le papier, et voter qu'une seule fois. Sinon votre vote ne sera pas compté. Vous avez des problèmes avec ses règles ?

Je regarde toute l'assemblée avant de dire, après une bonne minute de silence, qu'ils peuvent y aller. Moi je me retourne sur ma droite et je demande au producteur de me suivre avant de me diriger jusqu'à mon bureau où je fais bien attention à avoir fermé la porte avant de me laisser tomber sur le fauteuil derrière mon bureau et de faire signe à Damien de s'asseoir. Il le fait avant de me demander :

- Donc, tu vas parler à personne de ton émission ?
- Oui, c'est pour vérifier si c'est pas quelqu'un en dehors de l'équipe la taupe.
- Donc tu vas devoir bosser chez toi si tu veux que personne ne sache.
- Ouais, c'est rien de toute façon. Mais j'en peux plus de tout ça.
- T'es pas le seul, les directeurs aussi sont en train de chercher si il y a pas d'indic' ailleurs.
- Ils sont pas trop concernés eux non ?
- Si un peu, il y a déjà eu plus de trois trucs qui ont étés annoncés alors que c'était des projets secrets je te rappelle.
- C'est pas faux. On va lui faire quoi à la taupe ?
- C'est aux directeurs de voir ça.

Je laisse ma tête tomber dans un fauteuil avant de soupirer et de finalement dire :

- J'en peux plus...
- Faudrait que tu t'occupes un peu de ton copain aussi, l'oublie pas lui sinon il va se barrer.
- Ouais, c'est pas faux non plus. Merci.
- Pourquoi tu me fais confiance en fait ?
- Parce que toi aussi ça a l'air de te soûler tout ça, personne ne pourrait être comme ça si c'est lui qui donne les réponses aux autres.
- Pas con.

Il se relève et me dit au revoir avant de me laisser réfléchir seul. Mais je pense surtout à Bertrand. C'est vrai que ça fait longtemps que je l'ai pas vu. Je suis trop un copain de merde en fait... J'attrape mon téléphone et l'appelle rapidement, peut-être qu'il bosse en fait, mais c'est quoi son boulot en fin de compte ? Je lui ai jamais demandé. Faudra que je le fasse.



~PDV Extérieur~

Bertrand fait les cents pas devant son patron, il commence à se sentir honteux de trahir Camille comme ça, mais il ne le dit pas à voix haute et écoute à peine les compliments de son boss qui lui dit que c'est la meilleure taupe qu'ils aient eu depuis le début. Pourtant ils en ont eu. Mais finalement, Bertrand le coupe et lui dit, avec aplomb :

- J'arrête tout ça.
- Mais pourquoi ?
- Je vais me faire démasquer et imaginez sa réaction.
- Il sera un peu triste.
- Il sera détruit ! Et j'ai pas envie de lui faire du mal !
- Je peux te poser une question ?
- Allez-y.

Jean-Marc se lève et s'approche de lui avec un fin sourire avant d'avoir un léger rire et lui demander finalement, avec le ton d'une blague :

- Tu serais pas un peu amoureux de lui ?
- Non !
- Bah alors pourquoi tu n'as pas envie de lui faire du mal ?

Bertrand redresse les yeux et plonge son regard dans celui de son boss qui a toujours son fin sourire. Son esprit s'embrume et il cherche une réponse à cette question, parce qu'il doit en donner une. Sauf que Jean-Marc dit finalement :

- Je n'ai rien à dire par rapport à tes sentiments, mais juste pense à ce que tu vas devenir après. Si tu arrêtes de jouer la taupe tu vas retourner aux archives.
- Oui mais... Mais je préfère limite ça a lui faire ce genre de maux là.
- Donc si tu veux, il y a la porte avec les clefs de la salle des archives à côté, c'est à toi de choisir si tu les prends ou pas.

Bertrand suit le regard de son patron avant de se tourner et regarder la porte et les clefs avec une seconde d'interruption entre les deux. Il reste cinq bonnes minutes avant de s'en approcher et de décrocher le trousseau avant de sortir du bureau. Tout en disant à son boss :

- Je peux pas être une merde comme vous. Pas avec lui. Peut-être que vous auriez continué ça à ma place mais moi je suis pas du genre à trahir les gens que j'aime. Alors au revoir.

Il ferme la porte et fait tourner les clefs dans sa main tout en prenant l'ascenseur avec mélancolie. Oui, l'endroit où il va est froid, le temps passe très peu vite et le travail est ennuyeux mais comme il l'a dit, il peut pas oser faire du mal à Camille. Il attrape son téléphone dans sa poche et y jète un coup d'œil, tout les messages sont de lui et il y en a une dizaine, alors un léger sourire étire les lèvres de Bertrand qui lui envoie :

- Je t'aime mon Camille

House Of CradesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant