Vingt-et-unième contact

927 94 35
                                    

Nous nous dirigeâmes vers l'aire de jeux. Fort heureusement, il y avait deux balançoires que les enfants présents n'avaient pas occupées. Je m'étais assis avec prudence sur celle à droite tandis que Sunggyu s'était assis sur l'autre.

"- Donc maintenant, positionne tes mains sur les deux fils à tes côtés. Tiens toi bien."

Je m'exécutai, serrant les fils entre mes mains le plus que je pouvais. En réalité, je ne savais même pas si je devais serrer autant ou si je me tenais bien. C'était assez stressant mais apparemment, Sunggyu n'avait pas l'air inquiet.

"- Recule toujours en te tenant puis mets-toi debout." m'ordonna t-il en faisant l'action.

Je fis de même que lui, puis je le vis se lâcher. Assis sur le siège, il partit alors plus loin, puis revint vers moi.

"- Et tu lâches ! Fais comme moi pour prendre de l'élan."

C'était vrai que les positions des jambes de Sunggyu changeaient régulièrement ce qui me faisait bizarre. Mais bon, il y avait une raison à tout.

Je pris une bouffée d'air, serrant encore plus les cordes entre mes paumes, puis me laissai tomber. Je tendis mes jambes comme l'avait fait Sunggyu, et les pliais quand je partais en arrière. C'était bizarre. Faire de la balançoire, c'était un peu comme faire du bateau-pirate. Sauf que là, c'était moi qui contrôlais mes allers et mes retours. Le paysage changeait régulièrement et je ne pouvais que me baser sur ça pour bien me balancer. En regardant Sunggyu, je me demandais comment il se sentait, lui. Il devait y avoir du vent qui caressait sa peau, et la sensation devait être agréable. Ce que moi, je ne ressentais pas. Mais je n'étais plus aussi triste qu'avant en réalisant ces faits. Parce que maintenant, Sunggyu était là pour me faire ressentir tous les sentiments possibles...

Il avait arrêté de faire de la balançoire, puis se plaça derrière moi.

"- Je vais t'aider à prendre de l'élan."

Je sentis alors quelque chose me pousser plus fort, car ce n'était plus moi qui contrôlais la balançoire. Ça devait être Sunggyu. C'était dommage que je ne ressente pas son toucher quand j'étais habillé. J'aimerais bien le sentir aussi sur toutes les parties de mon corps, et pas uniquement sur les parties nues. Malheureusement, ce n'était pas possible.

Je me fis gentiment pousser par Sunggyu, les nuages se rapprochant et s'éloignant à chaque fois. C'était agréable, en fait. Contrairement au bateau-pirate, ça ne me donnait pas envie de vomir. Ça me faisait sentir plus libre. C'était vraiment doux comme sensation. J'aimais bien faire de la balançoire. Si je n'avais pas été anesthésique au toucher, je pensai que durant mon enfance je n'aurais fait que de la balançoire.

"Tu es devenu insensible au toucher à l'âge de 5 ans..."

Non. En fait, j'avais oublié, mais peut-être que quand j'étais encore capable de ressentir le toucher, j'aimais faire de la balançoire. Je devais sûrement profiter de toutes ces sensations sans m'en rendre compte. Le fait de pouvoir marcher sans faire attention à ou placer chaque pas, le fait de pouvoir sentir la matière des vêtements sur la peau, le fait de pouvoir sentir le contact avec les autres... Le monde dans lequel je vivais devait être si beau...

Mais maintenant, je n'étais plus capable de ressentir tout ça. Je ne savais pas quelle texture avait les fils auxquels je me tenais durement. Je ne savais pas quelle sensation le vent procurait sur la peau. Je ne savais plus à quoi ressemblait une vie normale où l'on pouvait tout ressentir...

"- Alors ? C'est amusant ?" me demanda t-il.

... Non, je ne devais pas me dire ça. J'avais Sunggyu avec moi maintenant. Il pouvait me faire ressentir toutes les sensations que j'avais perdues... Je lui en étais vraiment reconnaissant.

ContactOù les histoires vivent. Découvrez maintenant