Salut toi. Je ne te demande pas si ça va, je connais déjà la réponse. Evidemment que tu vas bien. Tu te nourris de mon malheur, et de mes derniers souffles. Je me demande comment j'arrive encore à vouloir te parler sachant tout ce que tu m'as fais. Tu m'as utilisé, menti, et affaiblie jusqu'au point de non retour. Et le point de non retour, pour moi, c'est maintenant, je
le sais, je le sens. Tu me diras, pourquoi perds-tu tes derniers instants, pourquoi gaspilles
-tu tes dernières forces pour parler à celui qui t'as fait du mal, celui qui t'as peu à peu ôté la vie ?
Je ne sais pas. Je ne sais pas, mais il faut que je le fasse, il faut que je te dise tout ce que j'ai enduré par ta faute. Tu étais si... Minuscule, invisible, insignifiant à mes yeux, alors comment expliquer que tu ai pris tantd'importance en si peu de temps ?
Avant ces derniers mois, tu m'étais totalement étranger. Tu n'existais que chez les autres. Je regardais les personnes sous ton emprise avec au pire de la pitié, au mieux de la compassion. Comment aurais-je pu deviner que ces regards, j'allais les endurer, de plus en plus insistants, de plus en plus empreints d'un malaise qui ne disparaitra jamais.
Avant, quand on me regardait, on voyait tout de suite mon sourire, mes cheveux volants au vent, mes yeux pétillants. Je ne sais pas si j'etais belle, mais je sais au moins que j'étais heureuse. Tu m'as enlevé tout ça. Tu as commencé par mes cheveux, puis par mon sourire, et tu as finis par m'ôter cette étincelle d'espoir qui vivait toujours dans mes pupilles.
Aujourd'hui je ne suis rien, et tu es tout.
Tu m'as dominé, tu m'as ôté ce que j'avais de plus cher pour continuer à grandir et à prospérer, dans un espace qui n'est pas le tien. Je te hais, mais ça ne change rien, car au fond, tu as déjà gagné. Tu gagnes presque toujours. C'est le secret de ta force. Tu es petit, vicieux, tu t'insinues partout où tu trouves encore de la vie.
Mais de la vie, il n'y en a plus en moi. Je suis vidée, sur le fil. Je n'attend plus que de basculer dans ce noir qui me semble si rassurant, comparé à ce monde où tu domines en maître.
Je suis si fatiguée... Par ta faute. J'espère m'endormir une bonne fois pour toute, pour enfin me retrouver dans un monde où tu n'existes pas. N'importe où, juste sans toi. Sans toi...
Et le pire, tu sais ce que c'est ? C'est que tu n'existes même pas.
Adieu, CBIP BIP BIP BIP
Dans son lit d'hôpital, la petite Elisa est morte, les yeux fermés, l'air apaisée. Sa tête repose sur une pile d'oreillers, comme si elle dormait. Dans sa minuscule main gauche, rachitique, se trouve une lettre.
Cette lettre, vous venez de la lire, et elle est pour toi, C.
C, c'est un joli surnom, hein Cancer ?
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Une plume pour deux
Short StoryPlusieurs petits textes assez mélancoliques, sur des thèmes différents.