Une plume pour deux

Comme un ange

Maman, c'est pour toi que je fais tout ça, tu sais. C'est pour toi que je m'efforce à devenir parfaite. Pour te rendre fière, pour que tu rendes compte que ta fille n'est pas qu'une moins que rien.
Je voudrais, non, je rêverais que tu me vois telle que je suis véritablement, avec mes envies, mes rêves, mes doutes et mes peurs. Mais je crois que tu n'y arrives pas. Cela dis, je te comprends, c'est difficile de voir plus loin que... Cette chose qui me sert de corps. Tout est trop mou, trop gros, trop encombrant. Je sais que tu voudrais me comprendre, mais tes efforts sont réduit à néant dès que tu me regarde.
Alors j'ai voulu t'aider à ma manière. J'ai commencé à moins manger, en pensant que tu allais le remarquer et me féliciter. Mais non, rien. J'ai alors pensé que ce n'étais pas assez, pas suffisant. J'ai commencé à faire du sport, 1 fois, 2 fois, 3 fois par jour. Mais tu ne voyais toujours rien. Tu m'as toujours dis que si j'étais un ange, je ne pourrais jamais m'envoler parce que j'étais trop lourde pour ça. Je voulais m'envoler, m'élever dans les airs avec cette légèreté et cette aisance que je t'enviais tellement. Je voulais te rejoindre, être ton égal.
Alors j'ai commencé à vomir. Ça non plus, tu ne l'as pas remarqué, mais tu étais bien la seule. Tout le monde s'inquiétait pour moi. J'étais devenue maigre, si légère qu'une simple bourrasque de vent m'aurait envoyé sur la Lune. Mais moi, je ne voyais pas ma maigreur, je refusais de la voir. Je ne voyais que tes yeux indifférents.
Alors un jour, je me suis dis que la seule façon pour que tu me remarque enfin soit de devenir véritablement un ange.
Et c'est ce que j'ai fais. J'espère que je pourrais enfin te rejoindre, maman, j'espère que tu me verras enfin, maman.
Si tu lis cette lettre, c'est qu'enfin tu m'auras vu telle que je suis devenue, tu auras compris tout ce que j'ai fais pour que tu sois fière.

Tout ça, je l'ai fais pour toi, maman.