Sur un bout de chemin détrempé, au bord de l'autoroute, une petite ombre se balance. Ses chaussures font un drôle de bruit de ventouse lorsqu'elles entrent et sortent d'une flaque. Des mains se balancent en rythme, se réfugiant parfois dans la tiédeur des poches d'une veste.
Une grande écharpe protège du mieux qu'elle peut une paire d'oreille et un cou frêle. Enfin, s'extripant à grand peine de l'écharpe, une touffe de cheveux roux tombent en cascade, rappelant les feuilles d'automne.
Cette ombre a tout d'un corps normal, et a un prénom, mais elle n'est pour l'instant pas disposé à nous le donner.
Car cette ombre n'est pas sereine. Les bruits de ventouse deviennent plus rapides, les mains ne quittent plus les poches et la tête s'enfonce presque totalement dans la grosse écharpe.
De dos, elle n'exprime rien d'autre que la peur, et peut être aussi l'envie de rentrer chez soit. Mais de face, c'est un autre tableau : les petites mains tremblent de froid, les lèvres sont bleuies, le nez rouge et deux minuscules larmes perlent au coin d'yeux très sombres.
L'ombre a froid, et son inquiétude est visible.
Heureusement, après quelques pas, une lumière vive vient l'éblouir. Une petite maison, comme apparue par magie, se dressait devant elle. Face à toute cette lumière, l'ombre devint une vraie personne, une petite silhouette rousse transie par le froid de novembre. La porte de la maison s'ouvrit, une autre personne apparut, plus grande, plus forte, plus solide.
- RUBY !
C'est une voix d'homme.
L'ombre s'appelle donc Ruby, et elle saute dans les bras de l'homme.
La porte de la maison se referme, et tout redevient sombre.
Par la fenêtre on appercoit une table, un repas, et autour sont assis Ruby, et ses parents.
Une scène pourtant simple mais qui vaut la peine d'être vue.Demandez vous donc ceci :
Vous qui passez en voiture, qu'auriez vous vu de cette ombre ? Rien, à part peut être le dessin incertain d'une silhouette. Humaine ? Animale ? La question vous effleurera sans doute une seconde. Puis elle repartira et cette ombre disparaitra, comme engloutie par le béton. Vos phares éclairent la route, vous guident à travers la pénombre.
Mais si pour mieux voir, il fallait éteindre la lumière ?
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Une plume pour deux
Short StoryPlusieurs petits textes assez mélancoliques, sur des thèmes différents.