Chapitre 10 : Méfiances

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Cassandra

Je ne sais pas pourquoi je suis aussi nerveuse. La perspective de manger et discuter avec une autre personne que l'un de mes amis me fait autant d'effet que d'aller faire un entretient d'embauche. "Détends toi, Cassie, si tu as survécu à une chanson devant un foule d'ados inconnus, tu survivras à ça". Je me rends au réfectoire, et je me jure de trouver une solution face au stress qui m'envahit à n'importe quelle situation inhabituelle. C'est que ça devient handicapant.

Je jette un œil sur les tables, et je l'aperçois assise avec quelques personnes. J'hésite une seconde, mais je me souviens qu'elle a accepté de déjeuner avec moi, que ce n'est pas un rêve et qu'après tout il faut bien se décider un jour à sociabiliser. Quand j'avance vers la table, je me sens observée. Je me rends compte que des regards se retournent sur mon passage et que certains me fixent longuement, avant de se tourner et de murmurer des choses à leurs amis. Je commence à perdre toute ma détermination quand la fille vient à ma rencontre et m'entraîne par le bras, comme si nous étions amies de longue date.

"- Assiez-toi avec nous, on t'a laissé une place.

Il y a effectivement une chaise vide, visiblement en face de la fille.

- On t'as même attendue pour manger! Poursuit-elle avec entrain.

Je lui souris, et je m'installe au milieux des quatre personnes présentes. Ce ne sont que des filles, à l'exception d'un garçon au cheveux bleus qui a l'air d'être l'homme le plus heureux du monde. La fille reprends.

- Je te présente Sophia, Elie, Michael, et moi c'est Ana. Bienvenue dans notre groupe!"

Ils me sourient d'un air accueillant. Ils ont l'air sincèrement heureux de me rencontrer. Face à ça, je ne peux faire qu'une chose, leur renvoyer un sourire éclatant.

Après avoir discuté pendant une bonne heure, je commence à les cerner un peu mieux.

Sophia est une fille grande, très calme et magnifique. Ses longues tresses blanches contrastent avec sa peau ébène. Elle est agréable avec tout le monde, passe son temps à aider les autres et on dirait qu'elle connaît tout. Sa culture générale m'impressionne et j'en viens à penser qu'elle se serait bien entendue avec Valentin, avant de me renfrogner et de me convaincre de penser à autre chose.

Elie a de grandes tresses blondes qui lui descendent jusqu'aux fesses. Elle est timide et quand elle me parle, elle rougit comme si elle avait honte de ce qu'elle disait. J'ai tout de suite de la sympathie pour elle, car son caractère ressemble parfaitement au mien.

"Il y a certaines circonstances ou Elie se déchaîne" m'avait avoué plus tard Ana. J'avait eu beau lui supplier de me le dire, elle a refusé en m'informant que je m'en rendrais compte de moi même.

Pour finir, Michaël, ou Mich, comme il veut qu'on l'appelle, est tout simplement quelqu'un de génial. Il me parle comme si on se connaissait depuis longtemps, et son aisance me met un peu mal à l'aise, même si j'adore son entrain et sa joie de vivre. Je donnerais n'importe quoi pour être aussi bien dans ma peau et heureuse.

Après avoir passé un si bon moment avec eux, je dois finalement retourner en cours. Ana me raccompagne, et je me rends compte que des gens sont de nouveaux en train de me fixer. Je lui fait part de mon malaise à Ana et elle me répond, le plus naturellement du monde :

"Ils t'ont entendue chanter. Ceux qui n'étaient pas à la soirée on dû te voir sur des vidéos. Tu as eu beaucoup de succès, tu t'en serais rendue compte si tu ne t'étais pas évanouie!"

Elle me fait un clin d'œil, et elle file en me laissant son numéro, m'invitant à les rejoindre en fin de soirée. Je reste cinq minutes immobile, abasourdie par la remarque d'Ana. Puis, je reprends mes esprits, et je rejoins ma salle de cours.


Valentin

Helena a eu beau envoyer des millions de messages à Cassie, elle ne réponds pas. On a essayé de lui parler après les cours, mais elle filait à une vitesse telle qu'il nous était impossible de lui parler. On a bien dû se rendre à l'évidence : elle nous évite.

"- Je comprends pas! A explosé Helena, au bout d'une heure d'attente. C'est vrai, merde, je comprends qu'elle t'en veuille, mais moi j'ai été là pour elle, je l'ai aidée, j'ai rien fais de mal!

- Elle t'évite peut-être juste parce que tu me parles.

- Oui mais c'est injuste."

A force d'attendre, Elle avait fini par avoir faim et était allée s'acheter un beignet. Elle le grignotait à présent, petit bout par petit bout, et lançait des coups de pieds rageurs aux cailloux et pigeons qui avaient le malheur de se trouver sur son chemin. Je commençais à en  avoir assez de patienter, et à avoir faim, moi aussi. Je doutais fortement de l'intérêt d'attendre aussi longtemps pour elle, et je me suis souvenu à quel point elle avait souffert par ma faute. Décidément, je ne pouvais pas abandonner.

"- On a qu'à aller voir chez elle.

Helena me regardait, médusée.

- Pardon?

J'ai repris, plus sûr que jamais.

- C'est vrai, si Cassandra est quelque part, c'est chez elle, et puis si elle y est pas, on aura qu'à l'attendre, elle finira bien par revenir. Je vois pas pourquoi on irait chercher plus compliqué."

Je me suis tourné vers Helena, bien décidé à changer quelque chose à cette situation qui commençait un peu à tourner en rond, et elle a été forcée d'admettre que je n'avais pas tort. Elle a donc essuyé les miettes de beignets de son pantalon, et on s'est mis en route.


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