Don't stop

Chapitre 14

  Tia

  Je poussais cette porte, pour la quatrième fois de la journée, puis pénétrais dans cet endroit à la fois chaud et apaisant.

- Tia?

- Oui?

- Tu peux retourner la pancarte s'il-te plaît? me demanda Sharron.

- Bien-sûr.

  Je montais les escaliers, et observais pour la seconde fois l'immense mezzanine qui servait de coin de détente. Elle était aussi grande que l'étage du dessous et possédait elle aussi des étagères remplies de livres.

- Pourquoi la mezzanine ne fait pas partie du magasin? demandais-je à Sharron en ôtant mes baskets.

- Parce qu'à l'époque, quand j'avais ouvert la librairie, je ne pensais pas qu'elle allait être si grande et quand j'avais déballé tout les cartons et ranger tous les livres, il n'y en avait pas assez pour les deux étages alors j'ai décidé de faire de la mezzanine un coin privé.

  J'hochais lentement la tête de haut en bas, en signe de compréhension et m'avançais au milieu de la pièce où résidait une grande surface rectangle en contrebas, ouverte sur trois marches d'escalier. Je descendis ces marches et posais sur la table, placée au centre, les sacs, composés de tacos, de frites, d'un gâteau et de quelques boissons, que Sharon m'avait gentiment demandé d'aller acheter. Elle m'avait donné un gros billet et m'avait chargé d'aller acheter le dîner. Peu importait ce que je prenais, tant que j'en prenais quatre.

- Tiens, dis-je en lui tendant son billet.

- Tia...

- Nan. C'est moi qui paye! dis-je malicieusement en mettant l'argent dans la poche de son jean.

  Je m'assis sur l'une des trois partie du canapé gris, plus précisément sur la plus large, celle en face des petites marches. Wyatt lâcha sa voiture en plastique et me monta dessus. Il se mit à cheval sur mes cuisses et entoura ses petits bras autour de mon cou. Je sentis le regard de Sharon posé sur moi mais continuais de fixer au loin quand j'entendis la porte s'ouvrir puis se refermer. Les pas, légers, se rapprochaient assez vite. Je lançais un regard interrogateur à Sharon.

- J... j'ai retourné la panneau, pourquoi...

- Salut, fit une voix d'homme assez rauque.

- Evan! dit Wyatt en descendant de mes cuisses.

  Il courut jusqu'au dénommé "Evan" qui le souleva sans aucun effort et fis un tour sur lui. Les rires de Wyatt me firent légèrement sourire. Ça me faisait tellement penser à Kathleen. A sa famille. Et à la mienne...

- Oh, une nouvelle privilégiée?

  Privilégiée?

- Ouais, fit Sharon en souriant. Elle s'appelle Tia.

  Il m'adressa un sourire en coin, narquois, le même que celui qu'il m'avait fait quand on s'était rentré dedans.

- Evan.

  Je plissais les lèvres tandis qu'il posait Wyatt à terre qui vint s'asseoir près de sa mère. Sharon nous tendis un tacos chacun. Je coupais le mien en deux.

- Qu'est-ce que tu fais? demanda t-elle.

- Je ne finis pas tout.

  Elle me regarda, interdite.

- Tu es sûre? Tu n'es pas malade?

- Non non, c'est que j'ai du mal à finir un tacos en entier, je sais qu'à la moitié je n'en voudrais plus.

  Elle me souria en hochant la tête. Ça me touchait qu'un personne autre que mes proches s'inquiétait pour moi, ça produisait un sentiment de chaleur, un sentiment de bien-être, j'avais l'impression de compter, d'exister. Auparavant je ne m'étais jamais souciée des autres mais aujourd'hui je n'y arrivais plus. Je m'étais attachée à Wyatt, à Sharon puis à Megan. Megan... Je n'aurais jamais pensé pouvoir un jour être amie avec quelqu'un de superficiel qui dévoile toute sa vie sans problème, qui n'a aucun secret. Mais c'était ça qui m'avait pris au piège. Ses paroles. Elle avait la faculté de merveilleusement bien raconter les choses, et ça avait influencé mes sentiments envers elle. Beaucoup plus que je ne le pensais. Chaque jour que nous passions ensemble nous rapprochait de plus en plus. Ça devrait être bien... pourtant ça me faisait peur, ça m'effrayait et ça me hantait. J'avais peur qu'elle ne soit pas sincère envers moi, qu'elle m'utilise pour une quelconque raison, ou qu'elle fasse ça pour me blesser... mais il fallait que j'arrête d'être paranoïaque et que je m'ouvre au monde.

- Tia?

  Une main faisait des aller-retours devant mon visage. Je repris mes esprits et tournais ma tête vers Sharon qui me regardait, inquiète.

- Ça va? Tu m'as l'air un peu...

- Non non, ça va, dis-je légèrement gênée.

  Je finis la dernière bouchée qu'il me restait et bu quelques gorgées de soda. Evan alluma la télé, zappa les chaînes jusqu'à ce qu'il tombe sur un film d'action. Sharon me dit de m'installer à côté d'Evan, sur le canapé en face de la télé. Plus les minutes passaient, plus je me sentais faiblir. Pour la première fois de ma vie j'avais sommeil, je dirais même très sommeil. Malgré la fatigue, je fixais le personnage principal qui entrait dans un long couloir sombre. Tandis qu'il avançait, les petites lumières qui longeaient les murs s'affaiblirent et puis d'un coup, plus rien.
  J'entrouvris les yeux, petit à petit j'arrivais à distinguer nettement la télé. Je bougeais difficilement la tête et me redressais en la tapotant du bas de la paume, j'avais si mal à la tête que mon corps voulait de nouveau s'écraser sur le canapé.

- Bien dormi?

  Evan se trouvait juste à ma droite, un mince sourire aux lèvres.

- Euh... il est quel heure? demandais-je.

  Il jeta un coup d'oeil à son téléphone.

- 22h34.

  Mes yeux s'écarquillèrent.

- Sharon est partie vers 21 heures et quart parce Wyatt s'est endormi.

- Pourquoi tu m'as pas réveillé?

- T'avais l'air d'apprécier mon épaule.

- "J'avais l'air d'apprécier" ne veut pas dire que j'ai apprécié, dis-je sur un ton hautain en me levant.

  Il haussa les épaules, se leva à son tour, empoignant les clés posées sur la table et ouvrit la porte située à l'étage. Il ferma celle-ci à double tour et on descendit les escaliers qui donnaient sur la rue principale, où se trouvait l'entrée. Je fis volte-face, manquant de peu de me prendre Evan en pleine face.

- Désolé de t'avoir fait perdre ton temps, dis-je franchement avant de tourner les talons et m'en aller dans la direction de chez moi.

- Je te raccompagne, répondit-il en marchant à mes côtés.

- Nan ça va aller, je ne veux pas te faire perdre encore plus de temps. Bye.

  J'avançais quelques mètres puis me retournais.

- Ne t'avise pas de me suivre!

  Je courais sans m'arrêter. Même si je n'avais peur ni du noir ni de la nuit, je courais. Pour le fuir.

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Pourquoi Tia fuit-elle Evan alors qu'il est si gentil avec elle?
Pourquoi est-elle aussi distante?

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