Wattpad Originale
Il reste 11 chapitres gratuits

2 Avait-elle verrouillé la porte ?

7.4K 727 118
                                    

Musique en média : Empire of the Sun - We are the people

- Les commentaires et les avis sont plus que bienvenus :) -



L'éclairage de la salle d'eau était sourd et Faustine se demandait comment la mère de Raph faisait pour se maquiller correctement. En outre, le miroir de taille moyenne était placé beaucoup trop en hauteur.

Vraiment pas pratique.

Tout en sautillant pour voir un peu mieux le dos de sa robe, Faustine essayait sans succès de se souvenir de la taille que faisait Raph, l'hôte de la fête. Mais elle n'arrivait pas à se rappeler s'il était grand ou pas.

De toute façon, ça n'aurait rien changé au fait qu'elle était incapable de voir les tâches dans son dos, même en sautant.

À court de solutions, elle dézippa sa robe et fit passer le tissu par-dessus sa tête. Elle mouilla un bout de serviette sous le robinet, elle entreprit d'estomper les tâches de terre qu'elle n'avait pas pu atteindre.

Le but de l'exercice était de ne pas penser au taré, alors bien entendu, elle n'arrêtait pas d'y penser. À lui et au fait qu'il serait furieux quand il comprendrait qu'elle l'avait bloqué. Parce qu'elle était sûre qu'il s'en rendrait compte.

Alors qu'elle frottait sa robe avec un peu plus d'énergie que nécessaire et endommageait ainsi le tissu, un doute atroce grandit dans son esprit.

Avait-elle verrouillé la porte de la salle de bain ?

Sa certitude inébranlable d'être en sécurité s'amenuisait de seconde en seconde. Jusqu'au moment où, n'y tenant plus, elle se redressa avec raideur pour vérifier.

Elle parcourut les quelques mètres la séparant de la porte avec l'effroyable sentiment qu'il se tenait derrière et allait subitement entrer. Or, c'est bien souvent quand on pense à un malheur qu'il se produit.

Faustine approchait une main tremblante de la poignée pour vérifier que tout était bien fermé lorsque celle-ci bougea. La jeune fille fit un bond en arrière, étouffant un cri silencieux alors que l'anse en métal se mettait à aller et venir nerveusement.

Après un moment, elle réalisa que la porte ne s'ouvrirait pas. Fébrile, elle se plaqua contre le mur et ferma fort les yeux. Elle passa une main sur son visage et se força à respirer de nouveau tandis que la poignée continuait de bouger par à-coups de plus en plus frénétiques.

Il y avait quelqu'un, de l'autre côté du battant, qui voulait entrer. Ardemment. Pourquoi la personne derrière la porte ne disait rien ? Les gens parlaient d'habitude lorsqu'ils voulaient entrer dans une pièce fermée.

Les gens oui, mais pas lui.

Elle essaya d'ignorer le bruit angoissant que faisait la poignée et que la sono poussée à fond ne couvrait pas tout à fait. Et puis soudain, ce fut le silence. La musique battait toujours l'air, mais les soubresauts de la poignée avaient cessé. Faustine rouvrit lentement les yeux et étudia la porte.

Tout avait l'air d'aller bie- son sang se glaça.

Là, par terre, glissé par l'interstice sous la porte, un petit rectangle blanc lui faisait méchamment de l'œil.

— À ce petit jeu, tu ne gagneras pas. Ouvre, avant que je sois vraiment en colère. —

Incapable de contrôler le tremblement de ses doigts, Faustine parcourut de nouveau l'écriture manuscrite. Merde. Elle était trop jeune pour mourir. Elle n'avait jamais rien fait de mal, pourquoi ça lui tombait dessus, à elle ?

Elle savait qu'elle n'aurait pas dû le bloquer. Il allait passer à la vitesse supérieure et elle se retrouverait dans la rubrique faits divers d'un torchon sans morale.

C'était en train d'arriver.

C'était vraiment en train d'arriver.

Faustine avait tellement la trouille, enfermée toute seule dans cette salle de bain à l'éclairage minable qu'elle envisagea un instant d'ouvrir la porte pour en finir. Mais au dernier moment, le bon sens refit surface. Prenant conscience qu'elle était toujours en sous-vêtements, elle courut remettre sa robe. Si elle mourait ce soir, ce serait dans une tenue décente.

Ou pas.

Elle grimaça en réalisant que cette robe était loin de correspondre à l'image qu'elle voulait laisser d'elle-même au monde. Elle n'avait pas grand-chose d'une bimbo fêtarde, elle avait juste profité de l'absence de ses parents pour bêtement suivre Sandra. Comme elle n'avait que cette robe, elle se résigna. C'était toujours mieux que d'être à moitié à poil.

Elle dut s'y reprendre à trois fois. En fait, elle s'acharnait toujours à faire glisser la fermeture éclair lorsqu'une volée de coups s'abattit sur la porte. Livide, elle s'immobilisa dans une position grotesque.

« Faustiiiiine, t'es là-dedans ? » appela une voix étouffée par la musique.

En dépit du capharnaüm, elle aurait reconnu cette voix geignarde entre mille et se sentit reprendre vie. Elle se précipita sur la porte, tomba dans les bras de Sandra... et ne tarda pas à réaliser son erreur.

« Dis-moi que tu n'es pas couverte de vomi s'il te plaît... »

Cette soirée était un désastre total.

Alors que Faustine aidait la blonde à se tenir debout, elles partirent en quête d'une bonne âme qui accepterait de les ramener. Avec un détraqué dans la nature, elle refusait de marcher dans les rues la nuit.

Alors que les deux filles se faisaient reconduire, bien au chaud dans l'habitacle du véhicule, bercées par le ronronnement du moteur, Faustine songea qu'elle s'était peut-être un peu emballée en imaginant sa mort imminente.

L'alcool avait tendance à la rendre plus paranoïaque que nécessaire.

Oui, c'était sans doute ça.

Sauf qu'elle tenait toujours le morceau de papier blanc à la main et que les mots refusaient de changer quand bien même elle les fixait avec insistance.  

La part du LoupOù les histoires vivent. Découvrez maintenant