II
Munich juin 1932
Je pense que sans cet officier, je n'aurais plus jamais revu l'intérieur de ma maison. Mais j'y suis maintenant, et en un morceau.
Il fait encore froid. L'été vient à peine d'arriver, mais les nuits, restent fraîches.
Je n'ose pas enlever mon châle, la pudeur que j'ai éprouvé face à ce soldat tarde à disparaitre.
Il était grand, intimidant et froid.
Pourtant, je l'ai senti comme gêné de me voir. Sur son visage rigide, c'est dessiné un sourire, quand je passais le portail qui menait à la cour.
Plus j'y pense, plus je le trouve étrangement attirant. Je peux me rappeler de chaque détail, ses yeux, bleus, ses cheveux, blonds. Une allure de militaire, rasé de près, le torse bombé et droit.
Il dégageait quelque chose, un charme, à la fois mystérieux et délicat. Sa dureté c'est comme affaiblit dès qu'il se mit à me parler. Je trouve ça amusant, qu'un homme, un soldat, puissent être intimidé face à une femme.
Je sourie à cette pensée et me regarde dans le miroir, accroché au mur en face de moi.
Je m'assieds sur le petit tabouret placé devant et commence à détacher mon collier pour le déposer sur la commode.
C'était un cadeau de ma mère, une fine chaîne au bout de laquelle est accroché un pendentif, une étoile de David.
Mes parents étaient croyants. Je ne le suis pas, plus. Avec le temps, en grandissant, je m'étais vite aperçu que tout ça, ce n'était pas la réalité. Alors oui, évidemment, quelque fois, quand rien n'allait, je m'en referais à dieu. Il a des choses que l'on ne peut pas contrôler, régler, et je dirais que c'est dans la nature humaine, d'espérer en l'existence d'une entité supérieure et ultime.
Bon, il se fait tard. Je jette un dernier coup d'œil à ma montre et me dirige vers le lit. Je me déshabille pour me mettre en chemise de nuit.
Après avoir placé une bouillote au bas du lit, je me glisse sous mes draps et couvertures en prenant soins d'éteindre la lampe de chevet.
Je reste un moment, allongée, à fixer le plafond noir, incapable de trouver le sommeil.
Je ne peux m'empêcher de penser à ce soldat.
Finalement le fatigue de cette longue journée l'emporte et je me laisse lentement tombée dans les bras de Morphée.
⁂
La nuit a été courte, et me préparer ce matin a été difficile. Mes yeux sont rouge, et ma peau terne. J'ai passé un bon quart d'heure à arranger et camoufler tout ça.
Des bruits venant de la porte d'entrée me font sursauter et je manque de me crever un œil avec ma brosse à cheveux. Afin de ne pas aller ouvrir en présentant une mine trop affreuse je me regarde une dernière fois dans la glace. Je ne suis pas coiffée, mais ça suffira.
Je cours jusqu'à l'entrée et tourne doucement la serrure.
Je tire la porte vers moi et penche la tête vers l'extérieur.
Mon regarde se pose d'abord au sol et je remonte rapidement au visage de mon visiteur.
- Le portail était ouvert, je me suis permis d'entré. Déclare ce dernier.
Je restais sans voix. C'était l'officier de la nuit dernière. Je me décide finalement à répondre :
- Co-comment m'avez-vous retrouvée ? L'immeuble est grand...je...
- Les noms sont écrits sur les portes vous savez.
- Mais je ne vous ai pas dit mon nom enfin je cro...
- Vous êtes la seule femme à habiter seule ici.
Il n'était plus en uniforme. Il n'était vêtu que d'une chemise, et d'un pantalon auxquelles étaient accrochées des bretelles. On pouvait encore deviner qu'il faisait partie d'une quelconque force de l'ordre à l'arme accrochée à sa ceinture. Bien que ce soit désormais courant dans les rues.
- Que...pourq...que...
Je ne sais soudainement plus comment parler correctement. Et cela semble l'amuser.
- Que faites-vous là ?
Il penche la tête et regarde ses chaussures, il a l'air d'hésiter. Il met ses mains dans ses poches en fronçant légèrement les sourcils.
- Je voulais vous revoir.
- Me revoir ?
- Oui, pour m'assurer que tout allait bien pour vous, après ce qui vous est arrivé hier soir.
- Je vais mieux, merci. Dis-je platement.
J'étais partagé entre un certain plaisir de le voir ici, et la peur de voir qu'il avait été capable de me retrouver.
Après tout, c'était un homme qui visiblement se promenait dans un bordel, et qui m'a suivi jusque chez moi.
Il est toujours là et ne semble pas avoir l'intention de s'en aller.
- Vous allez quelque part peut-être ? Vous avez l'air pressée. Me demande-t-il, ayant donc remarqué ma nervosité.
- À vrai dire oui, je contais aller au marché mai...
- Laissez-moi vous accompagner ! Lance-t-il.
- Ne vous embêtez pas pour moi.
- Non au contraire Mademoiselle ! J'en serais ravi !
Il s'efforce de lâcher son plus beau sourire, et je cède.
- Bien, laisser moi quelques instants, j'arrive.
Il acquiesce et va s'assoir sur le muret qui se dressait face à ma porte, à l'ange de la cour intérieur.
Je me précipite dans ma salle de bain. Tout cela m'avait fait oublié l'état de ma coiffure. Faute de temps, je me remonte les cheveux en chignon, chose que je fais rarement.
Je prends un sac au hasard sur l'épaule et me dirige vers la sortie pour le rejoindre.
Il est toujours là, assis, à m'attendre sagement, les mains dans les poches de son pantalon.
Je ferme la porte à clé, et je pars vers le portail.
Me voyant partir, il m'emboite le pas, et vient se mettre à ma gauche, les mains toujours au fond de ses poches.
- Belle journée vous ne trouvez pas ?
Et voilà que maintenant, il se met à me parler du temps qu'il fait.
- Oh oui, très belle. Je réponds.
- J'aime beaucoup votre coiffure. Dit-il timidement.
- Merci, c'est gentil.
- Vous avez une si jolie nuque, la dévoilée ne pouvait être que beau. Rajouta-t-il, hésitant sur son compliment.
Ma mère, quand elle était encore là, m'a appris à me méfier des beaux garçons. De tous les garçons d'ailleurs. Et j'ai comme l'impression que cet officier, je devrais m'en méfier tout particulièrement.
Plusieurs heures ont passé, et j'ai maintenant finit mes courses pour la semaine. L'officier m'a suivi tout le long. Nous avons discuté, de sa vie, de la mienne. Il s'appelle Philip, il est soldat, dans l'armée de terre. Il m'a dit s'être engagé dès qu'il en avait eu l'âge, impatient de servir et défendre son pays après l'avoir vu s'effondrer sous l'ennemi lors de la dernière guerre. C'est vrai que, moi même, si j'en avait eu le droit, j'aurais volontiers rejoins l'armée. Il m'a également raconté comment il avait vu mourir sa famille, brûlée vive dans leur maison familiale. Ses histoires me faisaient froid dans le dos. Il s'avérait pourtant que Philip était un homme relativement gentil et qui parlait volontiers.
Quant à moi, je m'étais simplement contentée de répondre à ses questions, tout en en posant moi-même.
Voila pour le deuxième chapitre ! J'espète qu'il vous avez passer un bon moment à le lire 😊
La suite bientôt
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L'étoile ou la croix
RomanceMoi, Philip Hartmann, je suis tombé amoureux de la plus belle femme que je n'ai jamais connu. Moi, Nadia Zehava, je suis tombée amoureuse d'un monstre. Le Nazi et la Juive