Illusion

Huitième jour

Lelendemain, à son réveil, Alex trouva Lucas couché à ses côtés.Les traits tirés même dans son sommeil, sa poitrine se soulevait àtoute vitesse et son souffle était haletant. À peine Alex posa-t-illa main sur l'épaule de l'espion que celui-ci se réveilla dansun bond. Il posa des yeux cernés sur lui, dans une expression béate.

–Excuse-moi, marmonnaAlex. Je ne voulais pas te réveiller si brusquement.

–Je...Quelle heureest-il ?

L'espionavait posé cette question avec toute la vivacité dont il se sentaitcapable. Cette nuit n'avait pas eu grand-chose de reposant pourlui. Se retrouver avec une Illusion chamboulée et sa propreorganisation qui continuait à le pourchasser n'avait pas aidé. Ilavait saisi le poignet de l'Illusion avec inquiétude et nesemblait pas vouloir le lâcher.

–Dix heures, réponditAlex après un rapide coup d'œil à son horloge.

– Cen'est pas vrai ! Je me suis endormi ! Je suis désolé,Alex ! Je n'aurais pas dû, je...

–C'est bon, c'estbon. Ça n'a pas beaucoup d'importance, tu sais, le calma Alex endégageant sa main.

–Mais... tu étaisévanoui... il aurait pu t'arriver n'importe quoi... j'auraisdû... je devais veiller sur toi !

–C'est bon, Lucas.Il n'est rien arrivé, alors ça va.

Alexse dressa. Il resta un moment debout, le temps que sa chambre sedécide à tenir en place et à ne pas tourner autour de lui. Sa têtelui faisait toujours mal, mais beaucoup moins que la veille. Sonévanouissement s'était transformé en sommeil sans rêve, et ilen était heureux. Il se souvenait, maintenant. Il se souvenait dumensonge de Fatum, de la disparition des Espoirs. Il se souvenaitd'Illusion 339, les yeux fous, sûr de lui et de ce qu'il disait.Il se souvenait du visage triste de Rachel...Rachel qui étaisintrouvable, Rachel qui les avait trahit, mais n'avait pasreparu...Peut-être avait-elle rejoint son Espoir. Alex espérait quece soit la vérité... même si son intuition lui disait lecontraire.

Ilposa la main contre le mur, s'en aidant pour se guider jusqu'àla salle de bain. Lucas le suivait des yeux, anxieux, de peur qu'ilne s'écroule à chaque instant et prêt à sauter sur ses piedspour lui venir en aide.

Alexs'appuya contre la porte de la salle de bain, qu'il avaitrefermée derrière lui, et se laissa glisser au sol. Faire semblantd'aller mieux que la vérité était un exercice vraimentdifficile. Il ne voulait pas inquiéter Lucas. A quoi bon ? Sonami se faisait déjà suffisamment de soucis pour son Espoir. Inutiled'en rajouter.

Unefois qu'il eut repris son souffle, Alex se remit debout, toujoursen s'appuyant sur le mur. Il dut utiliser les froides parois de ladouche pour parvenir à rester debout. Il avait les jambes en cotonet chaque muscle de son corps était douloureux. Pourtant, ce n'étaitpas tant son corps qui était fatigué que son esprit qui étaitépuisé. Il avait dû détruire toutes les barrières créées parl'horrible machine qui lui avait ravagé le cerveau deux jours plustôt. Lucas avait su trouver les mots pour le réveiller. Comment ?C'était un mystère qu'il n'avait pas vraiment envie depercer.

Ilfut soulagé de pouvoir s'asseoir ensuite sur son canapé alors queLucas se décrassait à son tour. La tête appuyée contre lescoussins, un café bien fort en main, il respirait doucement pourcalmer les battements de son cœur. Il allait devoir être en pleinepossession de ses moyens pour faire ce qu'il avait à faire.Puisqu'il était revenu au point de départ, puisqu'il était deretour à Fatum, il allait devoir agir. Maintenant que ce... Candell...le pensait hors d'état de nuire, il allait pouvoir agir. Et il leferait. Contre l'avis de Lucas s'il le fallait, mais il sauraitoù se trouvaient les Espoirs... et il saurait où se cachait Rachel.Il savait maintenant où chercher.