28 # Vacances à roulettes III : Handicapé GO !

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Voici le troisième et dernier volet sur mes vacances estivales ! Pour clore mon voyage, j'avais décidé de rendre visite à un couple d'amis que je connais grâce à World of Warcraft (des mois et même plus que nous nous parlons et qu'une vraie amitié est née, il était temps de la confirmer !).

Souvenez-vous, lorsque j'ai voulu prendre un train à Bordeaux pour rejoindre Lorient, j'ai été confronté à l'incarnation de la stupidité et de l'antipathie, ce qui m'a conduit à me tourner pour ce voyage vers le covoiturage. De nombreuses questions se posaient, car je n'avais jamais pratiqué ce mode de transport. Avec mon fauteuil électrique, j'étais restreint à certains types de véhicules. Je n'allais pas opter pour une mini ! Mon bolide, mes deux sacs, ainsi que ceux bien sûr des autres voyageurs, cela faisait beaucoup à embarquer. Ainsi, un peu dans l'urgence et par prudence, après avoir essuyé plusieurs refus, j'ai décidé de réserver non pas une mais deux places, pour moi et mon fauteuil. Et grand bien m'en a pris !

J'ai donc fait le voyage avec un monsieur et sa petite fille, qui malgré les mauvais clichés que je peux avoir des enfants en voiture a été très agréable et calme pendant tout le trajet. Malheureusement, le coffre de la 307 ne suffisait pas pour mon fauteuil, même si celui-ci se démonte (le bloc de la batterie, les deux roues arrière ainsi que les marchepieds peuvent se retirer). Il a donc fallu rabattre un siège arrière pour bourrer tout ça.

Pas le choix quand on est un handicapé qui prend de la place avec tout son attirail ! Mais au final, cela m'a à peine coûté plus cher que si j'avais pris un billet de train. Et ça a été plus rapide que ce qui était prévu par la voie ferrée.

Me voilà enfin arrivé à Lorient. Mon ami, que je nommerai Gontran pour son anonymat, et aussi parce que ce prénom est vraiment très très moche, donc drôle, m'accueille à bras ouverts ! Je dois dire que j'avais une certaine appréhension. Par le passé, j'ai souvent rencontré des personnes que j'avais auparavant connues sur Internet, notamment sur des jeux en ligne. Hélas, j'ai eu quelques expériences malheureuses (notamment celle de la cave, mais passons). Entre les gens qui découvrent réellement ce qu'est un handicapé, et qui ne sont pas capables de rentrer leurs yeux dans leurs orbites alors que je les avais bien prévenus à l'avance, et ceux qui ne comprennent pas que vous avez des besoins particuliers et qui n'y répondent pas, j'avais une voix désagréable dans ma tête.

Alors bien sûr, j'avais très bien briefé mon ami sur moi ainsi que sur ce qu'il allait devoir probablement faire, à savoir m'aider dans certains gestes du quotidien, gestes qui sont difficilement exécutables pour moi pour la simple et bonne raison que je ne suis pas chez moi avec mon confort et mes habitudes. Évidemment, je ne lui ai pas demandé non plus de me tenir la pine pour aller pisser ! Peut-être que j'aurais dû...

Et bien je dois dire que Gontran et sa copine ont été absolument impériaux avec moi. J'ai été traité aux petits oignons ! Je ne vais pas les déifier non plus, mais ils le mériteraient.

Un élément marquant de ce volet de mes vacances, c'est que j'ai succombé à la folie Pokemon Go. Mes deux amis étant amateurs de nombreux chasses, je me suis pris au jeu, et ainsi nous avons parcouru des dizaines de kilomètres en un peu plus d'une semaine.

Vous avez sûrement dû lire à droite à gauche des petits incidents survenus à cause de cette application, ou plus précisément à cause des gens qui n'arrivent pas à retirer leurs nez de leur écran. Et bien je rentre à roues jointes dans cette catégorie ! Mais en pire...

Imaginez la scène : je suis sur mon fauteuil, une main sur le joystick forcément, et l'autre qui tient mon téléphone. Seulement, j'ai une très mauvaise dextérité, et du coup je suis incapable de naviguer sur mon téléphone avec seulement mon pouce. J'étais donc obligé de m'arrêter dès qu'il se passait quelque chose, dès qu'un Rattata apparaissait ou dès que nous passions à proximité d'un Pokéstop. Plusieurs fois en freinant d'un coup j'ai failli faire s'empaler dans mon arrière-train (grands dieux que j'aurais adoré ça) mes amis qui me suivaient ! Dans un autre registre, moins « dangereux » mais tout aussi chiant, le fait de devoir s'arrêter tous les dix mètres était sacrément-tiltant, pour moi et pour eux (enfin surtout pour eux) à tel point qu'à la fin, Gontran prenait carrément mon téléphone pour chasser à ma place et je le suivais, déchargé de cette addiction qui couplée à mon handicap me transformait en danger des trottoirs.

Passons du coq à l'âne, ou plutôt du Pokemon au fauteuil de bureau. Pour l'instant ça n'a strictement aucun sens, c'est fait exprès, c'est pour inciter le lecteur à poursuivre afin de répondre aux questions que suscite en lui cette image. Gontran et sa copine habitant au premier étage, comme à Bordeaux nous avons dû laisser mon fauteuil électrique au bas des escaliers. Mais nous avons trouvé un stratagème plutôt astucieux pour me déplacer en toute aisance à l'intérieur de l'appartement : juché sur un fauteuil de bureau à roulettes, je n'avais plus qu'à me faire pousser ou attirer sur mes bras en m'agrippant sur les murs pour avancer. Pratique, et en plus ça fait travailler les biceps ! Chez nous, on appelle ça le système D : tout le monde y vient et ça stimule l'esprit créatif.

Pour finir ce séjour lorientais, l'événement phare : le festival interceltique. J'ai rarement vu autant de gens bourrés au mètre carré. Les rues étaient bondées, autant par des alcooliques que par des chasseurs de Pokemon, voire par les deux à la fois. Il y avait beaucoup de scènes sur lesquels des groupes jouaient de la musique, et quelquefois un employé me proposait sans que je dise quoi que ce soit de monter sur une estrade pour que je puisse assister au spectacle autrement que derrière les dos des gens debout (allez tout le monde debout, là-bas...). Une mentalité et un service très appréciables !

Ça faisait longtemps, mais j'y ai eu droit : des gens complètement défoncés m'ont accosté en me clamant à quel point j'étais courageux et fort, à quel point il fallait que je me batte, et à quel point c'était beau que je vive malgré tout, et encore une fois à quel point j'étais courageux et que j'étais un exemple. Et aussi à quel point j'avais des amis extraordinaires, et à quel point c'était ça le sens de la vie, être avec des amis extraordinaires et s'amuser malgré tout, malgré toutes les épreuves de la vie, même si moi je suis beaucoup plus courageux que les autres étant donné que je suis dans un fauteuil électrique, et ça c'est incroyable mec, mais au fait tu viens d'où, tu fais quoi dans la vie, c'est incroyable mec, tu es un exemple pour nous tous, au fait qu'est-ce que tu fais dans la vie, tu viens d'où, mais vraiment je connais un gars comme toi, mais c'est différent mais il est comme toi, au fait tu viens d'où, tu fais quoi dans la vie...

Le mec m'a carrément fait des bisous et m'a pris dans ses bras ! Putain de merde ! C'est très gentil, mais tu es complètement bourré et demain tu te souviendras probablement de rien, laisse-moi tranquille !

Enfin bon, ça part quand même de bons sentiments... mais vous savez ce qu'on dit, l'enfer est pavé de bonnes intentions. Ceci dit, ça reste un enfer acceptable.

Last but not least, mon retour à Paris en train s'est clôturé par un petit événement qui fut assez flippant sur le coup. J'arrive à la Gare Montparnasse, et les gens descendent, moi j'ai l'habitude j'attends qu'un agent SNCF vienne me chercher et installe la rampe pour que je puisse descendre avec mon fauteuil. Les minutes passent, et le wagon est vide. Aucun agent vu, personne ne vient. Je ne m'alarme pas, jusqu'au moment où résonne le message suivant : « le train va repartir au dépôt, merci de quitter tous les wagons ».

Je veux bien m'en aller, mais c'est impossible ! J'ai déjà du mal à faire un transfert du siège jusqu'à mon fauteuil, comment je vais me sortir de ce truc ! ?

Le temps file, et pris par la panique, je me déplace tant bien que mal jusqu'au bouton d'alarme. On est bien dans un cas d'urgence, n'hésitons pas ! Au moment où j'allais abattre mon poing sur le cercle vert, voilà l'agent SNCF tant attendu ! Il m'explique qu'il n'était pas au courant que j'étais dans le wagon, et qu'il est là simplement car vérifier que les compartiments soient vides fait parti du protocole. Je ne savais pas, et si je l'avais su je n'aurais pas paniqué autant et j'aurais simplement attendu. Mais quand même. Quand même !

Après cette dernière mésaventure, je suis finalement rentré chez moi. Ces vacances étaient vraiment supers, mais mon confort et mon autonomie commençaient vraiment à me manquer. Et explorer d'autres endroits encore plus donner l'envie de partir de chez moi. Toulouse, j'arrive !

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