Crazy

Prologue

Des odeurs de transpiration, des collés-serrés.. On pourrait presque se croire en boîte de nuit. Malheureusement pour moi, on est au beau milieu d'une rame de métro. Et à l'heure de pointe. J'aurais volontiers utilisé ma voiture si celle-ci ne s'était pas décidée à tomber en panne au beau milieu de la journée, alors que j'étais censée me rendre au travail. Un enfer.

Je sautille presque de joie lorsque mon arrêt est annoncé. Je pousse gentiment les gens qui se trouvent sur mon passage et sors enfin de ce cauchemar. En quelques minutes, je rejoins mon appartement, situé dans le centre-ville de Los Angeles. C'est un endroit magique, si vous voulez mon avis. Le prix du loyer est hallucinant, mais c'est un plaisir de se lever chaque matin avec une vue aussi prenante à la fois sur les grattes-ciels et sur l'océan. J'ai la chance de pouvoir me payer ce luxe grâce à mon travail : agent immobilier dans l'une des agences les plus prisées de la côte Ouest, à savoir celle de mon père. Il l'a fondée il y a 10 ans, sans se douter que sa réputation prendrait une ampleur pareille. Les plus grandes personnalités font appel à nous lorsqu'ils recherchent LA perle rare. Nous sommes les meilleurs dans ce domaine.

La sonnerie de mon téléphone retentit pendant que je retire mes chaussures. C'est le nom de mon père, Johan Carter, qui s'affiche sur l'écran de mon smartphone. Et dire que j'allais me faire couler un bon bain chaud..

- Bonsoir Papa. Que me vaut un appel aussi tardivement ?

Malgré notre relation fusionnelle, mon père et moi évitons de nous appeler les soirs de semaines. Nous travaillons déjà ensemble toute la journée, alors le soir, une pause est toujours la bienvenue.

-Je sais, Kacey, mais on a une urgence professionnelle. Une personnalité très importante vient de m'appeler, elle arrive dans 30 minutes. Je serais en bas de ton immeuble dans quelques instants,ne soit pas en retard.

Il raccroche et je soupire. On est vendredi soir, et j'aurais largement préféré profiter de cette soirée pour me reposer. Je passe mes journées à porter des talons hauts et à enchaîner les visites pour des clients très exigeants, parfois même agaçants. Notre client type, c'est le PDG multi-millionnaire qui se croit tout permis, et il faut donc faire preuve d'un self-control à toute épreuve si on veut survivre dans ce milieu.

Je ré-enfile mes chaussures et m'en vais attendre mon père, là où il me l'a demandé. Johan Carter est un homme ambitieux, et il y a des jours – comme aujourd'hui, par exemple – où je me demande quand est-ce qu'il ne travaille pas. Quelques secondes plus tard, comme prévu, il se gare devant la porte de mon immeuble. Je rentre dans la voiture et l'assaille tout de suite de questions.

- Alors, quel client se décide à prendre un rendez-vous un vendredi soir? Il doit vraiment être important pour que tu aies accepté et pour m'avoir entraîné avec toi.

- Ne râle pas, ma chérie. Il s'agit de Stefan White.

Je réfléchis quelques secondes.. Stefan White, LE magnat de l'immobilier. Il a investi des millions de dollars sur tous les continents, et il fait désormais partie des hommes les plus riches dans le domaine de l'immobilier. J'ai déjà eu l'occasion de bosser pour certains de ses clients, mais je n'ai jamais travaillé directement pour lui.

- Très bien, il est important. Mais il a déjà sa bande d'agents immobiliers, je ne vois pas pourquoi il aurait besoin de nous.

- Il cherche un bien pour son usage personnel. Et il ne mélange pas vie privée et vie professionnelle, alors il fait appel à des agents extérieurs. Nous, en l'occurrence.

- Je vois.

En fait, je ne vois pas du tout, mais je décide de me taire pour le reste du trajet. Je suis presque stressée à l'idée de le voir en personne.. Pas parce qu'il est célèbre, étant donné j'ai déjà eu l'occasion de rencontrer pas mal de personnalités dans ma vie, mais parce qu'il a la réputation d'être un client particulièrement intimidant. Je suis quelqu'un de très sûre de moi, mais là.. c'est carrément autre chose. Il va falloir être vigilants car on ne peut pas se permettre de passer à côté d'une affaire pareille.