-Angèle, Rebecca, je vous ai apporter votre repas.
Notre infirmière s'approcha, deux plateaux en mains et les pose sur nos tables de chevets respectives.
-Vous devez manger, reprend elle. C'est important, vous le savez.
Non justement. On ne le sait pas.
Ou tout du moins, on ne veut pas le savoir.Une fois qu'elle fut partie, j'examine le contenu du plateau.
Un yaourt, 0% de matière grasse... J'eu une bouffée de colère en lisant. Ils se fichent de nous?! On a besoin de se rappeler de tous les efforts qu'on fait pour manger moins caloriques?
De se rappeler de tous les efforts qu'on fait pour être moins grosses?A côté du yaourt se tient une pomme et une barre de céréales. Je ricane ironiquement intérieurement en pensant que la personne qui a mis cette barre n'a pas dû voir souvent toutes les restrictions alimentaires que je me fais depuis presque un an.
Je lève les yeux vers Angèle, qui regarde le plateau comme si c'était la chose la plus répugnante au monde.
-Quoi? me dit elle en voyant que je l'observait. Tu veux me voler ma bouffe? Je t'en prie, te gêne pas.
Sa réplique me fais mal. Surtout le lourd sous entendu qui se cache derrière.
Mais je vois une lueur passer dans ses yeux.
Je la connais.
C'est celle de la faim.
Elle meurt de faim. Elle meurt d'envie de gober la totalité de son plateau. Ça crève les yeux.Je dis "elle", mais je peux aussi dire "je". Moi aussi j'en ai envie, ma faim me le demande.
Hier encore, ma conscience n'en voulait pas. Mais maintenant, depuis que j'ai vu Angèle, je ne sais plus.
Plus si tous ce que je fais à un sens.
Est ce que je mange? Est ce que je me laisse aller? J'ai peur de manger. Car je sais qu'à partir du moment où je croquerais dans cette pomme ou avalerait ce yaourt, plus ou moins de mon plein gré, je ne pourrais plus retourner en arrière. Je ne suis pas sûre que j'arriverais à manger comme tous le monde. Il y'a de forte chance que je me mette à manger des quantités monstres, comme lors de ces crises de faims, que les médecins appellent crises de boulimie.
Et dans ce cas, je grossirais encore plus, et recommencerais à me faire vomir.Je vois tous ca défiler devant mes yeux. Ce ne sont pas seulement ce qui pourrait m'arriver, mais aussi ce qu'il m'est déjà arrivée.
C'est tous ce que j'ai fais pendant un an.
Je ne veux pas que ça recommence. Je sais que là, je suis sur une estrade, comme les acrobates du cirque avant de se lancer pour saisir leur trapèze.Je dois sauter. Sois j'arrive à saisir mon trapèze, et je peux m'envoler et sortir de ma maladie.
Sois je tombe, et dans ce cas, je rechute. Et ce cercle vicieux recommence, encore et encore... Mais qu'il y est un filet ou pas, je ne suis pas sûre que je m'en sortirais...
Je me pose alors cette question, encore et encore.
Est ce que j'ai la volonté et le courage de sauter?**
Une heure environ doit s'être écoulée depuis que notre infirmière nous a apporter à manger.
Une heure que nos plateaux sont intacts.
Une heure que le silence règne.J'hésite à manger. J'hésite aussi à demander à Angèle si elle a l'intention de manger. Car, au fond, je me pose pleins de questions. Est ce qu'elle aussi est comme moi? Ressent-elle la même chose?
Mais son regard noir me fait douter que ça soit une bonne idée. Elle est comme moi quand je venais d'arriver. Ça fait seulement quelques jours que je suis là, j'ai l'impression de ne pas avoir avancer, presque de reculer, mais d'un autre côté, j'ai la sensation que rien n'est plus pareil, surtout depuis l'arrivée de Angèle.
Est ce que ça signifie que je suis sur la bonne voie? Ou alors que je stagne encore?Finalement, je me décide à lui parler:
-Tu va manger?
Elle plante ses yeux dans les miens et je me surprend à y voir des larmes.
-Non... Je ne veux pas. Et je ne dois pas!
Ca me fait mal de la voir comme ça. De voir son regard noir envoler, cette fausse haine qu'elle se crée laisser place à la souffrance qu'elle éprouve vraiment. Ça ne me fait pas tant mal parce que c'est elle en particulier, non, c'est purement égoïste: elle me rappelle trop ce que j'étais... Et suis encore...?
Je ne sais pas quoi lui répondre. J'ai envie de lui dire de manger, car ça se voit qu'elle doit le faire, qu'elle en a besoin mais en même temps, je ne peux pas lui dire que faire quelque chose que je n'arrive pas à faire moi même...
-Ne me regarde pas comme ça! me cri t'elle. Tu... Tu...
Elle n'arrive pas à finir et elle fond en larmes.
Je ne dit rien. Je ne fait rien.
Parce que je ne peux pas.
Parce que je ne veux pas.
J'ai l'impression d'être la spectatrice de mon propre état.Soudain, elle se jette sur la nourriture, et avale tout, à une telle vitesse qu'on aurait dit un ogre.
L'ogre le plus maigre du monde.
Je n'ai pas la force de la regarder plus longtemps. Je me retourne dans mon lit pour ne plus la voir.J'entends des pas précipités, je me retourne et la voie qui cours vers les toilettes.
Je sais très bien ce qu'elle va faire. Elle va vomir ce qu'elle convoite mais s'interdit de manger. Je me bouche les oreilles pour ne pas l'entendre.
Là, pour le coup, je n'ai pas faim. Et ce n'est pas une illusion de ma maladie.
Car je commence à moins en moins en douter que c'est une maladie. Ce n'est pas normal ce qu'on vit Angèle et moi. Non...Trouvant qu'elle met beaucoup de temps à revenir, je me lève, avec difficulté pour aller la voir.
Je la trouve en larmes contre le mur carreler. Elle est dans un état abominable, je n'ai pas de mots...
Quand elle m'aperçoit, elle me hurle:-Qu'est ce que tu me veux ?! CASSE TOI OK?! Je veux pas de ta pitié ! Ni de tes reproches! Je fais ce que je veux! ALORS TU ME FOU LA PAIX!!
Les larmes me montent moi aussi aux yeux. Pas parce que je suis triste qu'elle me manifeste de la haine, ça je m'en fou.
Entre deux sanglots elle ajoute:-Je vais bien ok? Tr...Très bien...
Elle sait aussi bien que moi qu'elle n'en croit pas un mot.
**^^**^^**^^**^^**^^**^^**^^
Hey!
Voilà un nouveau chapitre ! Waow je commence enfin à poster un peu plus régulièrement xD!
J'espère que ce chapitre vous plaît! Pas trop répétitif? Des envies ou des "non envies" pour la suite? Même si j'ai une idée de comment je vais faire je veux savoir ^^
Mille bisous et merci d'avoir lu ❤️
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Ma lutte contre moi-même
JugendliteraturRebecca est une fille comme on l'est toute. Le mal qui la frappe, on l'a tous au fond de nous, c'est seulement chez quelques personnes qu'il se manifeste, grandit et ronge ce que l'on est. Ce mal, c'est l'anorexie. Cover by @LegendaryDream