chapitre 5

7.7K 455 51
                                    

le lendemain matin

     — Leila réveille-toi ma puce!
J'entends la douce voix de ma mère  et je m'étire sous les couvertures.
     — ...Allez il faut te lever petite marmotte il est tard et je t'ai fait du café.
J'ouvre difficilement un œil et extirpe ma tête de sous le drap, ma mère pose sa main sur sa bouche pour étouffer un cri silencieux d'horreur, et je comprends à sa réaction que je suis pas belle à voir.
     —Mon Dieu ma chérie ! Il ne t'a pas loupé cette fois !
Elle me dévisage avec tristesse et pose délicatement son pouce  sur le coin de ma bouche, j'ai un mouvement incontrôlé de recul et ses yeux s'emplissent aussitôt de larmes.
     — C'est rien maman j'en ai vu d'autres, je suis sûre que c'est moins grave que ça en a l'air.

Je me redresse pour m'assoir et cette dernière  me tend la tasse de café. L'odeur que j'affectionne tant me chatouille les narines et me  réconforte un peu.
     — Pourquoi Rayan est rentré plus tôt que prévu ? finis-je par demander.
     — Il s'est disputé  avec ses copains et a fait demi-tour. Au début il n'a pas remarqué votre absence et je suis partie me coucher en espérant qu'il fasse de même, mais pour une raison que j'ignore il a décidé de veiller tard dans le salon, de jouer aux jeux vidéos et lorsque vous êtes rentrées il vous a surpris.
     Je regarde ma pauvre mère elle semble exténuée ses traits sont tirés et bien que sa beauté est toujours aussi vivace je sens que sa misérable vie commence à peser sur son physique. C'est normal elle vit dans l'angoisse permanente d'assister à des scènes de violence  et  jongle avec des émotions contradictoires, essayant de faire plaisir à ses filles tout en évitant de contrarier son fils et son mari. Le pari impossible.
     — Tu crois qu'il va le dire à papa?
Si mon père apprend que nous sommes sorties il va nous massacrer.
     — Non! Je ne pense pas, j'ai réussi à le convaincre de ne pas le faire, ce matin avant qu'il aille au foot.
Je lâche un long soupir de soulagement et ma mère me tapote la main avant de me dire de prendre une douche et de la rejoindre dans la cuisine. J'obéis  et me dirige vers la salle de bain, tous les mouvements que j'entreprends sont une véritable torture, le moindre centimètre carré  de ma peau me fait souffrir. Des images de mon frère qui me roue de coups et d'insultes flashent dans ma tête et les larmes de la veille refont surface.
        Au moment où j'aperçois  mon visage dans le miroir, un cri d'horreur m'échappe, des hématomes bleus violets jaunes couvrent la quasi-totalité de mon visage. Mes lèvres sont fissurées et ma paupière droite est enflée. L'infâme spectacle de mon reflet me retourne littéralement l'estomac. A la douleur des coups je vais devoir faire face aux regards tantôt intrigués tantôt moqueurs de mes camarades du lycée, comme toujours l'assistance sociale va me convoquer et me questionner, je commence à être à court d'excuses pour expliquer mes blessures, elle n'est pas dupe et ne croit pas du tout  aux  histoires tirés par les cheveux que je lui invente à chaque fois. Je me déshabille lentement pour ne pas causer plus de dommages à mon corps et trouve un petit réconfort  lorsque l'eau chaude prend contact avec ma peau.
          Après une longue douche, je rejoins ma mère et ma sœur qui préparent le déjeuner. Le visage de Sonia est beaucoup moins marqué que le mien. Ses yeux s'écarquillent lorsqu'elle me voit, je lui fais un demi-sourire pour la rassurer mais son expression reste grave. Elle me prend dans ses bras:
     — Oh ma sœur tout est de ma faute si je ne t'avais pas entraîné dans ce plan foireux rien de tout ça ne serait arrivé.
     — Ce n'est pas grave! Tu ne pouvais pas savoir qu'il allait rentrer plus tôt, alors je t'en supplie ne culpabilise pas.
Je me dégage de son étreinte avant de me diriger vers l'évier pour faire la vaisselle.
          Le repas préparée , je décide de retourner dans ma chambre sans même prendre le temps de déjeuner  et décide de m'enfermer pour la journée.Ma chambre,  c'est mon havre de paix, le seul endroit de l'appart où je me sens à peu près en sécurité. De plus, il ne vaut mieux pas que mon père me voit comme ça, cela éveillerait ses soupçons et je ne suis pas une très bonne menteuse. Mon téléphone vibre:
✉️Edward: Bonjour beauté ! J'espère que tu as bien dormi! J'aimerais te voir aujourd'hui! Donne-moi ton adresse et je passe te chercher.
Mon cœur menace de sortir de ma poitrine. Je souris béatement et je l'imagine se réveillant torse nu, les traits tirés, fatigué de la veille et  tapotant sur le clavier de son téléphone .Qu'est-ce que je ne ferai pas pour être avec lui en ce moment, blottie dans ses bras, au chaud, en sécurité...
La porte de ma chambre s'ouvre subitement je sursaute et cache immédiatement mon téléphone sous mon coussin. Rayan s'approche furieusement de moi, m'attrape par le col et me secoue.
     — Alors salope! Tu t'es bien amusée hier soir?!
Je suis tétanisée. Incapable de dire ou de faire quoique ce soit. Il lève la main pour me gifler et je ferme aussitôt les yeux. Il s'arrête subitement pour une raison que j'ignore et lâche mon col.
     — Je t'ai déjà  assez amoché  comme ça! Je crois que ta compris ta leçon! Tu sors plus d'ici c'est clair ! Si jamais j'apprends que tu as désobéis je te balance à papa! Et crois-moi, lui il ne t'épargnera pas.
           Il quitte ma chambre dans un fracas. Je regarde mon portable et décide d'ignorer le message d'Edward. A quoi bon me bercer d'illusions? Je ne peux décemment plus le voir, même si j'arrivais à échapper à la vigilance de mon frère, comment expliquer mes bleus à Edward? Il me prendrait pour une misérable. Le cliché de la banlieusarde qui se fait frapper. Il pourrait pas comprendre, il vit dans un autre monde et vaut mieux qu'on en reste là avant que je me fasse encore plus de mal. Je n'ai vu Edward que quelques heures, mais j'ai déjà un attachement profond pour  lui.
          Personne ne m'a jamais traité avec autant de douceur et de considération. Sa façon de me regarder et de me toucher a fait naitre en moi un désir inavouable... voilà que je recommence avec mes niaiseries! Je dois arrêter de me torturer avec ça, c'est ridicule! C'était juste une  soirée! Une parenthèse enchantée dans mon quotidien sordide. Je dois revenir à la réalité et me concentrer sur mon bac qu'il faut que je décroche avec mention pour m'inscrire à la Sorbonne. C'est ça le plan Leila tu te souviens  tu vas à la fac tu décroches des diplômes tu trouves un super boulot bien payé et tu sors ta mère et ta sœur de leur vie d'esclave. Pas de place pour autre chose! Pas de place pour un garçon! Mon téléphone vibre encore:
✉️Edward: Princesse répond! Tu dors encore? J'aimerais être à tes côtés te regarder dormir, embrasser chaque parcelle de ta jolie peau pour  te réveiller.
Je rougis, souris, soupire et pleure. J'ignore le message.
Une heure plus tard...
✉️Edward: Bon il est 3h de l'aprem je pense que tu ne dors plus... Répond !
Quarante-cinq minutes plus tard.....
✉️Edward: 😔
30 min plus tard....
✉️Edward: Ok j'ai compris tu m'ignores... je pensais vraiment qu'il y'avait un truc spécial entre nous apparemment je me suis trompé !
Quatre heures plus tard et après plusieurs appels en absence...
✉️Edward: Leila! S'il-te-plaît répond! Je mérite au moins une explication.
Mon téléphone  vibre à nouveau et je décide de mettre fin à son tourment, après tout c'était injuste de ma part, il ne méritait pas ça.
     —Allo? Leila ?
Il semble étonné. Sa voix est encore plus sexy au téléphone et provoque un essaim de papillons dans mon ventre. Putain pourquoi j'ai répondu ? il reste silencieux un instant.
     —Heu...Ça va? Pourquoi tu chuchotes?
     — Parce-que... parce- que...c'est...compliqué !
     — Pourquoi tu m'as ignoré ? Je croyais que hier soir...
Je le coupe dans son élan avant qu'il en dise trop.
     — Ecoute Edward, hier soir c'était magique! Je le sens sourire au téléphone.
     —...Mais ça ne peut pas se reproduire!
     — Quoi? Mais pourquoi? Je veux te revoir Leila! Tous les deux on a un truc on ne peut pas le nier. Je sais que tu l'as ressenti comme moi.
Je soupire.
     — Oui mais je ne peux pas! Je ne peux pas t'expliquer... c'est compliqué !
Je sens ma gorge se nouer et les larmes monter
      —...Adieu Edward  s'il-te-plaît  oublie moi! dis-je d'une voix étranglée avant d'éteindre mon téléphone ne lui laissant pas l'occasion de répondre.
Je m'écroule  de tristesse et de douleur au creux de mon lit. Je pleure tellement ce soir-là que je crois ne plus avoir de larmes disponibles au petit matin.

L'initiation ( Sous contrat d'édition ) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant