Chapitre 1

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Perdue dans des pensées qui ne lui ressemblaient pas, Aileen semblait, aux premiers abords, une adolescente des plus banales. Elle menait sa petite vie, elle faisait son « petit bonhomme de chemin » comme elle se plaisait à dire. Elle ne prêtait pas forcément attention aux embûches qu'elle croisait sur sa route et aux choses qui pouvaient la consumer. Elle préférait une vie simple, sans prise de tête.

Cela dit, un vide, aussi métaphorique que réel s'emparait d'elle de toutes parts. C'était un vide incommensurable et pourtant si remplit qu'il donnait à Aileen des airs d'être surnaturel.

Lorsqu'elle avait cinq ans, Aileen a brusquement perdu ses parents lors d'un violent orage. Elle était alors chez sa cousine qui faisait office de baby-sitter pour la soirée pendant que les parents d'Aileen souhaitaient aller au restaurant avec certains de leurs amis.

Cependant, ils n'étaient jamais rentrés de cette dite soirée.

Les possibilités étaient multiples, avaient-ils inventé cette soirée et simplement pris la fuite ? Avaient-ils eu un accident dû aux conditions météorologiques ; mais dans ce cas pourquoi la police n'a retrouvé aucun corps, aucun débris de voiture ? Avaient-ils été kidnappé ou bien encore pris au piège par un guet-apens mis au point par une bande de psychopathes dégénérés ?

Les années étaient passées et personne, ni dans la famille, ni dans les forces de l'ordre ou les médecins, ou autres professionnels n'avaient réussi à trouver d'explications à cela. Le mystère resterait probablement entier toute la vie durant.

Quoi qu'il en soit, Malia, la cousine d'Aileen, l'avait donc gardé sous son aile et élevée comme si elle était sa propre fille. Elle l'avait protégé nuit et jour et Aileen se plaisait bien dans cette petite vie qu'elle jugeait remplie de douceur malgré les évènements tragiques auxquels elle avait pu être confrontée.

Tout cela jusqu'au jour où Malia décida de se suicider. Le lendemain des 18 ans d'Aileen ; comme si tout cela était prémédité. Etant majeure et plutôt mature pour son âge, ayant son bac et intégrée une fac plutôt prestigieuse et étant sur une bonne voie pour la réussite après ces deux premiers mois de cours, elle pouvait donc se débrouiller seule. Malia lui avait légué l'appartement dans lequel elles habitaient. C'était un appartement relativement simple mais chic toutefois. Il n'était pas spécialement grand mais Aileen avait toujours trouvé que l'on s'y sentait bien. Elle lui avait également ouvert un compte, avec suffisamment de réserves d'argent pour pouvoir tenir quelques années sans trop de difficultés.

C'était donc à Aileen de prendre la relève. De surmonter la douleur de cette perte et de prendre la totalité de sa vie en main. C'était à elle de se salir pour toutes les tâches du quotidien qu'elle ne souhaitait pas accomplir ou lorsqu'elle avait à faire face à de difficiles décisions. Elle prenait doucement conscience de cela. D'un côté cela lui plaisait car elle avait de quoi s'occuper pour « tourner la page », mais de l'autre, Aileen savait qu'elle pouvait facilement se laisser submerger et ne plus vraiment être consciente de tous les actes qu'elle accomplissait. Elle souhaitait pourtant toujours avoir le contrôle, assumer ses faiblesses avec fermeté et aplomb. Elle était plutôt du genre téméraire mais parfois son subconscient parvenait à prendre le dessus ; et son cœur également, lorsqu'elle se l'y autorisait.

Aileen se rendait souvent sur la tombe de sa cousine pour continuer de lui parler et de se confier comme elle l'avait toujours fait depuis ses 5 ans. C'était sa manière à elle de ne pas détériorer la belle relation qu'elles entretenaient depuis toutes ces années.

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Nous étions en plein mois de Novembre, un an jour pour jour après la mort de Malia, et Aileen décida donc, en cette soirée froide et parsemée de neige, de se rendre au cimetière.

Mais ce soir-là...


Flot de silhouettes discordantesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant