Encore cette gentille femme qui me parle, comme tous les jours bien que je n'aie plus vraiment la notion du temps. D'un coup, je remarque, mes yeux sont moins lourds. Je peux les ouvrir, ce que je fis directement, évidemment. Ho, la dame qui se jette fougueusement sur moi dès que je commence à entrouvrir mes yeux pour me serrer aussi fort que ses forces ne le lui permettent. D'un côté, ce n'est pas si mal car ça permet à mes yeux de doucement s'habituer à la violente lumière blanche qui abrite la pièce. Mais je ne connais toujours pas son identité. Ensuite, elle commence à desserrer un peu son étreinte en me parlant « Ho mon chéri, si tu savais comme je suis heureuse de te retrouver, tu m'as tellement manqué pendant ces cinq longues semaines ! je t'aime ! Si tu savais comme je t'aime mon chéri ! [...] » Ha ça veut donc dire que j'étais coincé pendant ce putain de sommeil pendant plus d'un mois. Mais tout ça ne me dit pas qui est cette dame. Elle est gentille et a l'air de s'être fait beaucoup de soucis pour moi. Elle est belle, blonde aux yeux verts, visage fin, la quarantaine. Elle m'a appelé « mon chéri » Ho, j'espère que ce n'est pas ma copine ! Elle est un peu vieille quand même pour être ma petite amie, elle pourrait être ma mère ! Ho ! Ma mère ! Sur le coup de l'exclamation, je me mis à articuler « Maman » d'une voix cassée. A ceci, elle répondit « Ho mon chéri, tu te souviens de moi, les paroles des médecins sont donc fausses ! Ho mon Chéri, mon fils, si tu savais comme je t'aime ! » Je ne pus en dire plus, après ces quelques paroles échangées, une dame brune habillée tout de blanc vint dire à « ma mère », quel mot étrange pour désigner une inconnue, qu'il fallait me laisser seul, le temps de récupérer et de faire le bilan de la perte de connaissance et de l'amnésie. C'est donc moi, qui suis amnésique, c'est vrai que je ne me souviens de rien. Même pas de ma mère...
L'infirmière regarde mes yeux, ma bouche, me pose des questions auxquelles je ne sais pas beaucoup répondre. Par contre, elle, répond volontiers aux miennes. C'est ainsi que je sais que je m'appelle Paul, j'ai 16 ans, j'ai été victime d'un accident de voiture suite à une fugue de ma part. Elle m'apprend également que mon père n'est plus de ce monde, que je suis enfant unique mais que ma mère ferait tout pour moi et qu'elle est venue me parler chaque jour de mon long sommeil, parlant de moi aux infirmiers, aux médecins, leurs disant que j'étais bon élève, que j'aimais beaucoup les jeux-vidéos et que j'étais assez populaire au lycée. Elle m'explique aussi que malheureusement, suite à mon accident, les médecins ont été obligés de m'amputer la jambe droite et que j'ai subi un violent traumatisme crânien. Je devrai me déplacer en fauteuil et ne retrouverai certainement plus jamais la mémoire. Tellement d'informations me parviennent, je ne sais quoi retenir et comment réagir à cela. J'ai surtout très peur, de la suite, des gens que je devrais voir ou revoir. J'ai honte, honte de faire autant de mal à ma mère, de la voir pleurer en me retrouvant, en comprenant qu'elle est toujours une inconnue pour moi, et que je ne retrouverais certainement jamais la mémoire des 16 ans qui furent antérieurs à l'accident.