Miroir...

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Les premières rencontres sont toujours magiques et mémorables, n'est-ce pas ? Alors pourquoi ne fusse pas le cas pour moi ?

Lorsque je rencontrais cet homme pour la première fois, ce fus alors que je travaillais. Assise à mon bureau, il était venu comme un client. Il m'avait alors dévisagé pendant longtemps, assez longtemps pour me déranger et m'inquiéter. J'étais une femme apparemment magnifique. Des cheveux naturellement blond, des yeux d'un perçant bleu, tel était mon reflet.

« Je voudrais t'aimer, mais je ne peux que te désirer ». Ce fut les seules paroles qui sortirent de sa bouche. Les seuls mots que je reçus de sa part avant qu'il ne parte.


Elle était hideuse, elle était défigurée. Mais qui donc pourrait l'apprécier pour ce qu'elle était ? Personne, pas même elle. Du moins était-ce ce que je pensais lorsque je regardais mon reflet. Mon affreux reflet.

Personne ne m'appréciait pour qui j'étais. Ce n'était que ce reflet que l'on désirait, non pas l'âme qui habitait ce corps que je ne voulais plus posséder.

Pourtant il continuait de me regarder. Il ne semblait pas me juger de ses yeux assassins et destructeurs. Il semblait m'accepter comme j'étais. Comme un être à l'affreux reflet. Mais il me l'avait dit, il me l'avait avoué. Jamais il ne pourrait m'aimer, ne pouvant que me désirer.

Pourquoi me regardait-il ainsi ? Pourquoi m'observait-il de cette façon ? Cette façon qui semblait me dire que j'étais la seule. Cette manière qui semblait m'enfermer dans un monde où seul lui pourrait me regarder. N'étais-je donc qu'un objet, une œuvre d'art ?

Regarde-moi !

Détournant les yeux, je continuais de regarder mon reflet dans le miroir, tremblante. Je ne devais pas pleurer.

Je ne peux pas te supporter, toi mon hideux reflet.

Deux bras puissants vinrent m'enlacer tendrement alors que je continuais de me juger du regard. Pourquoi m'approchait-il encore ?

Je voulais pleurer, prise de pitié par ce que j'étais devenue par sa faute. Je m'étais lamentablement éprise de l'homme qui ne me donnerait jamais la tendresse que mon cœur désirait.

« Ne te regarde pas avec autant de haine » osait-il me demander.

Me tournant vers lui, je lui bandais les yeux avec un foulard.

« Maintenant que tu ne me vois plus, qui désires-tu ? »

Mais que faisais-je donc ? C'était insensé, complètement insensé. Je connaissais la réponse.

« Je te désire... »

« Mais tu ne m'aimeras jamais... » le coupais-je.

Me débarrassant de ses bras, je me détournais de l'homme aux yeux bandés. C'est alors qu'il me saisissait fermement par la taille, me serrant dans une étreinte douloureuse.

« Je désirais ton corps. Tu me l'as sacrifié. Je désirais ton cœur. Tu me l'as généreusement offert. Et lorsque je désirais ton âme, tu me l'as aveuglément confiée. »

Je le savais, alors pourquoi me l'expliquer à haute voix. Pourquoi ne pouvait-il pas simplement se taire ?

« Mais toi tu ne m'as rien demandé. Pourtant tu as dominé mon corps avant de m'arracher le cœur de la poitrine et de me dérober mon âme. »

Mais qu'essayait-il donc de m'avouer ? Je ne savais pas, je ne savais plus. Je ne voulais pas le savoir. Et voulant m'éloigner de nouveau de cet homme que j'avais aveuglé d'un foulard, celui-ci resserra son étreinte.

« Je ne pouvais que te désirer, et tu le savais. Mais puis-je te demander de me laisser faire bien plus à présent ? »

Mon hideux reflet semblait se moquer de moi. Non, pas de moi. Il ne se moquait que d'une personne. Il se moquait de cet homme qui s'était fait piégé. Cet homme qui avait cru dévorer un doux agneau sans s'apercevoir qu'il avait pénétré dans la demeure d'une démone. Oui, ce miroir ne pouvait s'empêcher de me renvoyer ce reflet détestable de ma personnalité. Manipulatrice froide, j'obtenais toujours ce que je désirais. Et mon miroir fissuré le savait, se brisant bruyamment à mes pieds.


Dulcis PromissisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant