-"Pax, dites-moi, à quoi va me servir tout ceci?" Il me regarde comme si je venais d'une autre planète. Il secoue la tête pour me faire part de son incompréhension. "Je veux dire, que dois-je faire de tout ce savoir? Le Tarot, la Matrice, la géomancie et tout le reste? De tout ce que vous m'avez enseigné?" Il secoue à nouveau la tête.
-" A vous libérer du conditionnement créé par vos parents dans l'espoir que vous puissiez survivre dans cette société et en garantir la pérennité.
A apprendre à vivre. A vous impliquer profondément dans les différents aspects de la vie et du fait de vivre. C'est-à-dire, à vous débrouiller le mieux que vous savez pour faire la différence entre la vie, conséquences des forces biologiques, et l'acte de vivre, un acte volontaire qui est une question de conscience de soi. Peut-être à contaminer les autres au besoin profond de la liberté d'être?" suggère-t-il avec un sourire narquois. "Vous faire confiance et faire confiance en l'Intuition. Sinon, vous ne trouverez aucun moyen de vous défaire des détritus de votre vie pour, enfin, être libre.
Ou encore, à créer une masse critique qui aurait pour effet de modifier la perception générale de notre monde et du rôle que l'Homme y joue. Peut-être, cette masse critique mettra-t-elle fin à l'existence de la représentation de l'univers que nous avons créée et d'autres mondes apparaîtront-ils?"
-"Ca fait beaucoup de choses!"
-"Mais, qu'est ce que vous croyez! Comment croyez-vous que je sois arrivé là où je suis, en glandouillant?" et il éclate de rire. "Non, j'ai dû laisser toutes mes illusions derrière moi. J'ai dû lutter contre ma paresse, mes terreurs, mes penchants au laisser-aller et, surtout, j'ai dû apprendre à vivre avec cette conscience accrue qui rend la vie de tous les jours insupportable." Ces dernières paroles m'intriguent au plus haut point et je lui demande de m'expliquer en quoi la quête de la connaissance rend la vie ordinaire insupportable. "Le paradoxe de l'Homme de connaissance est de devoir continuer à vivre dans un monde qui n'est pas compatible avec sa recherche de la connaissance, voire, un monde qui le rejette parce que ce monde le perçoit intuitivement comme un danger potentiel qui mettra à mal les repères habituels. De la perte de repères résulte, pour le commun des mortels, une terreur invivable, inacceptable, inévitable, celle de devoir affronter le néant. Et c'est justement ça, le premier défi que l'Homme en quête de connaissance doit relever: dépasser sa peur de l'inconnu et affronter le néant."
Tout ceci, Pax me l'avait déjà enseigné mais, ne l'avait jamais exprimé de cette sorte. Aussi, je me sens parfaitement en phase avec ses concepts. Je sais parfaitement de quoi il parle. J'expérimente moi-même depuis un certain temps ce que veut dire: l'incompatibilité de la vie ordinaire avec la quête de la connaissance, fusse-t-elle représentée uniquement par l'apprentissage du Tarot. Dans mon cas, nous sommes allés beaucoup plus loin que le Tarot. La Matrice, à laquelle Enrique m'initia, est un réel raccourci sur le chemin de la connaissance et depuis que j'y ai goûté, la vie de tous les jours me semble vraiment terne et une pure perte de temps. Et combien de fois ai-je dû affronter le rejet! Mais, comme Pax venait de l'affirmer, il faut bien nourrir notre enveloppe charnelle. Ne serait-ce que pour pouvoir poursuivre la raison réelle d'être d'un Homme de connaissance; devenir libre!
-"Oui! Etre libre est la seule raison d'être de l'individu qui est en quête de connaissance et cette liberté-là lui impose plus de devoirs, beaucoup plus de devoirs que de droits!" Il a dû, encore une fois, lire dans mes pensées. "Mais venons en à la raison de votre présence. Il vous reste encore beaucoup de choses à apprendre avant de pouvoir vous prétendre libre."
-"Et moi, qui croyait que mon apprentissage prenait fin."
-"Votre apprentissage? Non! Mon enseignement, si!" Ca y est, il a prononcé cette phrase terrible, définitive et absolue. Bien que je m'y attendisse, le choc fut rude.
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Le Mat
SpiritualChapitre I La Grande Maison Il y avait des jours comme ça. Des jours où je n'avais rien à faire d'autre que « glander » dans la ville et tuer le temps. Je me trouvais dans un café parisien. La vitrine de la véranda faisait face au jardin du Luxembou...