Chapitre 8

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Azenet verrouilla la porte avec précipitation et se laissa tomber contre la paroi rouge qui menait à la sortie. Essoufflé, il regarda la toilette blanche qui lui faisait face, encombrant la moitié de la surface au sol. Son amie de fortune. Finalement, il n'était pas si seul que cela...

Puis il fondit en larmes.

Il se replia sur lui-même comme un animal blessé, se coinçant un peu plus dans le coin de la cabine qu'il avait choisie pour être la témoin de sa douleur. Il avait déjà été blessé auparavant, mais il ne lui avait jamais semblé avoir aussi mal. Tout le monde savait, désormais.

Il sanglota douloureusement en se rappelant des souvenirs, des étreintes. C'était horriblement dur. Azenet avait envie d'ignorer ce qu'il s'était passé, de faire comme si cette dispute n'avait jamais existé, mais il ne savait pas s'il en était capable. Comment faire confiance à nouveau à un ami qui venait d'exposer sa vie privée aux yeux de tous, même en le connaissant depuis aussi longtemps ? Étrangement, Azenet savait qu'au fond de lui il faisait encore confiance à Aypierre, parce qu'une telle amitié ne pouvait pas être balayée si facilement, n'est-ce pas ? Si ? Non, Azenet ne le voulait pas. Il ne voulait pas être seul, il avait besoin d'Aypierre à ses côtés, il voulait ses étreintes, il voulait son rire, il voulait ses mots réconfortants à son égard, ou même, juste discuter avec lui comme avant. Même si c'était pour qu'il se plaigne de sa mère, Azenet s'en fichait. Il avait besoin de son meilleur ami et il le savait. C'était peut-être cela qui rendait l'agissement d'Aypierre si amer, si difficile à encaisser. Parce qu'il ne voulait pas se dire que sa relation avec Aypierre pouvait être terminée d'une façon ou d'une autre.

- Azenet ?

La voix n'était pas celle qu'il avait espérée. Il essaya de camoufler ses pleurs, mais sa respiration chaotique n'était pas décidée à lui rendre les choses faciles. Le jeune homme entendit qu'on toquait doucement contre la porte de sa cabine, mais il ne répondit pas. Qu'y avait-il à dire, de toute manière ?

- Azenet, je sais que tu es là-dedans...

Évidemment qu'il le savait, on devait apercevoir sa veste à travers la fente sous la porte, et peut-être même que celle-ci dépassait un peu du box, puisqu'il était appuyé contre. Il se mordit d'ailleurs le poing pour étouffer les sanglots qui menaçaient encore de s'échapper. Il ne voulait pas d'autres témoins que cette cuvette de toilettes puant le désodorisant bon marché. Surtout, il n'avait pas besoin d'une autre personne qui se ferait passer pour son ami avant de le trahir à son tour. Azenet voulait juste être seul, ne plus faire confiance à qui que ce soit, et cela le rendait triste car il savait pertinemment qu'il était incapable de vivre isolé du monde. Malgré tout, il était tellement déçu du comportement de celui qu'il avait encore envie d'appeler son meilleur ami, qu'il ne voulait voir personne pour le moment.

- Aze... Aypierre était tendu, il ne le pensait pas... Ça n'excuse pas ce qu'il a dit, mais je suis sûr que les gens auront tout oublié lundi...

Comment pouvait-il bien savoir ce qui avait traversé l'esprit d'Aypierre alors qu'Azenet lui-même peinait à le comprendre ? Il avait envie de croire qu'il le connaissait mieux que quiconque, il avait toujours essayé de se persuader de ça, mais il se rendait compte que c'était faux. Il ne le comprenait plus.

Il n'entendit aucun bruit provenant de l'extérieur de sa cabine, et il retint encore un peu ses larmes. Peut-être devrait-il sortir, rassurer Fukano sur son état, et rentrer pleurer chez lui, sans personne pour déranger sa peine. La petite toilette de sa salle de bain lui paraîtraient aussi plus familière que sa camarade actuelle.

Avec lenteur, il se releva en s'aidant des parois rouges qui l'entouraient. Il allait garder la face devant le rouquin et tout irait mieux. Pour se donner un air un peu moins ravagé, il découpa quelques feuilles de papier-toilette et s'en servit pour éponger ses paupières gonflées. Avec de longues respirations, il prit son temps pour jeter les feuilles humides et se retourna vers la porte, prêt à affronter le monde extérieur. Sa main approcha le verrou, un peu hésitante. S'il disait à Fukano qu'il allait bien, celui-ci ne le croirait pas. Il risquait de vouloir l'inviter à passer la soirée chez lui ou essayerait de le réconforter, mais Azenet n'en avait pas envie. Il n'avait envie de voir personne, encore moins des amis. La plaie qu'Aypierre avait ouverte barrait encore son cœur et il se sentait vulnérable face à d'autres amis qui pourraient eux aussi choisir de le trahir. Il se sentait seul, perdu. Pourtant, il avait vraiment besoin de se sentir entouré, protégé, mais qui pouvait encore l'aider, maintenant ? Aypierre l'avait trahi, sa mère était malade, ses autres amis ne comprendraient pas...

Une année au lycéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant