Jour 1

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Le départ de chez Lisa est prévu à 8h. Fidèle à sa réputation, elle m'offre pour tout petit déjeuner une prune dans laquelle elle a déjà croqué mais « qui n'est pas très bonne en fait ». Nous rassemblons les affaires et partons pour le RER. Nous devons retrouver Gaspard, Anne Charlotte et Nico au changement du RER B. Le rendez-vous est donné à l'avant de la rame, mais visiblement personne n'est d'accord sur le côté d'où arrive le RER, si bien que nous mettons un peu de temps à retrouver Gaspard et Anne Charlotte. Nicolas arrive comme une fleur quelques secondes avant l'arrivée du RER. Sur le trajet, jusqu'à l'aéroport, tout le monde est enthousiaste. Nicolas et Gaspard empruntent déjà l'accent québécois et ponctuent chaque fin de phrases par « C'est correc ». Je n'arrive pas à profiter pleinement de cet instant, je n'ai toujours pas l'AVE. Après moult recherches, je comprends que celui-ci est fortement conseillé mais pas obligatoire, une période de clémence étant accordée jusqu'à septembre 2016... Mais je reste inquiet. Ce qui est bizarre, c'est que je n'ai pas oublié de le demander, donc pour moi les autorités Canadiennes ont décidé en connaissance de cause de ne pas me délivrer l'autorisation. J'échafaude tout un tas de théories expliquant pourquoi je pourrais être persona non grata au pays du caribou.

A l'aéroport, je passe le contrôle douanier sans encombre, ce qui est légèrement rassurant. (Je reste néanmoins persuadé que je peux me faire refuser à l'immigration sur place à Toronto). J'ai déjà entendu deux histoires de proches ayant pu voler jusque-là bas avant d'être contraints de faire demi-tour). J'offre le petit déjeuner à mes amis, peut-être pour m'excuser de mon stress, bien que celui-ci soit –je crois- imperceptible pour les autres.

Nous montons finalement dans l'avion pour Toronto. Je suis avec Nicolas, les trois autres sont à notre gauche. Sur les sièges à l'avant il y a des écrans. Nous nous lançons dans une compétition de trivial poursuite, puis Nicolas et moi affrontons les 3 autres aux échecs. Nous perdons lamentablement suite à un joli coup de Gaspard. Nous décidons de regarder un film (nous avons en tout 8h à tuer !). Lisa nous recommande un « super film » qu'elle a « trop adoré » : The Lobster (le Homard en VF... oui avec un nom pareil j'aurais dû sentir l'arnaque !). Le film se passe dans un monde un peu identique au notre, mais où le célibat est proscrit. Chaque célibataire a 30 jours pour se trouver un partenaire, sans quoi il est transformé en animal. Seule manière d'échapper à cette règle : tuer des célibataires. Pour chaque célibataire tué, c'est un jour de sursit supplémentaire. Nicolas et moi trouvons le film certes intéressant, mais nous restons un peu médusés. Le film est bizarre et vraiment glauque, pas vraiment dans la ligne de notre enthousiasme pré-vacances ! Du coup je tente ma chance avec un autre film. C'est indiqué comédie, et je vois Albert Dupontel et Bouli Lanners sur l'affiche. Parfait. Le film s'appelle « les premiers, les derniers ». Je découvre peu à peu qu'il s'agit d'un film sombre, bizarre et encore plus glauque que le film précédent ! Ce n'est pas mon jour pour le choix des films !

Nous arrivons enfin au Canada ! J'ai la boule au ventre, vais-je pouvoir passer l'immigration ? Je me prends rapidement en photo, en me disant, « peut-être que ce sera la seule photo de moi au Canada ! » Nous sortons de l'avion direction l'immigration. Nous avons visiblement peu de temps pour attraper notre deuxième vol, alors nous marchons vite et demandons poliment aux gens devant nous de nous laisser passer. J'arrive à l'immigration. L'agent des douanes, me regarde, regarde mon passeport, me regarde à nouveau. Il sourit. C'est vrai que j'ai 8 ans de moins sur le passeport... Il semble bloqué sur mon passeport, il le regarde sans bouger. Cela dure une dizaine de secondes, pour moi une éternité... Puis il s'active soudain, fait un coup de tampon, me donne un papier et me laisse passer ! J'exulte ! Je peux enfin libérer ma joie, le voyage débute pour moi ! Je retrouve mes amis, j'ai le sourire jusqu'aux oreilles.

Cahier du CanadaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant