II

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Mes oreilles sifflent, ma poitrine se compresse et mes mains tremblent. La foule autour de moi devient de plus en plus oppressante et ma respiration se saccade. Je panique, je suis incapable de bouger. Je me fais bousculer et je perd l'équilibre. Une personne s'accroupit en face de moi mais à cause de ma vue brouillée je ne vois pas qui c'est. Elle saisit ma main et me relève. Les bruits de la foule s'estompent et une voix étouffée parvient à mes oreilles.

-Ne t'en fait pas, on est loin de l'agitation. Concentre toi sur ma voix et calmes toi. Calques ta respiration sur la mienne.

Elle m'assoit et je respire comme elle en écoutant ses paroles rassurantes. Je connais cette voix. Ma respiration revient à la normale et ma vue s'améliore. La fille de la bibliothèque est accroupie en face de moi, ses mains posées sur mes genoux me stabilisent et mes tremblements cessent.

-Merci.

Je me relève et elle me rattrape lorsque je tangue légèrement. Je lui souris et quand je vois ses yeux briller de joie une idée folle me passe à travers la tête.

-Pour te remercier comme il se doit, je t'invite boire un café avec moi.

-Avec plaisir !

Je la conduis au Starbucks le plus proche et tandis qu'elle choisit notre table je vais passer nos commande à l'un des serveurs.

-Un pumpkin spice latte et un thé fruits rouges s'il vous plaît.

-Tout de suite ma belle.

Le serveur me drague complètement, dommage pour lui, je suis de l'autre bord, j'aime les filles. Une fois nos boissons prête et dans mes mains, je me dirige vers la table et pose son thé devant la brune. Elle me sourit pour me remercier et replace une mèche de ses cheveux derrière son oreille. Elle me regarde avec insistance comme si elle hésitait à me poser une question.

-Je sais que tu veux me demander quelque chose alors vas-y.

-Toute à l'heure, tu n'étais pas très bien, je t'ai retrouvée au sol et j'aimerai savoir pourquoi...

Je soupire et passe ma main dans mes cheveux en fixant l'intérieur de ma tasse en carton.

-Enfin, si ça ne te dérange pas, elle s'empresse de rajouter.

-Non, c'est bon je vais essayer de t'expliquer. Je suis agoraphobe. C'est aussi simple que ça. S'il y a trop de monde, je ne suis pas à l'aise et je panique. Si je suis dans un endroit ou je ne me sens pas un minimum en sécurité, je panique. J'ai un traitement pour ça, mais des fois c'est pas suffisant et je fais des crises d'anxiété comme toute à l'heure.

-Ça fait combien de temps ?

-J'ai toujours été anxieuse comme fille. Plus stressée que moi, c'est rare. Mais ça va faire un un peu plus d'un an que je ne supporte plus la foule.

Elle me fixe de son regard profond tandis que je me tord nerveusement les doigts.

-Tu sais pourquoi ça a commencé ?

Je relève la tête avant d'observer à travers la fenêtre, les gens se pressent dans tout les sens, ils n'accordent pas d'importance à ce qui les entoure. Ça me dégoûte.

-Non, non je ne sais pas..

Je mens. Avalon saisit ma main et m'adresse un immense sourire rassurant.

-Ne t'en fais pas ! Je suis sure que tu vas t'en remettre, tu as l'air forte et invincible.

Je resserre mes doigts autour des siens qui sont gelés et lui répond moi aussi avec le sourire.

-Je n'en ai aucun doute.

On continue de discuter pendant des minutes, peut-être des heures, et aucune de nous n'a envie de partir. Seulement, son téléphone sonne et nous coupe dans notre conversation passionnée à propos de littérature anglaise. Elle décroche et pour lui laisser un peu d'intimité, je me concentre sur l'extérieur du café. La nuit commence à tomber et les rues sont plus sombres. Elle raccroche et me regarde désolée.

-C'était ma mère, je dois rentrer, je suis désolée.

-C'est pas grave.

Elle se lève et enfile sa veste et son écharpe. Je fais de même avant de sortir du Starbuck avec elle. Devant la devanture, elle me regarde et je la sens qui hésite à partir.

-Tu veux que je te raccompagne chez toi ?

Elle me regarde avec un immense sourire et hoche la tête.

-Si ça ne te dérange pas.

On marche dans les rues londoniennes pendant quelques temps, toujours discutant de littérature et littéralement enfouies dans nos écharpes. Les températures commencent à se faire basses pour ce mois de décembre. Arrivées devant une maison blanche typique de ce quartier, Avalon se stoppe et me regarde.

-Eh bien, c'est ici que je m'arrête.

-Okay, il faudra qu'on se refasse ça, un moment toute les deux.

-Avec plaisir. Tu as mon numéro, contacte moi si besoin.

-Je le ferais, et toi aussi fais le.

-Promis.

Elle me sourie et s'approche doucement de moi avant de m'embrasser délicatement sur la joue pendant une dizaine de seconde. Je reste interdite quelques temps, savourant la chaleur de ses lèvres douces sur ma joue gelée. Elle se recule ensuite et rentre chez elle avec un dernier signe de main dans ma direction. Je reprend la route et heureusement pour moi, on habite pas si loin l'une de l'autre. Avalon possède définitivement quelque chose qui m'intéresse, elle m'intéresse.

EndlessOù les histoires vivent. Découvrez maintenant