Lame

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Je me revois dans ma chambre, la lame de mon canif à plat sur mon ventre marquant de léger trait. La douleur n'est pas vive, elle est légère, douce, calme, réconfortante, rassurante. Cette douleur me ramène à la vie moi qui suis morte à l'intérieur. Il ne me semble que personne ne peut me comprendre et en plus ces voix dans ma tête refusent de se taire. Ces voix me torturent, me hantent, elles me disent que ma vie n'en vaut pas la peine et que le mieux pour tous se serait de mourir. Je ne veux pas les écouter, je ne peux pas, ma famille serait déchirée par ma faute c'est ce que je ne veux pour rien au monde. La seule raison pour laquelle la douleur n'est pas vive contre mon abdomen est que la lame est usée, peu affilée et qu'elle ne laisse qu'une trace comme une grafigne et aucune cicatrice. Une chance, c'est déjà assez difficile de vivre avec un passé pareil s'il fallait que j'en aie des traces permanentes en plus sur ma peau je n'ose pas imaginer ce que cela serait. Quand j'ai arrêté de me faire subir cette atroce chose, je ne l'ai pas fait pour moi, mais bien par amour pour ma meilleure amie qui m'a supplié d'arrêter et de lui promettre de ne jamais recommencer. J'ai tenu promesse malgré que parfois l'envie me reprend surtout lorsque les crises reviennent et je suis incapable des contrôler malgré les pilules que je prends. Ma famille n'a jamais soupçonné rien, mais quand ils ont su au moment où je suis rentré en pédopsychiatrie je peux vous assurer que ce fut un choc et souvent encore mon père me demande le regard triste :

— Pourquoi tu faisais ça Laurence

Je ne trouve rien à répondre, comment devrais lui expliquer que la douleur qui m'habitait ne pouvait sortir autrement. Il se sent coupable de ce qui m'est arrivé, mon envie de mourir, de tout et pourtant cela n'à rien avoir avec lui, avec eux ils ont tout fait comme ils se devaient. C'est en dedans de moi le problème et rien de ce qu'ils auraient pu faire n'aurait changé le cours de l'histoire. Aujourd'hui, je regarde ce petit canif rouge avec un drôle de regard, un peu comme s'il s'agissait d'un fantôme de mon passé.

L'essence du tempsWhere stories live. Discover now