Chapitre 4

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« Et si je hurle, personne n'écoute, car le moindre propos sortant de ma bouche se perd dans la foule bruyante, je ne parle pas assez fort et puis, qui s'en soucie ? » Jessica

Sous la lueur des lampadaires, je déambule sur le trottoir enneigé, les mains enfouies dans les poches. Mon souffle produit des nuages dans l'air ambiant, j'accélère la cadence pour me réchauffer, mais la morsure du froid provoque chez moi une sensation de léthargie, comme si mon cerveau ne se concentrait plus que sur le manque de chaleur et non pas sur toutes mes pensées incessantes me tourmentant. La température extérieure me fait oublier que la glace autour de mon cœur, cette glace refusant de fondre, provient de problèmes plus complexes que cela...

J'observe le ciel d'encre. Quelques étoiles tracent un sillon dans l'obscurité, mais beaucoup d'entre elles ne sont pas visibles à cause de l'éclairage de la ville. Cependant, elles existent, on pourrait les admirer à la campagne. Je songe que les solutions à mes problèmes sont peut-être comme ces étoiles : présentes, mais inaccessibles depuis ma perspective. Je vide ma tête de cette réflexion ridicule.

Mes bottes s'enfoncent dans la neige, crissant à chaque pas. Le son se répète à intervalle régulier, il me distrait. À l'horizon, les silhouettes des arbres du parc se profilent et se précisent à mesure que j'avance jusqu'au chemin pour pénétrer dans leur antre. Le blanc rayonne de chaque côté, il illumine le soir et me permet de distinguer les bancs disposés près des terrains de jeux pour enfants, éveillant en moi des souvenirs de Jacob et moi nous amusant ensemble. Je souris avec nostalgie en me remémorant cette période sans stress ni préoccupations, où mes émotions ne faisaient pas encore des siennes. Tout était alors si simple...

Les balançoires se bercent doucement au gré du vent. Je m'approche avant d'apposer ma main sur l'un des poteaux de métal soutenant la structure. Le froid transperce mes gants quelque peu, pourtant, je ne bouge pas. Il me vient l'envie saugrenue de me balancer comme une gamine en imaginant ma mère me crier « Un, deux, trois ! Mise à feu ! Feu ! ». Mais le siège doit être glacé. Puis, ce serait stupide.

Je devrais rentrer.

Quelqu'un court. Je me retourne promptement en voyant l'inconnu s'arrêter pour respirer profondément, les écouteurs dans les oreilles. Je m'apprête à poursuivre ma route, mais en m'approchant, je remarque le doré de ses cheveux et m'attarde sur son visage, son petit nez et ses lèvres minces...

Son regard croise le mien, puis il sourit. Je reste immobile, mes joues s'empourprent, mélange de joie et de désir se tortillant au creux de mon ventre. Le jeune homme halète un peu, quelques mèches collent à son front.

- Salut, dit-il. Qu'est-ce que tu fais là ?

- Je me promène, ça me détend. Tu fais de la course ?

Tristan acquiesce et retire sa tuque. Sa chevelure ébouriffée se dresse dans tous les sens. Je fonds sur place, le froid disparait.

- Abby m'avait pas dit que tu courais.

J'ignore pourquoi je parle d'elle. Je raconte tout ce qui me passe à l'esprit.

- Si tu veux savoir quelque chose sur moi, ma sœur n'est pas une référence, déclare-t-il avec un rire léger.

Un sourire béat se faufile sur mes lèvres.

- O-Oui, j'imagine.

Tristan range ses écouteurs et réenfile son bonnet. Mon cœur bondit de déception en le voyant déjà prêt à partir. Mais sa proposition me prend par surprise :

Montre-moi ton vrai visageOù les histoires vivent. Découvrez maintenant