1. REPOS FORCÉ (Partie VI)

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— Bon... céda-t-il en reprenant sa place. Le Docteur Pierce est venu m'apporter des radios. Je... je suis malade, les enfants.

Désemparé, il se laissa aller contre le dossier de sa chaise.

— Je n'étais pas très bien depuis un moment et on a découvert par hasard le mal dont je souffre, confia-t-il. Je n'ai pas voulu vous en parler parce que... la situation était déjà assez pénible comme ça pour tout le monde.

Je surveillais du coin de l'œil la réaction de Dane et je retins un hoquet en le voyant devenir cramoisi. Ses mains s'étaient fermées en deux poings livides.

— Tu ne crois pas que tu aurais dû nous en parler, non ? explosa-t-il en bondissant de sa chaise qui tomba à la renverse.

— Dane, je t'en prie, se désola notre père en avançant une main vers lui.

— Je ne suis plus un gamin, papa ! Tu n'avais pas le droit de me dissimuler ça.

Je n'étais nullement étonnée par sa réaction, mais plutôt par la violence de ses émotions. Lui qui conservait désespérément son calme ces derniers temps — au point que je m'étais demandé si cela ne cachait pas quelque chose — paraissait sur le point de commettre l'irréparable.

— Dane, reste tranquille ! lui ordonnai-je. Moi aussi, je suis en colère, mais ça ne te donne pas le droit de réagir de cette façon.

— Je n'ai pas d'ordre à recevoir de toi, alors fous-moi la paix ! Quant à toi, continua-t-il en tendant un doigt menaçant vers mon père, qu'est-ce que tu vas nous annoncer, maintenant ? Que tu vas mourir ?

— Oui.

Sa réponse avait fusé, nette, ce qui eut au moins le mérite de couper la chique à mon frère. Fou de rage, il quitta la pièce comme une furie et claqua la porte d'entrée si fort que les murs de la maison en tremblèrent. Les larmes débordèrent de mes yeux.

J'avais pensé en me levant ce matin que la situation ne pourrait pas être pire, que désormais nous n'aurions plus qu'à nous serrer les coudes pour sortir de cette impasse. Mais je réalisais à présent que tout ce à quoi je désirais me raccrocher était tout simplement parti en fumée depuis longtemps.

— Comment as-tu osé, papa ? gémis-je, les dents serrées.

— Je voulais vous protéger, expliqua-t-il. Comment aurais-tu pris la chose si je t'avais dit que bientôt, toi et ton frère, vous vous retrouveriez seuls ?

— N'essaie pas de me faire croire ça ! Je parie que même maman n'était pas au courant.

Il baissa les yeux, reconnaissant ainsi sa faute.

— Leave... commença-t-il en posant sa main sur la mienne.

Je me dégageai vivement, son contact m'étant tout à coup devenu désagréable. Je ne voulais pas me montrer méchante, mais c'était la colère qui parlait pour moi. Il n'avait tout simplement pas su me faire confiance et je m'apprêtais désormais à faire exactement ce que je venais de reprocher à Dane.

— Tu n'avais pas le droit, papa. Pas après tout ce que nous avons enduré. Tu sais que nous aurions tout mis en œuvre pour t'aider, que nous t'aurions soutenu. Maintenant, tu nous mets au pied du mur. Comment veux-tu que l'on réagisse ? Combien de temps nous reste-t-il à présent ? Hein ? Dis-moi, combien ?

— Pas beaucoup, avoua-t-il, penaud.

— Ce n'est pas juste ! crachai-je en me levant et en tournant les talons.

— Leave ? me rappela-t-il.

Je m'arrêtai net, mais choisis de ne pas me retourner.

— Leave, est-ce que... est-ce que tu m'en veux ?

Sa voix chevrota et je compris qu'il s'était mis à pleurer.

— Non, je ne t'en veux pas. C'est à moi que j'en veux.

À cet instant, je daignai lui accorder un regard par-dessus mon épaule.

— Je m'en veux d'avoir pu croire que tu m'aimais assez pour m'avouer la vérité.


L'OMBRE DU PHENIX (Auto-édition disponible sur Amazon)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant